Après l'assassinat de son ami et collègue journaliste par les tontons-macoutes, le jeune Dany se laisse convaincre par sa mère de quitter Haïti au plus vite. Le roman raconte ses dernières vingt-quatre heures sur son île natale, alors qu'il entreprend une tournée de Port-au-Prince pour faire le plein de souvenirs et dire adieu à ses amis et amours. Des adieux déguisés, silencieux, puisqu'il a promis à sa mère de ne révéler son départ à personne.
J'aime beaucoup quand Laferrière nous décrit la vie quotidienne en Haïti et nous dresse le portrait de ses habitants. C'est donc cet aspect du roman qui m'a le plus touchée. Il y a aussi de nombreuses réflexions très intéressantes sur la dictature, la liberté, la pauvreté, l'exil.
J'ai trouvé par contre qu'il y avait pas mal de répétitions et de longueurs. Par exemple, à chaque fois qu'il est question de son père, l'auteur nous rappelle que celui-ci est parti en exil quand il avait cinq ans, que donc il ne l'a pas vraiment connu, etc. Cela devient lassant!
Il y a aussi un moment vers la fin où le jeune homme entre dans l'hôtel transformé en prison/salle de torture/bordel qui est le centre d'activité des tontons-macoutes. On ne saisit pas du tout ce qu'il va faire là, dans la gueule du loup. J'ai trouvé ce passage complètement absurde, et je soupçonne qu'il a été ajouté à seule fin d'augmenter le suspense du récit. Personnellement je m'en serais passé.
Un extrait:
(Des amis de Dany montent la pièce Antigone de Sophocle, transposée en créole)
«Ils sont enfermés ici depuis l’annonce de l’internement, pour cette angine de poitrine, du comédien qui joue Créon, le roi intraitable jusqu’à l’aveuglement. Ils veulent qu’Antigone soit malgré tout un succès. C’est important pour le créole et la culture haïtienne. Ils n’entendent pas lâcher la main que nous tend, par-delà les siècles, le vieux Sophocle. Je ne comprends pas comment on peut encore parler d’authenticité quand c’est un vieil auteur qui, par l’entremise de Morisseau-Leroy, nous permet de comprendre les rapports complexes du pouvoir dans la paysannerie haïtienne. Sophocle était peut-être un paysan haïtien. En tout cas, il a l’air d’en savoir, à propos de ma culture, beaucoup plus que moi. Peut-être qu’il n’y a pas une si grande différence entre ma culture et la sienne. Chaque fois que j’essaie de poser le problème sous cet angle, on m’accuse d’être un vendu qui refuse d’accepter la spécificité authentique de la culture haïtienne. Sommes-nous si différents des autres? Généralement, après une telle question, on me tourne le dos et je me retrouve dans ma situation préférée: seul.»
Le billet de Sylire, qui n'a pas semblé agacée par les défauts que j'ai relevés.
Le Cri des oiseaux fous de Dany Laferrière, 2000, 318 p.
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