30 mars 2025

The Book of Skulls (Le Livre des crânes)

De Robert Silverberg, écrivain faisant partie des «Grands» de la science-fiction, j'ai lu il y a quelques années l'uchronie Roma Eterna.  J'en garde un assez bon souvenir, même si j'avais noté quelques défauts.  Malheureusement, pour The Book of Skulls, mon avis est beaucoup plus mitigé.

En plus de sa classification en SF (les personnages sont en quête de l'immortalité), j'ai vu l'étiquette «Horreur» accolée à ce roman.  Je m'attendais donc à ce qu'il y ait un côté Fantastique assez prononcé. Or, ce n'est le cas.  On est plutôt dans un genre de voyage initiatique.  Mais si le seul problème était cette idée préconçue, j'aurais très bien pu m'ajuster et finalement bien apprécier l’œuvre. 

Tout d'abord, quelques points positifs.  Je suis généralement bon public pour les romans choraux (où l'on alterne entre plusieurs narrateurs).  J'ai donc bien aimé la construction de celui-ci, qui permet d'avoir différents points de vue sur les événements.  J'ai aussi aimé le côté «road trip» de la première moitié, alors que j'ai constaté dans différents commentaires que plusieurs lecteurs avaient trouvé cette partie trop longue.  Surtout, j'ai apprécié le décor de la deuxième partie, cet étrange monastère situé en plein cœur d'un désert en Arizona, ainsi que toute la légende entourant ce lieu et l'étrange secte y résidant.

Après les fleurs, voici le pot.  Les personnages sont très antipathiques.  Ils sont censés être amis mais n'ont que des pensées désobligeantes (antisémites, homophobes, snobs, etc) les uns envers les autres.  Comme on entre dans la tête de chacun d'eux à tour de rôle, impossible de leur donner le bénéfice du doute!  Au bout d'un moment, j'en aurais pris un pour frapper les autres, je vous jure!  Il devient donc de plus en plus difficile de s'intéresser à leur sort.

Deuxième défaut, certains aspects ont très mal vieilli, notamment le rôle des femmes.  D'habitude j'arrive sans peine à replacer l’œuvre dans son contexte et à l'apprécier quand même.  Je ne suis pas du genre à reprocher à Bilbo le Hobbit de manquer de personnages féminins!  (D'ailleurs, le personnage de la princesse elfe qui apparaît comme un cheveu sur la soupe dans l'adaptation cinématographique m'a fait lever les yeux au ciel, mais c'est une autre histoire!)  Ici le problème est à une tout autre échelle.  Les femmes ne servent que de réceptacle à sperme!  Dans la partie qui se déroule dans le monastère, je me suis carrément demandé si en fait les étranges prêtresses n'étaient pas des androïdes, vu leur impassibilité et leur mutisme.

Grâce aux quelques qualités énoncées ci-dessus, ce livre échappera peut-être au Prix Citron de mon bilan annuel, mais ce sera de justesse! 


The Book of Skulls de Robert Silverberg, 1972, 224 p.  Titre de la traduction française: Le Livre des crânes.

27 mars 2025

La Nostalgie heureuse

Dans ce roman autobiographique, Amélie Nothomb nous raconte un voyage au Japon effectué en 2012 en compagnie d'une équipe de tournage filmant un documentaire sur elle. 

Malgré ce que laisse croire le titre, le ton adopté par l'auteure est généralement mélancolique; cette «nostalgie heureuse» est plutôt un état d'âme typiquement japonais auquel aspire Nothomb sans y parvenir tout à fait.

Ce que je n'avais pas réalisé en commençant cette lecture, c'est que ce voyage se déroule un an après le terrible tremblement de terre/tsunami/accident nucléaire de 2011.  Amélie retrouve donc un Japon qu'elle ne reconnaît pas: sa maison d'enfance a disparu, de même que le grand parc où elle allait se promener avec son fiancé. Je crois que si j'avais su cela a priori, j'aurais été dans un état d'esprit plus favorable.  Là, je m'attendais à beaucoup plus de franche rigolade, comme on en trouve dans Ni d'Ève ni d'Adam, par exemple. 

Heureusement, il y a quand même plusieurs pointes d'humour, arrivant parfois en plein milieu d'un épisode émouvant, comme lorsqu'elle éclate en sanglots en étreignant sa vieille nourrice japonaise pour s'apercevoir ensuite qu'un gros motton de morve a coulé dans la chevelure de la digne dame!  Les conversations avec son ex sont assez amusantes également.  J'en aurais pris plus, de ces moments-là!

Bref, j'ai quand même apprécié ce roman mais ce n'est pas mon préféré de l'auteure.  Il m'a toutefois donné envie de lire Métaphysique des tubes puisque, si j'ai bien compris, c'est là qu'on fait la connaissance de cette fameuse nourrice!

 

La Nostalgie heureuse d'Amélie Nothomb, 2013, 152 p.

17 mars 2025

La Femme du deuxième étage

Ce roman de l'écrivain croate Jurica Pavičić est classé un peu partout comme un roman policier...  C'est un brin trompeur, puisque, s'il y a bien un meurtre, la partie enquête policière et procès est très courte.  Je trouve qu'on est plus dans un mélange de drame psychologique et de thriller domestique (i.e. un de ces thrillers qui se déroulent au sein d'une famille).  

En effet, on alterne entre des chapitres qui se déroulent en prison, où le personnage principal est incarcéré, et des chapitres prenant place une dizaine d'années plus tôt, alors qu'un couple de jeunes mariés vient s'installer au deuxième étage de la maison familiale du mari.  C'est surtout cette partie-là qui fait penser à un thriller, puisqu'on observe les engrenages qui se mettent en place pour mener au drame, inéluctable.  On sent la tension qui monte, qui monte, c'est très habilement construit. 

J'ai aussi bien apprécié le fait que l'histoire se déroule en Croatie, c'est très original et donne lieu à d'intéressantes descriptions des villes et villages, de l'alimentation, etc.  Apparemment, ils mangent beaucoup de bettes à carde (que les Français appellent «blettes)!

En terminant ma lecture, j'étais un peu déçue de la fin, qui me semblait tomber un peu à plat...  En se disant que ce roman est plutôt un drame psychologique, cette conclusion douce-amère devient beaucoup plus satisfaisante.


La Femme du deuxième étage de Jurica Pavičić, traduit du croate en 2022, 223 pages.  Titre de la version originale: Žena s drugog kata (2015)

14 mars 2025

Wilderness

Dans le contexte de nos démêlés actuels avec notre voisin du sud et son Intimidateur en chef, il est de bon ton de boycotter ou de déprécier tout ce qui vient des États-Unis...  J'aimerais donc vous dire que j'ai détesté ce roman très américain dans son essence même.  Malheureusement c'est tout le contraire: je l’ai adoré, au point qu'il pourrait bien se retrouver dans mon Top 3 lors du prochain bilan annuel!

Il s'agit d'un roman historique qui se déroule en alternance durant deux périodes.  On suit les terribles épreuves du personnage principal durant la Guerre de Sécession, en particulier pendant la bataille de la Wilderness, une forêt de la Virginie.  On retrouve ensuite l'ancien soldat trente ans plus tard, dans une cabane où il vit en ermite, au bord de l'océan Pacifique, avec son chien  pour seule compagnie. 

La plume de Lance Weller, qui en était à son premier roman, est assez exigeante, surtout en version originale, notamment à cause d'un vocabulaire assez recherché.  Mais l'effort demandé en vaut la peine!  J'ai particulièrement aimé les descriptions de la nature sauvage (le titre Wilderness a donc un double sens, vous l'aurez compris) de l'État de Washington, ainsi que le développement des personnages, tant le principal que les secondaires.  Ceux-ci sont loin d'être unidimensionnels ou caricaturaux.  Le vieux vétéran m'a d'ailleurs un peu rappelé le personnage de The Old Man and the Sea (Le Vieil Homme et la mer) d'Hemingway par sa dignité et sa ténacité.  Le mélange de roman historique et de nature writing, quant à lui, m'a fait penser à Legends of the Fall (Légendes d'automne) de Jim Harrison.  L'adjectif qui me vient en tête pour décrire le ton adopté par l'auteur est «solennel».

Un roman magnifique sur la guerre, la violence des hommes mais aussi l'entraide, la loyauté et, ultimement, la rédemption.  En bonus, il y a un brave pitou nommé Buster.


Wilderness de Lance Weller, 2012, 304 p.  Titre de la traduction française: Wilderness.

04 mars 2025

Cataonie

Encore une fois, François Blais nous a pondu une drôle de bibitte!

Après avoir pris ce livre au prêt numérique de la bibliothèque municipale, j'ai été un peu déçue de constater qu'il s'agit d'un recueil de nouvelles.  J'hésite toujours devant ce format qui parfois me laisse sur ma faim. Heureusement, ce sont des histoires dont les personnages principaux sont récurrents, notamment le narrateur, donc ça se lit comme un roman.

Parlant du narrateur, celui-ci est une vraie tête à claques!  Imbu de lui-même jusqu'à l'absurde, il m'a bien fait rigoler.  Et il n'y a pas que lui d'absurde...  Les histoires se déroulent à Shawinigan, mais les personnages parlent comme des gens de la haute bourgeoisie, se vouvoyant entre amis et amants et utilisant l'imparfait du subjonctif pour dire les pires énormités!

Le thème commun de ces nouvelles est l'obsession et, encore là, Blais pousse cela jusqu'à l'absurde.  Ma nouvelle préférée est celle où le narrateur tente de trouver la chute d'une blague mettant en scène un petit cochon  qui survit à la chaise électrique (d'où l'illustration de la couverture, signée Iris, pour ceux qui connaissent cette dessinatrice), blague qu'il a lue dans une revue dont une page est déchirée.  J'y ai notamment apprécié quelques allusions à Camus («quelle peste ce Camus!») alors que pourtant l'histoire n'a rien à voir avec le célèbre écrivain!

Et le titre?  J'ai cherché: la Cataonie est une région de l'ancienne Asie mineure, ce qui n'a absolument aucun lien avec l'intrigue.  On dirait que Blais a tout simplement pris un mot au hasard dans le Robert des noms propres, ce qui est tout à fait son genre!  Si vous avez une autre théorie, je suis preneuse...


Cataonie de François Blais, 2015, 180 p.

02 mars 2025

L'Énigme du retour

La démarche indolente
d'une vache
pendant sa promenade du soir.
La nuit devient
chagallienne.

Je retrouve mon cher Dany Laferrière avec ce récit de son retour à Haïti après la mort de son père, exilé lui aussi et qu'il a peu connu.

Comme toujours chez cet écrivain, on est devant une construction désordonnée qui peut désarçonner quand on ne s'y attend pas.  Cette impression est exacerbée ici par la forme du texte qui alterne sans prévenir entre la poésie et la prose.  La réflexion s'imbrique dans l'anecdote, les souvenirs dans le quotidien. L'humour, la tendresse  succèdent à la tristesse, au drame.

J'ai apprécié les clins d’œil à ses œuvres précédentes: des oiseaux fous, des après-midi sans fin, des hommes sans chapeau...  Il parle également de différents artistes et écrivains haïtiens, dont notamment Frankétienne, dont on vient malheureusement d'apprendre le décès ces jours-ci. 

Un très beau roman sur le thème de l'exil et du retour.

 

L'Énigme du retour de Dany Laferrière, 2009, 296 p.

28 février 2025

L'éternité n'est pas de trop

Quel beau roman historique!  

J'ai lu il y a fort longtemps un autre roman de François Cheng, Le Dit de Tianyi.  J'avais trouvé sa plume absolument magnifique, mais c'était un roman qui demandait un certain effort à cause des nombreuses réflexions sur l'art, l'amour, la vie, et l'écriture, à cause aussi de certains passages très durs.  

Des sujets philosophiques (la vie, la mort, l'amour, la religion) sont également abordés ici, mais il me semble que cela est fait d'une façon plus légère.  Le tout reste empreint d'une certaine mélancolie, mais il y a des moments très lumineux, notamment de fort belles descriptions de la nature chinoise.  

On est transporté au XVIIe siècle en Chine, où l'on suit l'histoire d'amour tout en pudeur de deux personnages attachants, le médecin et devin Dao-Sheng et la femme qu'il avait croisée trente ans plus tôt et jamais oubliée.

Une œuvre pleine de poésie, très émouvante.    


L'éternité n'est pas de trop de François Cheng, 2002, 288 p.

27 février 2025

Relic

Avis à tous les scientifiques: lorsque vous êtes en expédition dans un pays exotique, pouvez-vous arrêter d’envoyer par ______(insérez au choix: la poste, bateau, avion, caravane de chameaux) votre ______ (statue, bijou, ossement, momie, météorite, échantillon biologique, grimoire),à l’intention d’un de vos collègues dans _______ (une université, un laboratoire, un musée, une bibliothèque)?  Ça tourne toujours mal, vous n’avez pas remarqué?

Vous l'aurez deviné, j’ai vraiment eu une impression de déjà-vu en commençant ce premier tome de la série mettant en vedette l’agent du FBI Aloysius Pendergast, du duo d'écrivains américains Douglas Preston et Lincoln Child.  Il me semble que de nombreux films, romans ou épisodes de série télé débutent de cette façon.  Bon, cette impression est en bonne partie due au fait qu’un film a été tiré de ce roman en 1997, que j’ai vu ce film, mais que je n'avais pas fait le rapprochement car le scénario a été quelque peu modifié, notamment les noms des personnages.  Ce n’est qu’après la lecture, en faisant quelques recherches, que le lien s'est fait dans mon coco. 

Heureusement cela n’a pas nui au plaisir que j’ai ressenti en lisant ce roman.  En effet, dès que l’action se transporte à New York, cela devient palpitant.  J’ai particulièrement apprécié l’équilibre entre le suspense, les détails scientifiques, la touche de fantastique/horreur et la description des coulisses du Musée d’histoire naturelle, que j'ai d'ailleurs visité quand j'étais ado lors d'un voyage scolaire.  Certains personnages sont un peu caricaturaux mais d’autres sont plus originaux, notamment Pendergast, que j’ai très hâte de retrouver dans les prochains tomes!

Avis aux éditeurs : un plan du musée aurait été le bienvenu, car on a parfois de la difficulté à visualiser les lieux.  Ça a l’air d’un sacré labyrinthe! 

 

Relic de Douglas Preston et Lincoln Child, 1995, 480 p.  Traduit sous deux titres selon les éditions: Superstition ou Relic.

16 février 2025

Proust au gym

Si jamais les créateurs d'un éventuel dictionnaire des réseaux sociaux cherchent un exemple pour la définition de l'expression OLNI (Objet Littéraire Non Identifié), ce petit bouquin pourrait bien faire l'affaire...

On le voit classé en Poésie, mais personnellement je le décrirais comme un roman d'autofiction en vers libres.  Je soupçonne en fait que la forme adoptée par Anthony Lacroix manifeste une volonté d'écrire en se foutant de la ponctuation plutôt qu'un désir de donner une dimension poétique à son texte.  Et je ne dis pas cela d'une façon péjorative, je trouve même que cela fonctionne plutôt bien.  

De quoi ça cause?  Je vous le donne en mille:  de Proust et de gymnastique.  Plus particulièrement, du projet de l'auteur d'écouter en version audio toute La Recherche en faisant des séances de musculation dans l'espoir d'obtenir un corps de rêve (tout en tentant d'achever son mémoire de maîtrise, accessoirement).

Qui est le public cible?  Utilisons la théorie des ensembles:  

Lecteurs de Proust ∪ Amateurs de musculation = Public cible

Lecteurs de Proust Amateurs de musculation = Futurs adorateurs d'Anthony Lacroix

Traduction pour ceux qui ont effacé de leur cerveau les cours de math du niveau primaire dès qu'ils ont atteint le secondaire 1: vous aimerez ce roman si vous êtes soit un lecteur de Proust, soit un culturiste; si vous êtes les deux, vous allez l'adorer.  Enfin, c'est ma théorie, ce n'est pas encore prouvé.  Personnellement, je fais seulement partie du premier ensemble, donc j'ai trouvé ce petit bouquin amusant et original.

En terminant, un court extrait pour vous donner une petite idée du genre:

  Marcel et moi avons les mêmes suffocations


            selon mes signes et symptômes
            j’ai soit
            des spasmes nerveux
            un commencement de tuberculose
            de l’asthme
            une bronchite
            une dyspnée toxi-alimentaire avec insuffisance rénale


            je devrais suivre le traitement prescrit
            par le docteur Cottard


            rester au lit pendant plusieurs jours et boire du lait


            ça sauvera sûrement Marcel d’une mort certaine
            mais je ne sais pas si le même remède fonctionnerait
            pour moi
            

  il y a trop de différences entre
  le personnage principal de Proust et moi
  et la plus importante
  c’est qu’il ne fait pas d’embonpoint


Proust au gym d'Anthony Lacroix, 2024, 108 p.

14 février 2025

Le Garçon

Dans l'ensemble, voici un excellent roman historique et roman d'apprentissage.  La plume de Marcus Malte, que je ne connaissais pas, est magnifique et très originale.  J'ai beaucoup aimé l'histoire de ce jeune homme muet dont les horizons s'élargissent progressivement, lui qui au départ ne connaissait que la forêt provençale où il a grandi à l'état presque sauvage.  Les chapitres qui se déroulent durant la Première Guerre mondiale sont particulièrement frappants.

Deux petits bémols ont toutefois empêché ce roman d'être un coup de cœur.  Tout d'abord, j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs, particulièrement dans le passage où le garçon découvre la sexualité.  Son amoureuse et lui aiment essayer de nouvelles techniques et positions sexuelles, ça va, on a compris!  Quelques pages là-dessus, ça donne du piquant; plusieurs chapitres, ça devient un brin répétitif!  

Deuxièmement, il me semble que le fait que le personnage n'ait pas de prénom (son amoureuse lui en donne un vers le milieu du récit, mais il continue tout de même d'être désigné par «le garçon» jusqu'à la fin) crée une distance entre lui et le lecteur, ce qui m'a empêchée de m'attacher vraiment à lui.  Je suppose que c'était voulu par l'auteur, mais pourquoi?

 Je vais tout de même garder un très bon souvenir de ce roman, et j'en lirai certainement d'autres de cet écrivain.  Je vois que Garden of Love a remporté de nombreux prix, ce sera peut-être celui-là.

 

Le Garçon de Marcus Malte, 2016, 535 p.

04 février 2025

Ilium

 Duologie Ilium/Olympos, tome 1 

Aarrggh!  Je savais que ce roman de Dan Simmons faisait partie d'une duologie, mais pour une raison que j'ignore, j'étais persuadée que ce premier tome pouvait se lire de façon indépendante...  Pas du tout!  Au contraire, les derniers chapitres ne sont qu'une mise en place pour ce qui va se passer dans le tome suivant. 

La bonne nouvelle, c'est que j'ai adoré ce premier tome, donc ce ne sera pas une corvée de lire la suite pour avoir le fin mot de l'histoire.  Cela attendra toutefois que je fasse un petit tour à la bibliothèque municipale, à la succursale où ce tome 2 est disponible, qui n'est pas celle que je fréquente le plus.  

Il faudra aussi m'assurer que mon cerveau aura une bonne disponibilité à ce moment-là, car si le tome 1 est garant de la suite, ce ne sera pas une petite lecture légère.

En effet, dans ce premier tome, on suit trois intrigues entrecroisées et assez complexes, avec beaucoup de personnages et de détails (scientifiques et autres).  Une des trames raconte les péripéties d'un historien du futur envoyé par les dieux grecs observer la guerre de Troie afin de confirmer l'exactitude de l'Iliade d'Homère (mais certains dieux ont d'autres motivations, ce qui complique la mission).  

Dans une deuxième trame, on suit les aventures d'un petit groupe d'humains dans un futur très lointain où la vie se résume à se téléporter d'un endroit à l'autre du globe pour assister à des fêtes, où tout le travail est accompli par des robots et où l'on est protégé par d'étranges créatures, les Voynicks.  Au départ, cela semble presque idyllique, mais plus on avance, plus on s'aperçoit qu'il y a quelque chose qui cloche, et pas qu'un peu... 

La troisième trame est nettement ma préférée.  On y découvre quatre robots originaires des lunes de Jupiter, envoyés vers la planète Mars pour enquêter sur la quantité inquiétante d'événements quantiques qui s'y produisent et qui mettent en danger le système solaire.  Il se développe une amitié touchante entre deux des robots, l'un grand amateur des sonnets de Shakespeare, l'autre de l’œuvre de Proust, ce qui donne lieu à des dialogues hilarants.

En plus des allusions aux deux écrivains nommés ci-dessus, il y a énormément de références littéraires: Homère et Virgile, bien sûr, mais aussi plusieurs autres que je vous laisse découvrir.  J'ai aussi adoré les petites pointes d'humour, qui arrivent souvent inopinément, parfois à des moments de grande tension!

Petit avertissement, c'est vraiment un énorme pavé.  Il ne fait que 576 pages, me direz-vous, mais c'est trompeur: c'est une édition en très grand format avec une petite police de caractères et une texte dense.  Cela m'a pris presque quatre semaines pour en venir à bout, mais je ressors enchantée de cette lecture!

Un excellent début d'année livresque (j'ai aussi lu un court texte de Stefan Zweig, Cicéron, dont je ne vous ai pas parlé car il ne fait qu'une vingtaine de pages, mais que j'ai beaucoup aimé).     


Ilium de Dan Simmons, 2003, 576 p.  Titre de la traduction française: Ilium.

07 janvier 2025

Villette

Pour la petite histoire, ce roman de Charlotte Brontë végète dans ma bibliothèque depuis la fin des années 80!  J'avais tenté de le lire durant un stage d'apprentissage d'anglais langue seconde de six semaines en Nouvelle-Écosse.  Je me vois encore sur la plage en train d'essayer de déchiffrer ce charabia!  À l'époque, j'en étais à mes premières armes en lecture en version originale anglaise, n'ayant lu que quelques Agatha Christie, c'est vous dire comme la marche était haute!  J'ai vite abandonné, et comme c'était le seul bouquin que j'avais apporté, je suis allée fouiller dans la petite bibliothèque de la résidence étudiante, y choisissant un peu au pif The Importance of Being Earnest d'Oscar Wilde.  Sans doute parce qu'il s'agit d'une pièce de théâtre, sans longues descriptions, donc, cela s'était beaucoup mieux passé (en plus c'est très drôle, je recommande!).

J'ai lu Jane Eyre il y a quelques années (en 2007 en fait, comme le temps passe!) et, sûrement parce que j'ai beaucoup aimé l'histoire, j'ai totalement occulté de ma mémoire le fait que la plume de Brontë est difficile à lire, tant à cause des tournures de phrase que du vocabulaire.  Jane Austen à côté de ça, c'est comme lire Harry Potter

Malheureusement, ici je n'avais pas une intrigue passionnante pour soutenir mon intérêt.  En fait, il y a un gros problème de rythme dans ce roman.  L'histoire se développe très lentement pendant les premiers neuf dixièmes, il y a même quelques digressions un peu prêchi-prêcha, et soudainement, dans les cinquante dernières pages, les événements se bousculent et tout est réglé en deux coups de cuillère à pot.

Il y a pourtant des trucs très bien dans ce roman, de fort belles descriptions, des personnages secondaires intéressants et surtout une héroïne forte, rappelant assez Jane Eyre, d'ailleurs: indépendante, elle prend son destin en main, et si la société l'oblige à se soumettre à l'autorité, elle n'en pense pas moins dans son for intérieur.

Comme j'avais été encore plus déçue de la lecture de The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë (mon prix Citron 2023!), je ne risque pas de tâter de nouveau d'une des trois sœurs dans un avenir rapproché.  Surtout qu'en ce qui concerne la littérature anglaise du XIXe siècle, j'ai dans ma mire Dickens et George Eliot pour 2025...


Villette de Charlotte Brontë, 1853, 524 p.  Titre de la traduction française: Villette.