30 janvier 2008

I'll Tell You a Secret

I'll Tell You a Secret: A Memory of Seven Summers d'Anne Coleman, publié chez McClelland & Stewart en 2004. 237 p. Titre de la traduction française: Sept étés de ma jeunesse: souvenirs de North Hatley.


Anne Coleman nous raconte ici les étés de son adolescence à North Hatley (dans les Cantons de l'Est, au Québec), où ses parents, bourgeois aisés de Toronto, avaient un chalet au bord du lac Massawippi, et décrit la relation complexe qu'elle eut alors avec le célèbre écrivain canadien-anglais Hugh MacLennan (Two Solitudes). J'aurais sans doute apprécié encore plus ce récit si j'avais déjà lu un seul bouquin de cet auteur (MacLennan) qui est devenu un classique, mais je dois avouer avec un peu de honte une profonde méconnaissance de la littérature anglo-canadienne. Mes remords sont toutefois grandement atténués par la certitude que cette ignorance est réciproque. Je suis convaincu que le Canadian moyen serait incapable de nommer un seul écrivain québécois. Two solitudes indeed...

J'ai néanmoins beaucoup apprécié ces mémoires. La relation de l'adolescente avec l'écrivain, de presque trente ans son aîné, une amitié mutuelle doublée de part et d'autre d'un amour inexprimable parce qu'inacceptable, renforcée par une passion mutuelle pour la littérature et la musique, cette relation, donc, est décrite avec beaucoup de subtilité et de finesse, dans une langue d'une grande clarté et d'une fluidité reposante après le style plus ardu de ma lecture précédente. En même temps, elle est capable de jeter un regard critique sur cet homme pour lequel elle avait une grande admiration, n'hésitant pas à relever ses idées rétrogrades (qu'il faut bien sûr replacer dans leur contexte -- le récit se déroule dans les années 1950) sur le pouvoir des femmes en général et sur les femmes écrivains en particulier.

Je me suis toute à fait reconnue dans cette jeune fille, il me semble que vingt-cinq ans plus tard j'ai eu les mêmes interrogations sur la sexualité, la maternité, la place des femmes dans la société, etc. Et lorsqu'elle décrit avec sensualité les plaisirs de l'été (faire du canot sur un lac tranquille, s'étendre dans l'herbe au soleil...) cela m'a rappelé plein de souvenirs ensoleillés (qui sont les bienvenus avec le temps moche que nous avons ces temps-ci!).

(***Si vous avez l'intention de lire Jane Eyre, sautez ce paragraphe, un élément de l'intrigue y est révélé!***) J'ai remarqué aussi que de nombreuses allusions sont faites aux classiques de la littérature anglaises, notamment Jane Eyre mais aussi souvent Austen ou encore Tess of the d'Ubervilles de Thomas Hardy, ici comme dans d'autres romans lus ces derniers mois, et ce, souvent sans que le titre en soit mentionné clairement. On compare par exemple un personnage à «la première Mme Rochester», sans autre forme d'explication. Je me demande combien de ces références me passaient dix pieds par-dessus la tête avant que j'aie lu ces romans, et combien d'autres m'échappent encore parce que ma connaissance des classiques est pour le moins fragmentaire, tant du côté anglophone que francophone...

25 janvier 2008

Le Nom de la Rose - les livres lus

Suite à une question d'une des participantes, j'ai pensé créer ce billet pour que tous ceux qui le désirent puissent laisser dans les commentaires des liens vers les livres qu'ils ont lus dans le cadre du défi. Ainsi ce sera plus facile de s'y retrouver... J'ai bien hâte de vous lire!

Voici déjà les miens:

23 janvier 2008

The Story of Lucy Gault

The Story of Lucy Gault de William Trevor, publié chez Alfred A. Knopf Canada en 2002. 228 p. Titre de la traduction française: Lucy.


Je ne sais même plus où j'ai entendu parler de cet auteur. Je crois que j'ai vu un film qui avait été tiré d'un de ses livres il y a quelques années, mais aucune idée lequel. Sa bibliographie ne me donne aucun indice. Toujours est-il que j'avais écrit son nom sur ma liste, et j'apercevais parfois ce livre à la bibliothèque municipale, mais je dois dire que le titre me semblait un peu ennuyant. Puis la dernière fois que je suis allé à la bibli, j'avais besoin d'un petit livre pour compléter ma sélection -- j'essaie d'évaluer ce que je vais avoir le temps de lire en six semaines. Avec ses 228 pages, celui-ci était parfait!

Hé bien finalement, c'est une très belle découverte! Sur fond de troubles politiques et de guerre civile* en Irlande, c'est l'histoire d'une jeune Irlandaise protestante qui se sauve de chez elle parce que ses parents veulent émigrer en Angleterre et qu'elle refuse de quitter la terre qu'elle adore et où elle a toujours vécu. Il s'ensuit une série d'évènements qui auront un profond impact sur tout le reste de sa vie et sur celle de ses proches. Ce n'est toutefois pas un roman d'aventure, loin de là. En fait, il ne se passe pas grand-chose. C'est surtout l'évolution psychologique et émotionnelle de Lucy qui est finement décrite, ainsi que des thèmes comme la culpabilité, le ressentiment et le pardon. Dit comme cela, vous trouvez peut-être que cela a l'air endormant, mais pas du tout! Il y a bien quelques longueurs dans le dernier quart, et la fin manque un peu de punch, mais dans l'ensemble, c'est un livre formidable! C'est triste, oui, mais jamais déprimant.

Si Charlotte Brontë avait écrit des tragédies grecques, cela aurait probablement donné quelque chose comme ce roman. Sauf que cela se déroule au XXème siècle. En Irlande. Et sauf que pas un fils ne couche avec sa mère et que personne ne se crève les yeux. Bon finalement ma comparaison est peut-être un peu bancale, mais ce que je voulais dire surtout c'est que le Destin avec un grand D joue un rôle prédominant, il est presque un personnage, comme dans l'idée que je me fais d'une tragédie grecque; et que point de vue ambiance, on se croirait dans les landes anglaises.

L'écriture de Trevor est très belle, quoiqu'un peut ardue à lire en version originale; je devais parfois lire un passage plusieurs fois pour bien le comprendre, car la construction des phrases n'est pas classique. Un très beau style, mais qui demande un effort, donc. D'ailleurs je me suis surprise plusieurs fois à lire dans ma tête avec un accent british, ce qui est un peut nono puisque l'auteur est irlandais!



Lu pour la catégorie prénom du défi Le Nom de la Rose.





* Décidément le thème de la guerre civile est à la mode, puisqu'il se retrouve également dans mes deux dernières lectures, The Darling et L'Ombre du vent. Ici toutefois, il s'agit surtout d'un élément déclencheur et d'une toile de fond, les événements eux-mêmes ne sont pas décrits de façon détaillée.

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Prochaine lecture: I'll Tell You A Secret d'Anne Coleman.

19 janvier 2008

L'Ombre du vent

L'Ombre du vent, de Carlos Ruiz Zafon, publié chez Grasset en 2003. 524 p.


Quel délice! De l'humour, de l'amour, du mystère, du drame, de l'action, une page d'histoire, des personnages hauts en couleurs, des méchants très méchants, il y en a pour tout les goûts! L'histoire d'un jeune garçon obsédé par un mystérieux écrivain dont tous les livres sont brûlés, exemplaire par exemplaire, par un étrange et inquiétant inconnu au visage difforme... Dans sa quête, il rencontrera l'amour, deux fois plutôt qu'une, l'amitié, mais aussi la haine.

L'intrigue se déroule à Barcelone (pas toujours aussi ensoleillée qu'on pourrait croire, puisque plusieurs scènes se déroulent dans le brouillard ou sous la pluie battante!), après la Guerre Civile qui déchira l'Espagne. Une bonne façon de se rappeler que le Fascisme n'est pas si loin derrière nous, puisque cette guerre permit au régime du général Franco de sévir jusqu'en 1975, ce qui ne fait quand même que trente-trois ans!

En même temps, c'est aussi un roman sur le plaisir de lire et sur l'importance qu'un seul livre peut prendre dans notre vie.

Durant ma lecture, j'ai de plus été frappée par plusieurs petite coïncidences, des petites phrases par-ci par-là qui me rappelaient des livres lus récemment, et surtout une partie de la clé de l'énigme qui se retrouvait presque telle quelle dans un épisode d'une de mes émissions préférées, visionné pas plus tard qu'avant-hier! Je n'en dis pas plus pour ne pas vendre la mèche...
L'avis d'Allie, de Louis, de Sylvie, de Flo, de Caroline, de Kalistina, de Yueyin...

Lu pour la catégorie phénomène météorologique du défi Le Nom de la Rose.








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Prochaine lecture: The Story of Lucy Gault, de William Trevor.

11 janvier 2008

The Darling

The Darling, de Russell Banks, publié chez Alfred A. Knopf en 2004. 392 p. Titre de la traduction française: American darling.


After many years of believing that I never dream of anything, I dreamed of Africa.


Dès la première phrase, on est happé, et l'intérêt sera soutenu jusqu'à la fin. À la fois drame psychologique, leçon d'histoire et suspense géopolitique, ce roman est pour moi une belle découverte, puisque je ne connaissais pas l'auteur Russell Banks.

L'intrigue se déroule en grande partie au Libéria, et raconte la quête d'identité d'une femme: fille de son père pédiatre réputé, membre d'un groupe radical et recherchée par le FBI, épouse blanche américaine d'un haut fonctionnaire libérien, mère blanche de trois garçons noirs, protectrices de chimpanzés maltraités, qui est-elle vraiment?

Je connaissais peu l'histoire de ce petit pays africain, outre le fait qu'il avait été fondé au XIXème siècle par d'anciens esclaves noirs américains revenus sur le continent de leurs ancêtres. Mais j'ai appris qu'en fait, c'est en grande partie les Blancs qui ont encouragés ce retour aux sources, pour tenter de régler les problèmes que posaient les esclaves affranchis qui commençaient à s'établir en ghettos dans les villes. Soutenus financièrement par les Blancs, qui y voyaient également la chance de se créer un pied-à-terre en Afrique de l'Ouest afin d'en exploiter les richesses naturelles (notamment le caoutchouc), les Noirs colonisèrent donc cette petite portion de la côte qui n'avait été réclamée par aucune des grandes puissances. Et que firent-ils une fois installés? Ils s'empressèrent de reproduire le type de société qu'ils connaissaient en réduisant en esclavage les populations primitives qui y vivaient depuis des temps immémoriaux. Établi sur des bases aussi malsaines, le pays pouvait difficilement évoluer en une démocratie éclairée, et son histoire récente est constituée de coups d'états, de guerres civiles et d'élections douteuses.

Sur cette toile de fond, le récit est habilement construit. Le passé de l'héroïne est dévoilé peu à peu, chaque nouveau détail soulevant de nouvelles interrogations. Malgré son incapacité à créer des liens réels avec les humains qui l'entourent (alors que ce lien est très fort avec ses chimpanzés), on s'attache à elle et on l'accompagne dans sa tentative de se réconcilier avec son lourd passé. Vraiment, un roman passionnant, intense, dont certains passages sont très durs, toutefois.

Fait intéressant, ce bouquin sera porté à l'écran en 2009 par nul autre que Martin Scorsese, avec Cate Blanchett dans le rôle d'Hannah. Russell Banks collabore à l'adaptation, donc on peut espérer que le film sera fidèle au livre!



L'avis de Dda du Biblioblog, de Jules, de Flo, de Bernard, de Sylvie, d'InColdBlog, de Cuné, de Sophie, de Frisette, de Sylire...


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Prochaine lecture: L'Ombre du vent, de Carlos Ruiz Zafon.

05 janvier 2008

Blog enrhubé!

Gros nez rouge, atchoum, teuf teuf teuf! Aucune énergie pour bloguer! Je reviens dans quelques jours... J'ai vu que nous avons plusieurs nouveaux participants pour le défi Le Nom de la Rose! Je ne vous oublie pas, j'ajoute les liens vers vos listes dès que je rejoins le monde des vivants!

01 janvier 2008

La Vierge froide et autres racontars

La Vierge froide et autres racontars, de Jorn Riel, traduit du danois, publié chez 10/18 en 1993. 158 p. La version originale, Den Kolde jomfru og andre skroner, date de 1974.


Ça s'annonçait plutôt mal! Le premier chapitre, j'ai détesté! Je ne sais pas vous, mais moi des chasseurs groenlandais qui s'expriment en argot parisien, je ne suis pas capable. Je comprends bien qu'on veuille ainsi traduire un niveau de langage populacier ou vulgaire, mais ça me fait décrocher à tout coup. Si ce livre n'avait pas été notre sélection pour le club de lecture, et s'il n'avait pas été si court, je l'aurais lâché là.

Heureuse surprise, le deuxième chapitre est déjà beaucoup mieux! On semble avoir abandonné l'argot pour un registre plus neutre. En plus, ce ne sont pas vraiment des nouvelles (un genre que je trouve souvent frustrant) comme je le croyais au départ, puisque les mêmes personnages reviennent d'une histoire à l'autre. Je continue ma lecture, je souris, je continue, je ris franchement! C'est gagné!

«Bizarre autant qu'étrange, me dis-je, on dirait que ce livre a été traduit par deux personnes différentes!» Je jette un coup d'oeil sur la page titre, et effectivement il y a bel et bien deux traducteurs! Je mettrais ma main au feu que l'un des traducteurs a traduit le premier chapitre et l'autre à peu près tout le reste.

Finalement, quel délice que les aventures de ces chasseurs disséminés sur la côte du Groenland, vivant deux par deux dans des cabanes isolées, dans un monde où les femmes ne sont présentes qu'en fantasme! La solitude, le froid et l'alcool les a rendus un peu zinzins, pour notre plus grand plaisir!

Contrairement à ce qui s'est passé lors de ma lecture scandinave précédente, Le Lièvre de Vatanen d'Arto Paasilinna, dont j'avais beaucoup aimé le début mais avais décroché par la suite, ici, après un début des plus difficiles, en bout de compte j'ai vraiment bien aimé!!

Pour voir les billets de mes consoeurs du club de lecture, voyez (d'ici quelques jours, hein, laissons leur le temps de se remettre du Réveillon!) les liens chez Sylire ou chez Lisa.

Voici aussi les avis de Chimère et de Coeur de Chêne du Biblioblog.


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Et nous connaissons maintenant le résultat du vote pour la prochaine lecture du Club des blogueuses, une sélection qui se faisait sous le thème de la biographie. Il s'agit de Je, François Villon, de Jean Teulé. À lire pour le 1er mars!