29 août 2012

C'était au temps des mammouths laineux

Dans ces chroniques sur des sujets divers, allant des autobus de Montréal à la Révolution mexicaine, Serge Bouchard se fait tour à tour drôle (lorsqu'il raconte ses démêlés avec Skype pour parler à sa famille en voyage),  émouvant (lorsqu'il parle de la maladie de sa première femme ou du déclin de sa vieille mère), passionnant et instructif (lorsqu'il déboulonne le mythe de Christophe Colomb ou nous fait découvrir des personnages colorés oubliés par l'Histoire avec un grand H), voire quasi  prophétique (lorsque, dans un texte écrit en janvier 2001, il prédit que cette année pourrait nous réserver des surprises après que les catastrophes annoncées pour 2000 ne se soient pas réalisées...). Il y en a pour tous les goûts! Les passages plus philosophiques sont moins ma tasse de thé, mais même là j'y ai trouvé des perles qui me donnent envie d'avoir meilleure mémoire pour les réutiliser à l'occasion, histoire d'épater la galerie!


Extrait:


«Je grogne, je grommelle, comme celui qui s'apprête à écrire un gros livre intitulé La Liste complète de tout ce que je hais.  Un jour je l'écrirai, ce livre, comme j'ai d'ailleurs l'impression de l'écrire un peu tous les jours.  Je hais la face cachée de mon ordinateur. Je connais bien ses dimensions bénéfiques, son côté dactylographique, sa mémoire qui traite le texte, qui est le paradis de l'écrivain qui fait, refait, défait, efface, coupe, refait une autre fois, ampute,  ajoute, déplace, ajuste, révise, revisite, reprend, se bat jusqu'à la folie pour le juste mot. Je hais les gens qui ne savent pas savourer une belle phrase écrite comme on savoure une belle composition musicale.Mais il y a tant de gens qui ne savent pas faire la différence entre un bon et un mauvais hamburger.

Je hais l'intelligence artificielle de mon ordinateur, lorsqu'il prétend bêtement m'en imposer, alors qu'il fait lui-même des liens stupides. Je l'adore quand je le fais plier, et que je l'oblige à faire ce que je veux.  Mon ordinateur s'ennuie, il est au bagne de l'ancienne écriture, il se demande pourquoi mes courriels ont 10 000 caractères, pourquoi il doit enregister des textes originaux alors qu'il pourrait enregistrer des tounes et des jeux .  Pourquoi je n'ai pas d'amis sur Facebook, pourquoi je suis sans twitt, pourquoi je ne fais pas confiance à Wikipédia, pourquoi je ne trouve rien sur Youtube, pourquoi je n'utilise jamais les milliards d'applications qui le rendraient si performant?»

Son ordinateur et le mien devraient fonder un club...

Dans la catégorie Néologismes à faire entrer au Robert au plus sacrant:
Gougouler: faire une recherche sur Google. 

Je ne sais pas vous, mais moi je ne peux qu'aimer d'amour un homme qui finit un paragraphe par une phrase telle que: Mais où donc va cet homme avec un coyote sur le toît de son pick-up?


Le billet de GeishaNellie, celui de Suzanne.  


C'était au temps des mammouths laineux de Serge Bouchard,  2012, 226 p.



2 commentaires:

  1. Ravie que tu aies aimé les mots de Bouchard. Un fabuleux conteur doté d'une très belle plume.
    Pssst, si tu me permets, je te conseillerais le très beau «Elles ont fait l'Amérique» t.1. Un très bel hommage aux femmes québécoises et canadiennes oubliées dans nos livres d'histoire.

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  2. Suzanne: Je note car déjà dans celui-ci les chapitres où il nous parle de ces oubliés de l'Histoire sont passionnants!

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