27 juillet 2018

Les Racines du ciel

Ouf, quel roman!  On est dans les années cinquante en Afrique équatoriale française.  Un groupe hétéroclite de personnages aux motivations diverses (une ancienne stripteaseuse allemande, un photographe vedette, un ancien militaire américain démobilisé pour traîtrise, etc) tente de protéger les éléphants menacés par les braconniers, les chasseurs d'ivoire et les amateurs de safari.  À leur tête, un ancien résistant français ayant connu les camps de concentration. Ce n'est pas seulement l'amour de ces bêtes magnifiques et «encombrantes» qui le motive; il en fait une question de dignité humaine. Mais les autorités, tout comme les rebelles africains, ont peine à croire à la pureté de ses motivations, et il s'ensuit tout un magouillage politique aux ramifications internationales.

J'ai eu un peu de difficulté au départ car il y a beaucoup de personnages, d'allers-retours dans le temps et de brusques changements de narrateurs.  Ça demande un certain effort, mais celui-ci en vaut largement la peine!  Comme toujours, la prose de Romain Gary est d'une grande beauté, l'humour est toujours présent malgré le sérieux du sujet, plus que jamais d'actualité.  Le genre de livre qui donne envie d'être un meilleur humain.


Les Racines du ciel de Romain Gary, 1956, 495 p.

04 juillet 2018

The Golden Notebook (Le Carnet d'or)

Hé bien! Pour ce qui est de participer au Mois anglais, c'est raté pour cette année, j'ai loupé l'échéance!  Je ne pensais pas qu'il me faudrait tout un mois pour lire ce roman.  D’ailleurs quand je l'ai choisi dans ma PAL, début juin, je n'avais pas réalisé qu'il s'agissait d'une brique déguisée en roman de longueur moyenne.  Entre la police de caractères minuscule, les marges très étroites, les longs paragraphes et la quasi-absence de dialogues, j'ai été eue!  C'est peut-être pourquoi j'ai eu un peu de difficulté à accrocher au départ.  J'ai lu plusieurs pavés depuis le début de l'année (allo M. Cervantès!), ça ne me tentait pas nécessairement d'embarquer dans un autre tout de suite.  Et comme c'est une intrigue très dense, avec des retours en arrière et des mises en abyme, j'étais un peu découragée car j'avais l'impression d'avancer à pas de tortue. J'ai même failli abandonner, et puis je me suis dit non, c'est très intéressant alors ça prendra le temps que ça prendra!

La construction du roman est très originale.  Le corps principal raconte l'histoire d'une écrivaine à Londres en 1957, entourée de sa fille, de sa meilleure amie, du fils de celle-ci et de quelques autres.  Intercalés dans cette partie principale, on retrouve des extraits des cahiers de différentes couleurs où elle écrit sous différents thèmes: le noir est pour ses souvenirs d'Afrique où elle a vécu quelques années, ainsi que pour tout ce qui touche au roman, devenu best-seller, qu'elle a écrit en se basant sur ces souvenirs; le rouge parle de politique, principalement de ses expériences en tant que membre du Parti communiste anglais à cette époque où on commence à découvrir les horreurs staliniennes; le jaune est une tentative de roman mettant en scène son alter ego écrivaine, où est surtout abordée la question des relations hommes/femmes, ainsi que d'autres idées pour des romans ou des nouvelles; et le bleu est un genre de journal.  Et le doré du titre, alors? Il n'arrive qu'à la fin!

À l'époque, les critiques du roman ont surtout parlé du thème de la condition féminine, et bien sûr il en est beaucoup question, mais il y a tellement plus que cela!  Santé mentale, maternité, géopolitique (surtout en ce qui a trait à la Russie et à l'Afrique, deux régions où rien n'est réglé encore aujourd'hui!), écriture et surtout le lien ténu entre la fiction et la réalité.  Et si j'y ai trouvé quelques longueurs dans la deuxième moitié (on a envie de gifler le personnage pour qu'elle sorte de son cercle vicieux, c'est infernal), la fin est excellente et l'ensemble se mériterait une relecture tant il y a d'intelligence et de subtilité (d'ailleurs je n'ai pas compris les astérisques à la fin d'un des cahiers, si quelqu'un peut m'expliquer je suis preneuse!)

Et comme ma partie préférée est celle qui se déroule en Afrique, je me lance maintenant dans Les Racines du ciel, de Romain Gary!


The Golden Notebook de Doris Lessing, 1962, 576 p.  Titre de la traduction française: Le Carnet d'or.