31 août 2012

The Plague of Doves (La Malédiction des colombes)

Ce roman a été choisi pour la lecture du 1er septembre de notre Blogoclub, sous le thème du roman choral.  Il s'agit donc d'une histoire contée par plusieurs narrateurs. C'est ce qui fait son originalité, mais en ce qui me concerne, ce qui a un peu été cause de sa perte!

J'ai adoré le premier tiers du roman, narré par la jeune Evelina, Métisse qui a passé son enfance dans une réserve près de la ville de Pluto, North Dakota.  J'ai été émue d'apprendre que les Métis de cette région sont des descendants des colons français de l'Ouest canadien et qu'ils ont incorporé des mots français dans leur langue. Ces Métis ont quitté le Canada après la mort de Louis Riel.  J'ai particulièrement aimé les personnages du grand-père Mooshun et de son frère Shamengwa, le violoneux.  Leurs conversations avec le curé blanc qui tente de les ramener dans le giron de l'Église sont de vraies pièces d'anthologie.  Le passage où Moonshun raconte le lynchage des Indiens injustement accusés du massacre d'une famille blanche est un bijou, mélange de comédie et de drame en parfait équilibre, où l'humour vient renforcer l'émotion et l'indignation, et vice-versa.

On change ensuite de narrateur; j'ai continué à bien apprécier l'histoire des premiers colons blancs venus s'établir en plein hiver dans cette région et dont la vie fut sauvée par le talent de chasseur de leur chien et par la débrouillardise de leurs guides métis.  C'est par la suite que cela se gâte: j'ai été frustrée par toutes les digressions amenées par les narrateurs suivants, chacun contant  son histoire avec comme seuls liens cette région et quelques personnages qui reviennent d'un chapitre à l'autre, descendants des premiers colons et des deux frères métis.  Lorsqu'on revenait à la trame principale, je me réjouissais, pour être de nouveau dépitée lorsqu'on s'en éloignait.

 Finalement, une lecture en dents de scie, alternant les éclats de rire et les claquements de langue exaspérés.


Pour connaître l'avis des autres membres du Blogoclub, suivez les liens chez nos infatigables organisatrices Sylire et Lisa!  Aussi les billets de Sylvie, Choco (qui m'apprend que l'édition française contient un arbre généalogique, ç'aurait été bien pratique, ça. tiens!) et de Fashion.



The Plague of Doves de Louise Erdrich, 2008, 314 p. Titre de la traduction française: La Malédiction des colombes.

29 août 2012

C'était au temps des mammouths laineux

Dans ces chroniques sur des sujets divers, allant des autobus de Montréal à la Révolution mexicaine, Serge Bouchard se fait tour à tour drôle (lorsqu'il raconte ses démêlés avec Skype pour parler à sa famille en voyage),  émouvant (lorsqu'il parle de la maladie de sa première femme ou du déclin de sa vieille mère), passionnant et instructif (lorsqu'il déboulonne le mythe de Christophe Colomb ou nous fait découvrir des personnages colorés oubliés par l'Histoire avec un grand H), voire quasi  prophétique (lorsque, dans un texte écrit en janvier 2001, il prédit que cette année pourrait nous réserver des surprises après que les catastrophes annoncées pour 2000 ne se soient pas réalisées...). Il y en a pour tous les goûts! Les passages plus philosophiques sont moins ma tasse de thé, mais même là j'y ai trouvé des perles qui me donnent envie d'avoir meilleure mémoire pour les réutiliser à l'occasion, histoire d'épater la galerie!


Extrait:


«Je grogne, je grommelle, comme celui qui s'apprête à écrire un gros livre intitulé La Liste complète de tout ce que je hais.  Un jour je l'écrirai, ce livre, comme j'ai d'ailleurs l'impression de l'écrire un peu tous les jours.  Je hais la face cachée de mon ordinateur. Je connais bien ses dimensions bénéfiques, son côté dactylographique, sa mémoire qui traite le texte, qui est le paradis de l'écrivain qui fait, refait, défait, efface, coupe, refait une autre fois, ampute,  ajoute, déplace, ajuste, révise, revisite, reprend, se bat jusqu'à la folie pour le juste mot. Je hais les gens qui ne savent pas savourer une belle phrase écrite comme on savoure une belle composition musicale.Mais il y a tant de gens qui ne savent pas faire la différence entre un bon et un mauvais hamburger.

Je hais l'intelligence artificielle de mon ordinateur, lorsqu'il prétend bêtement m'en imposer, alors qu'il fait lui-même des liens stupides. Je l'adore quand je le fais plier, et que je l'oblige à faire ce que je veux.  Mon ordinateur s'ennuie, il est au bagne de l'ancienne écriture, il se demande pourquoi mes courriels ont 10 000 caractères, pourquoi il doit enregister des textes originaux alors qu'il pourrait enregistrer des tounes et des jeux .  Pourquoi je n'ai pas d'amis sur Facebook, pourquoi je suis sans twitt, pourquoi je ne fais pas confiance à Wikipédia, pourquoi je ne trouve rien sur Youtube, pourquoi je n'utilise jamais les milliards d'applications qui le rendraient si performant?»

Son ordinateur et le mien devraient fonder un club...

Dans la catégorie Néologismes à faire entrer au Robert au plus sacrant:
Gougouler: faire une recherche sur Google. 

Je ne sais pas vous, mais moi je ne peux qu'aimer d'amour un homme qui finit un paragraphe par une phrase telle que: Mais où donc va cet homme avec un coyote sur le toît de son pick-up?


Le billet de GeishaNellie, celui de Suzanne.  


C'était au temps des mammouths laineux de Serge Bouchard,  2012, 226 p.



09 août 2012

Les Bûchers de Bocanegra

(Les Aventures du Capitaine Alatriste, tome 2)

 Je vous ai déjà parlé de cette série ici.  C'est avec grand plaisir que j'ai retrouvé les personnages introduits dans le tome 1, bons et méchants. La magie a opéré de nouveau! Dès les premières lignes, on se retrouve transporté dans l'Espagne du XVIIe siècle, cette Espagne minée par la corruption et les guerres, par l'anti-sémitisme et l'Inquisition.  Ah, l'Inquisition, c'est épouvantable, mais quel formidable creuset à méchants pour la littérature et le cinéma! Pensez par exemple à Bernardo Gui dans Le Nom de la Rose...

Alatriste a donc encore maille à partir avec l'Inquisition, et son jeune protégé Inigo se retrouve dans un foutu pétrin!  Le tour de force ici, c'est qu'on a beau savoir que ce dernier s'en sortira, puisqu'il est le narrateur et évoque des événements qui se produiront quand il sera adulte, on se ronge les sangs quand même! Ce qui est admirable aussi, c'est à quel point il sait nous faire aimer le personnage d'Alatriste, qui pourrait sembler hautain et détaché. L'affection qu'ils éprouvent l'un pour l'autre est tangible et communicative.

Mais ce que j'aime avant tout de cette série, je le répète, c'est son romantisme. APR se prend pour Dumas, et ça fonctionne!  Vivement le tome 3!


Les Bûchers de Bocanegra d'Arturo Pérez-Reverte, traduit de l'espagnol, 1997, 289 p.  Titre original: Limpieza de Sangre.