30 août 2014

Jonathan Strange & Mr Norrell


«Jeremy made a sort of snorting sound of derision.  "I believe I know better, sir, than to trouble you with such nonsense!  Ladies in black dresses walking about in snow -storms!"
   "I hope you did not speak too harshly to him."
   "Me, sir? No, indeed!"
   "Perhaps he was drunk.  Yes, I expect that was it.  I dare say he and David Evans were celebrating the successful conclusion of their business."
Jeremy frowned.  "I do not think so, sir. David Evans is a Methodist preacher."
   "Oh! Well, yes.  I suppose you are right. And indeed it is not much like a hallucination brought on by drunkenness.  It is more the sort of thing one might imagine if one took opium after reading one of Mrs Radcliffe's novels."»

Nul besoin d'en avoir fumé du bon pour apprécier ce formidable roman -- formidable tant par son volume (782 pages de petits caractères serrés) que par sa qualité -- racontant les efforts de deux magiciens pour faire revivre la magie depuis longtemps confinée aux livres, ainsi que leur rivalité et leur lutte contre un inquiétant Faery aux cheveux argentés, kidnappeur de jolies femmes.  L'originalité de l'intrigue est qu'elle se situe au XIXe siècle plutôt qu'au Moyen-Âge comme c'est généralement le cas, et qu'elle fait cohabiter les magiciens et créatures féeriques avec des personnages historiques comme le duc de Wellington et Lord Byron.  Saviez-vous par exemple que c'est grâce à la magie que les Anglais et leurs alliés ont vaincu Napoléon Bonaparte?

Le style d'écriture rappelle Dickens et l'atmosphère oscille entre la légèreté d'un humour subtil, très British, et la noirceur des manoirs humides et des landes désolées, balayées par les tempêtes, des romans gothiques.  Même Venise ne vous aura jamais semblée si glauque!  Le rythme n'est pas des plus rapides et déplaira sans doute aux amateurs d'action échevelée et d'explosions à répétition.  Susanna Clarke est plutôt du genre à installer tranquillement son histoire, à bien camper ses personnages.  Toutefois elle ne souligne rien à gros traits, se fiant à l'intelligence du lecteur pour faire les liens nécessaires.  Dans de nombreuses notes en bas de page, elle développe la mythologie qui sous-tend l'intrigue, et l'on se prend à croire que oui, le Raven-King a peut-être vraiment existé...  Et si comme moi, lisant assis sur votre balcon, vous sursautez au cri de quelque corneille, vous saurez qu'elle est la messagère de ce roi légendaire!


Jonathan Strange & Mr Norrell de Susanna Clarke, 2004, 782 p. Titre de la traduction française: Jonathan Strange & Mr Norrell.

27 août 2014

Québec en septembre: à vos marques...

Besoin de suggestions pour votre participation à la célébration de la littérature québécoise organisée par Karine?

Voici quelques livres québécois, certains très connus, d'autres moins, lus depuis l'ouverture du blogue et que j'ai particulièrement aimés:


Il y en a pour tous les goûts!  Et vous, des suggestions?




08 août 2014

Travels with a Donkey in the Cévennes

(Voyage avec un âne dans les Cévennes)

Vous le saviez, vous?  Robert Louis Stevenson n'a pas seulement écrit des romans d'aventures ou fantastiques, il a aussi pondu quelques récits de voyage, dont celui-ci qui est un petit bijou d'esprit, d'humour à l'anglaise et de poésie.  Si vous recherchez des péripéties haletantes, passez votre chemin, car le gros de l'affaire est la description des paysages montagneux et des habitants de cette région isolée. Il y a bien quelques scènes violentes lorsqu'il nous conte l'histoire des Cévennes, où eu lieu une guerre de religion assez sanglante; et le coeur sensible (ie le mien!) frémit un peu aussi lorsque le voyageur apprend à mener son ânesse à coups de bâton comme cela se faisait sans trop d'arrière-pensées à l'époque.  Bientôt l'humain et l'équidé arrivent à s'entendre et la paix s'installe.  Il y a seulement quelques longueurs vers la fin, où Stevenson se fait plus philosophique et abstrait, discourant de morale et de religion. 

J'ai trouvé assez intéressant le fait que certains passages en français ne sont pas traduits. On prenait donc pour acquis à cette époque que le lecteur anglais cultivé était nécessairement bilingue! Ça a bien changé, non?

Enfin, si ce récit ne vous donne pas le goût d'aller dormir à la belle étoile dans une clairière, c'est que vous êtes un pantouflard invétéré!


Travels with a Donkey in the Cévennes de Robert Louis Stevenson, 1879, 76 pages en version numérique. Titre de la traduction française, Voyage avec un âne dans les Cévennes.