20 mars 2024

La Collision des récits

J'ai fait la connaissance de Philippe de Grosbois dans l'excellent balado La Balado de Fred Savard (oui, Fred a décidé que le mot balado était féminin!) dont il est un collaborateur régulier.  Cela m'a donné envie de lire un de ses essais, voilà la chose faite!

Cet essai sur le journalisme et la désinformation est très intéressant car il déboulonne de nombreux mythes et idées reçues.  Par exemple, la désinformation existe depuis longtemps, elle n'est pas causée par les médias sociaux; ceux-ci n'ont fait qu'amplifier le problème.  Également, l'objectivité journalistique n'existe pas.  Même lorsqu'il présente des faits vérifiés, le journaliste fait des choix en ce qui concerne la façon de présenter la nouvelle, à qui il donne la parole (ou pas), etc., et ces choix sont influencés par différents facteurs reliés à sa classe sociale, sa race, son genre, le média pour lequel il travaille, etc.  D'ailleurs, l'auteur lui-même ne se targue pas de neutralité, affichant clairement ses convictions de gauche.

Ce que j'ai aimé surtout, c'est combien cet essai a eu des liens avec l'actualité pendant que je le lisais.  Ainsi, le ministre Pierre Fitzgibbons a traité des journalistes de La Presse et du Devoir de «militants» (sous-entendu: non objectifs) parce qu'ils ont relevé la contradiction de ses propos avec ceux du ministre de l'Environnement concernant le projet d'usine de batteries de Northvolt.  Or, Grosbois parle justement de cette tendance à qualifier de militants les journalistes qui remettent en question les messages des gouvernements ou des grandes compagnie, alors que ceux qui les relaient servilement sont considérés objectifs! 

Il y a eu aussi un article d'Isabelle Hachey dans La Presse (27 janvier) où elle critique le dernier livre de Mathieu Bock-Côté, Le Totalitarisme sans le goulag, publié l'automne dernier.  Mme Hachey a vérifié plusieurs affirmations faites par MBC et a constaté que plusieurs étaient soit fausses, soit grandement exagérées ou prises complètement hors contexte.  Philippe de Grosbois déplore justement qu'on laisse le sociologue chéri de la droite dire les pires énormités sans les contester...  Voilà, Philippe, ton message a été entendu!

Seul petit bémol, j'ai trouvé qu'il y avait quelques répétitions d'un chapitre à l'autre.  C'est sans doute pourquoi j'ai étiré cette lecture sur plusieurs mois!


La Collision des récits de Philippe de Grosbois, 2022, 200 p.

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