29 mai 2021

Les Miracles du bazar Nayima

«Magnifique», «sublime», «une pépite»: tels sont les commentaires de lecteurs de ce roman de Keigo Higashino, qui a été choisi pour le club de lecture de Livraddict du mois de mai.  

Malheureusement, mon avis sera plus mitigé!  Pour moi, cela a été une lecture sympathique, mais sans plus.  

Le sujet n'est pas extrêmement original (cette histoire de lettres qui se transmettent d'une époque à l'autre m'a donné une impression de déjà-vu) mais j'avoue qu'il est bien exploité.  Peu importe si le conseil reçu est suivi ou non par les récipiendaires de ces fameuses lettres signées Bazar Namiya, le résultat n'est pas celui qu'on attendait.  J'ai trouvé cela ingénieux.  Quant au dénouement, il a su me surprendre. 

Le principal défaut est la plume de Higashino. Elle est simple et bien lisible, mais manque d'ambition.  Tout est expliqué en détail, rien n'est laissé à l'interprétation du lecteur.  Par exemple, dans un passage qui se déroule dans les années soixante-dix, on prend la peine de souligner que les journaux et la télévision étaient les seules sources d'information du personnage, car ni Internet ni les réseaux sociaux n'existaient à l'époque.  Merci de me l'avoir expliqué, car je ne comprenais pas pourquoi il n'ouvrait tout simplement pas son ordinateur...   En fait, pour être plus précise, la plume est à la fois trop détaillée et lourde sur certains aspects, et pas assez sur d'autres, comme les liens entre différents lieux et le fonctionnement de cette faille temporelle (je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait vraiment une explication, mais je n'ai pas bien compris cette histoire de porte ouverte ou fermée, le lien avec le centre d'accueil, etc.)

J'ai trouvé également qu'on passait trop rapidement d'un personnage à l'autre.  Je n'ai réussi à m'attacher à aucun d'entre eux, et il y en a même deux que j'ai trouvés complètement interchangeables.  Dans plusieurs cas, en savoir plus sur leurs antécédents aurait été nécessaire, ou à tout le moins intéressant.

Bref, un petit roman plaisant, non dénué de qualités, mais dont le style est banal et qui reste trop superficiel.  


Les Miracles du bazar Namiya de Keigo Higashino,  2012, traduit du japonais en 2020, 281 p.  Titre de la version originale: Namiya zakkaten no kiseki.

15 mai 2021

Ténèbre

Alors, les copains, je crois que ce billet va être plutôt court, car autant j'ai aimé ce roman, autant je trouve difficile d'en parler intelligemment, tant il est étrange.  

En effet, il entremêle la vérité historique la plus crue -- l'intrigue se déroule à la fin du XIXe siècle au Congo, alors que Belges et Français se disputent le territoire en écrasant violemment les indigènes -- avec une ambiance onirique teintée de réalisme magique.  On nous parle de mains coupées à coups de machette, puis un peu plus loin on se retrouve dans une scène digne de Chagall, avec un personnage s'envolant vers la lune accompagné de ses deux chiens. Sans oublier le chimpanzé parlant flamand.  Et surtout, le texte, dense et touffu, est rempli de symboles et de métaphores, et franchement je n'ai pas tout compris, ce qui ne m'a pas empêchée de me délecter.

Enfin, je me suis demandé si je devais classer ce livre en littérature française ou québécoise...  L'auteur est né en France mais habite au Québec depuis dix ans, et l'éditeur est québécois (La Peuplade).  Dans le doute, je mets les deux catégories!

 

Ténèbre de Paul Kawczak, 2020, 203 p.

03 mai 2021

Soulless (Sans âme)

The Parasol Protectorate (Le Protectorat de l'ombrelle), tome 1

J'avais envie d'une petite lecture légère pour contrebalancer les deux poids lourds que je traîne en ce moment (j'ai nommé MM. Ovide et Joyce).  Une histoire avec des vampires et des loups-garous dans une ambiance victorienne et steampunk était donc tout indiquée.

Les premiers chapitres m'ont ravie.  Les dialogues sont légers et humoristiques, les personnages originaux (mention spéciale à Lord Adelkama, un vampire homosexuel aux flamboyants habits de style rococo).  Bon, rendue au milieu, je trouvais que la romance entre l'héroïne et le loup-garou au physique impressionnant (on insiste beaucoup là-dessus) prenait beaucoup de place et retardait l'action, mais ça pouvait encore aller.  

Mais quand l'action reprend enfin, il se passe quelque chose d'absurde qui m'a fait décrocher complètement.  Pour vous donner un point de comparaison sans trop divulgâcher (mais je divulgâche quand même un peu; si vous ne voulez rien savoir, sautez le reste de ce paragraphe): vous savez, dans les vieux films de James Bond, quand le gros méchant, après avoir dévoilé tous ses plans machiavéliques à James, l'abandonne avec ses crocodiles/requins/laser-se-dirigeant-inexorablement-vers-ses-parties-intimes?  «Do you expect me to talk?» «No, Mr Bond, I expect you to die!  Et maintenant vous m'excuserez, j'ai laissé la soupe sur le feu.»  Il s'en va, alors Bond a toute la latitude pour utiliser le gadget pratique remis au début de l'aventure par Q, et il se tire d'affaire les deux doigts dans le nez.  Bien, c'est comme cela, mais en plus, ici, le vilain aurait dû avoir un intérêt particulier à être témoin de ce qui suivra.  De plus, alors qu'ils sont en danger de mort, les deux personnages ne peuvent s'empêcher de se tripoter pendant une heure au lieu de chercher une façon de s'évader.

Ce passage m'a semblé d'une facilité scénaristique désolante, et à partir de là, je n'ai plus éprouvé que la hâte de terminer ce bouquin.  C'est presque en diagonale que j'ai lu les derniers chapitres.  Inutile de vous dire qu'il serait assez surprenant que je continue la série, qui comprend quatre autres tomes en plus de quelques nouvelles.   

En passant, les puristes auront peut-être remarqué que je classe ce roman dans le fantastique, alors qu'on parle généralement plutôt d'urban fantasy.  J'ai personnellement beaucoup de difficulté avec cette expression, qui ne cadre pas avec mes propres définitions de la fantasy et du fantastique (et ne parlons même pas du fait que j'aurais pu ajouter l'étiquette science-fiction, puisque le steampunk en est un sous-genre).  Je trouve de plus en plus difficile de séparer ces genres aux frontières floues et je suis en train de ruminer le projet de tout réunir en une seule grande catégorie: les littératures de l'imaginaire.  Revenez-nous lors d'un prochain épisode pour plus de détails.  


Soulless (The Parasol Protectorate, tome 1) de Gail Carriger, 2009, 271 p.  Titre de la traduction française: Sans âme (Le Protectorat de l'ombrelle, tome 1).