28 février 2011

Allah n'est pas obligé

Je l'avoue, lorsque j'ai su que c'est cette oeuvre qui avait été sélectionnée par notre club de lecture pour ce trimestre, j'ai été un peu déçue... En fait, sur la douzaine de titres suggérés, c'est le seul qui ne me tentait pas!  Le sujet me semblait vraiment difficile (les enfants soldats en Afrique), le titre est rébarbatif.  Mais une des raisons de participer à un club est de nous forcer à sortir de notre zone de confort et à faire des découvertes inattendues.

Dès les premières lignes, j'ai été rassurée. Le narrateur est un garçon d'une douzaine d'année, qui incorpore dans son récit des expressions typiquement africaine.  Le style est donc très vivant et me rappelle un peu celui de Dany Laferrière dans Le Charme des après-midi sans fin, que j'avais adoré.

Par contre, à partir du milieu, j'ai un peu déchanté.  L'enfant devenu soldat par la force des choses passe d'une faction à l'autre au Liberia puis en Sierra Leone, et à chaque fois on a droit à l'historique du groupe et de son leader, ce qui devient un peu répétitif, et assez peu réaliste, car comment ce petit garçon qui n'a été à l'école que quelques années peut-il connaître tout cela, dates à l'appui? J'ai même eu l'impression que l'auteur lui-même avait décroché puisque le narrateur change complètement de ton, se mettant à parler comme un professeur d'histoire pendant plusieurs pages.

Même si ce n'est pas un immense coup de coeur, je suis quand même bien contente d'avoir découvert cet écrivain que je ne connaissais pas.  Ce roman correspondait tout à fait au thème de ce trimestre, l'Afrique, dont il nous donne une image bien éloignée de la vision idyllique qui nous est parfois présentée.


Pour les billets des autres membres du Blogoclub, suivez les liens chez nos chouettes organisatrices, Sylire et Lisa!


Allah n'est pas obligé d'Ahmadou Kourouma, 2000, 223 p.

23 février 2011

Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle

En 1999, le journaliste néerlandais Geert Mak entreprend un grand tour à la fois de l'Europe et du XXe siècle.  Chaque mois, il se consacre à une période donnée: il visite les lieux où se sont déroulés les événements, rencontre les témoins (du simple paysan ou soldat jusqu'aux plus haut placés) et cite une quantité impressionnante d'archives (articles de journaux, autobiographies, journaux intimes). Une technique qui n'est pas sans rappeler celle des écrivains Lapierre et Collins (Ô Jérusalem, Cette Nuit la liberté, etc), mais exécutée avec encore plus de rigueur, de méthode.

Une lecture souvent éprouvante -- inutile de souligner que ce siècle a été une succession d'horreurs --  mais aussi pleine d'espoir, car Mak n'oublie pas de nous parler de héros, dont l'Histoire a retenu le nom ou pas, qui ont mis leur vie en danger pour en sauver d'autres ou pour dénoncer l'injustice.  Il établit des liens entre différents événements, différentes époques (comme illustré par cette citation), entre le passé et le présent. Il excelle aussi à présenter les deux côtés de la médaille, le point de vue du vaincu autant que celui du vainqueur, ce qui est plutôt rare.  Ainsi, les crimes de guerre des Allemands durant la Deuxième Guerre mondiale ont été maintes fois racontés, ceux des Alliés beaucoup moins souvent.  Je savais que ces derniers n'y avaient pas été avec le dos de la cuillère lors de bombardements de villes allemandes, mais j'ignorais que ces bombardements avaient été planifiés, non pour détruire des points stratégiques (usines, ponts, etc) mais pour faire systématiquement le plus de victimes civiles possibles, dans un but de démoralisation de la population.

Cent ans d'Histoire en près de mille pages (sans compter les notes et autres appendices): ça ne se lit pas en criant ciseau, mais en disant bravo!

Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle de Geert Mak, traduit du néerlandais, 2007, 1058 p. incluant 88 p. d'appendices.  La version originale, In Europa/Reizen door de twintigste eeuw, date de 2004.

17 février 2011

Pour ne pas se retrouver comme les Américains...

Le CRTC se propose de changer la loi interdisant aux médias de publier volontairement des mensonges...  La raison cachée?  La nouvelle chaîne Sun TV voudrait imiter le «beau travail» de Fox News chez nos voisins d'en bas! Si comme moi cette histoire vous inquiète, dépêchez-vous d'aller signer la pétition mise en ligne par Avaaz (mouvement mondial en ligne qui donne aux citoyens les moyens de peser sur les décisions politiques mondiales, j'avoue, j'ai copié ça sur leur site!), en espérant que la décision finale ne soit pas encore prise irrémédiablement!  On est déjà à 78 000 signataires et ça continue à grimper...

05 février 2011

L'Effet papillon...

«Lors de la dégradation de Dreyfus, la foule massée devant les grilles criait "À mort! À mort les juifs!" Le correspondant à Paris de la Neue Frei Presse de Vienne, un juif, fut tellement bouleversé qu'il rentra dans son pays et rédigea les premières phrases de son traité, L'État juif, où était affirmée la nécessité pour les juifs d'obtenir leur propre État.  Il se nommait Theodor Herzl.  Les tout premiers germes de la formation de l'État d'Israël sont là, dans l'affaire Dreyfus.»  (Geert Mak, Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle, p. 31)
C'est un peu la version temporelle de l'effet papillon, non?

03 février 2011

Chagrin d'école

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Après avoir vu l'excellente entrevue de Daniel Pennac par Stéphan Bureau à l'émission Contact, j'ai eu le goût de renouer avec cet écrivain dont j'avais beaucoup aimé les deux premiers tomes de la série des Malaussène.  (Pourquoi je n'ai pas continué, d'ailleurs?  Je crois que le troisième tome n'était jamais disponible à la bibliothèque, on était au faîte de la popularité de cette série au Québec... Après, j'ai oublié d'y revenir, et nous voilà bien des années plus tard...)  Toujours est-il que pour ces retrouvailles j'avais sélectionné Comme un roman, essai sur la lecture dont j'ai lu le plus grand bien chez d'autres lecturophiles.  De retour chez moi, je me suis aperçue que j'avais plutôt emprunté par distraction un autre essai (qui flirte avec l'autobiographie), Chagrin d'école, où Pennac raconte ses expériences douloureuses en tant qu'écolier peu doué, puis ses réflexions en tant que professeur de français. 

Si j'ai apprécié retrouver sa plume alerte et spirituelle, je pense que le sujet abordé intéressera plus les professeurs et professionnels de l'Éducation, de même sans doute que les anciens cancres et les parents d'élèves en difficulté (cancre étant un mot tombé en désuétude, ce qui ne change probablement pas grand chose à la situation des enfants en question...).  Ne faisant partie d'aucune de ces catégories, j'ai lu le tout sans me sentir vraiment concernée.  J'ai tout de même relevé certaines pistes de réflexions intéressantes pour tout un chacun, sur l'enfant consommateur, sur notre tendance à généraliser (les jeunes défavorisés font tous partie de gangs de rue), à penser que «c'était donc mieux dans notre temps»...   Cela m'a aussi rappelé de nombreux souvenirs d'école, de professeurs formidables ou... moins!


Les billets (parmi tant d'autres) de George Sand, Sophie, Google et Laurence du Biblioblog, Jules, Abeille, Bladelor...  Plusieurs de ces commentaires semblent confirmer mon opinion que cet essai intéressera surtout les professeurs et les anciens cancres!


Chagrin d'école de Daniel Pennac, 2007, 305 p.