29 mars 2009

The Prize Winner of Defiance, Ohio

Le sous-titre annonce déjà le sujet de ce délicieux livre: How my mother raised 10 kids on 25 words or less. Il s'agit de l'histoire vécue d'une famille nombreuse d'une petite ville ouvrière de l'Ohio dont la mère, pour suppléer aux revenus insuffisants fournis par le père alcoolique, utilise son amour des mots, son humour et son gros bon sens pour participer aux nombreux concours offerts par les compagnies lors de campagnes publicitaires. Il semble en effet qu'il y ait eu une mode dans les années 1950-60 pour ces concours où il fallait dire (en 25 mots ou moins, selon la formule consacrée) pourquoi on aimait telle marque de savon ou de bière, ou encore compléter la dernière ligne d'un «jingle» (slogan publicitaire), et où on pouvait gagner d'assez gros prix, allant d'un grille-pain à une voiture ou un voyage.

Ç'aurait pu être ennuyant ou déprimant, c'est au contraire très drôle, léger et émouvant tant on sent d'amour entre cette maman et ses dix enfants. On se retrouve transporté en un temps pourtant pas si lointain où on ne barrait jamais les portes de la maison et où on connaissait le facteur et le laitier par leur prénom. Une belle leçon d'optimisme et de débrouillardise, et un très beau moment de lecture.

(Il semble qu'un film en ait été tiré, quelqu'un l'a vu? Je n'en ai jamais entendu parler! Comme on peut le voir sur la couverture du bouquin, Julianne Moore en est la vedette.)


Un petit extrait:


"Afternoon, Evelyn," Vernon said as he rifled through his leather mailbag.
When he looked up from his letters, his gaze froze. "Uh... Evelyn?"
"Uh-huh?" Mom said.
"You probably already know this," he said, his feet shuffling shyly, "but
you've got a bird on your head."
At this, Mom raised her hands slowly to the sides of her head and felt the
unmistakable feathered body resting on top. "Oh sure," she laughed, "I guess I
forgot for a minute."
Vernon smiled, but never stopped starring at Mom's hairline.
"He fell out of a tree a while back," Mom said, trying to explain away her
embarrassment. "He's been with us ever since."
"I knew there must be a reason," said Vernon, handing Mom the day's mail,
as he backed slowly down the front steps. "It's just not often that I see a bird
riding on someone's head."
Back in the house, Barney still nesting high in the strands of her hair,
Mom chuckled as she looked in the mirror: "I can't believe I walked out there
with you on my head, Barney," she said. "By tomorrow, everybody in town will be
calling me the Bird Lady of Defiance."


Lu dans le cadre du défi Lire autour du monde d'Enna.


The Prizewinner of Defiance, Ohio de Terry Ryan, publié en 2001 chez Touchstone, et en 2005 chez Pocket Star books pour cette édition de poche qui compte 367 pages.

23 mars 2009

Sonate en fou mineur

Vous ne m'en voudrez pas? Ce n'est vraiment pas professionnel. Ce qui tombe bien puisque je n'ai jamais prétendu l'être.

Je me sers aujourd'hui de cette modeste tribune de façon éhontée pour faire la promotion du premier livre d'un ami à moi. Donc vous prendrez bien sûr ce billet avec le grain de sel de circonstance. Je ne suis absolument pas objective. Mais promis-juré, si c'était moche j'aurais passé le tout sous silence. Ouf, quel soulagement, je vais pouvoir lui dire sans mentir que j'ai vraiment aimé son bouquin!

C'est l'histoire d'un compositeur de musique contemporaine en mal d'inspiration qui travaille comme gardien de nuit dans un asile de fou, section des criminels dangereux. Il s'y lie d'amitié avec Tristan, un jeune patient ayant tué sa famille entière à coups de hache pendant un badtrip de LSD sept ans auparavant. De nombreuses péripéties s'ensuivront.

Je sais que ça a l'air improbable, mais ce Tristan devient peu à peu le personnage le plus sympathique parmi tous les autres personnages secondaires hauts en couleur qui peuplent ce roman. On s'intéresse à lui, on espère qu'il arrivera contre toute probabilité à prouver qu'il est maintenant capable de regagner la société, et que son psychiatre arrêtera de le bourrer de pilules aux effets secondaires peu agréables!

Le tout est raconté avec beaucoup d'humour, et un heureux mélange de fantaisie et de noirceur.

Un passage qui m'a bien fait rigoler et m'a rappelé ce billet et la passionnante discussion qui s'en est suivie dans les commentaires:
[Le compositeur et le fou discutent du manuscrit d'une autre
protagoniste]
-- (...) Le style bizarre m'a fait réaliser comme ça doit être difficile de
bien écrire en restant québécois... Je me demande comment les autres s'en
sortent.
-- Agathe aurait intérêt à lâcher le passé simple. C'est un peu trop
compliqué pour elle.
--Tu as raison, c'est vraiment une drôle d'idée d'écrire un roman
contemporain au passé simple. Ça fait artificiel.
Elle se pogna le cul
toute la matinée
.

Le clin d'oeil, c'est que Sonate en fou mineur est écrit au passé simple!

Je n'en dis pas plus, espérant tout simplement avoir donné le goût à quelqu'un de découvrir ce nouvel auteur, dont à mon avis ce ne sera pas la dernière oeuvre!

Addendum: Le nouveau blogue de l'auteur!
Addendum 2: Le nouveau site du livre, et un billet intéressant chez La Recrue!

Sonate en fou mineur d'Éloi Paré, publié chez Guy Saint-Jean en 2009, 339 p.

20 mars 2009

La Servante écarlate


Ayant déjà vu quelques extraits du film qui a été tiré de ce livre (film mettant en vedette la regrettée Natasha Richardson, qui vient de mourir suite à un accident de ski à quelques heures de route d'ici, coïncidence bizarre!), je me souvenais de ce qu'est une «servante écarlate», alors qu'on est supposé ne l'apprendre que peu à peu, car Margaret Atwood suggère ici plus qu'elle ne décrit en détail, grâce à un style d'écriture plutôt dépouillé. À cause de cela, j'ai d'abord eu un peu de difficulté à accrocher à ce roman d'anticipation. Je trouvais également un peu tirée par les cheveux l'idée que le gouvernement américain ait été renversé par un genre de secte d'extrême-droite (ce n'est pas un gros spoiler, on apprend cela dès les premiers chapitres).

Après une cinquantaine de pages, et ayant décidé d'accepter cette prémisse (après tout, pourquoi pas? Des choses encore plus improbables se sont produites pour vrai, et se produisent encore!), j'ai commencé à être de plus en plus intriguée, puis fascinée. On s'identifie à la narratrice, on s'inquiète pour elle, on voudrait une issue heureuse tout en craignant que ce ne soit pas possible... On ressent pour certains personnages secondaires de la méfiance, de la répugnance ou de la pitié (et souvent un mélange étrange de ces trois sentiments!). Et puis, certaines des questions soulevées restent d'actualité, vingt ans après la parution du bouquin: la place des femmes dans la société, le fanatisme religieux, la fertilité...

Une très belle lecture dans le cadre du défi Blog-0-trésors! Et ouf! je n'ai pas eu de problèmes majeurs avec cette traduction, contrairement à ce qui était arrivé lors de mon expérience précédente avec cette auteure...



Les billets de trois lecteurs du Biblioblog, celui de Sylvie, de Chiffonnette, de Sébastien...


Addendum: Une autre coïncidence, juste comme je finissais le brouillon de ce billet hier soir, on présentait à l'excellente émission The Hour (CBC) une entrevue avec Margaret Atwood. Elle y discutait de son dernier livre, un essai intitulé Payback: Debt and the Shadow Side of Wealth, dont le sujet, l'endettement, est brûlant d'actualité même si elle avait commencé à l'écrire dès 2005! D'ailleurs je ne savais pas que Mme Atwood était aussi essayiste, décidément elle a plus d'une corde à son arc! Pour voir cette entrevue (en English), c'est ici.

La Servante écarlate de Margaret Atwood, traduit de l'anglais, publié chez Robert Laffont en 1987. 362 p. La version originale, The Handmaid's Tale, date de 1985.

19 mars 2009

Ça s'annonce mal pour la PAL...

Les Amis de la Bibliothèque de Montréal ont annoncé la date de leur formidable vente annuelle de livres retirés des étagères... L'an dernier j'en était revenu avec une dizaine de bouquins, sans compter les revues et les livres pour mes nièces... À 1$ chacun (et encore moins pour les magazines et les livres pour enfants), pas de raison de se priver, à part le manque d'espace pour la PAL grandissante!

C'est également l'occasion de faire un grand ménage chez vous, puisque les dons de livres sont acceptés durant la semaine de la vente (sauf les fins de semaines, sans doute pour cause d'achalandage). C'est pour une bonne cause, car les fonds recueillis servent à financer les activités des Amis, toutes reliées à la promotion de la lecture et de l'écriture chez les jeunes et moins jeunes!

Pour plus de détails: Le site des Amis de la Bibliothèque de Montréal.

11 mars 2009

A Year in the World

Quelle belle façon de voyager à peu de frais! Grâce à ce livre, j'ai l'impression d'avoir visité l'Espagne, le Portugal, le Maroc, etc. J'ai goûté à des plats exotiques, j'ai connu des cultures différentes, j'ai admiré des architectures, des oeuvres d'art et des paysages d'un autre monde...

Après quelques chapitres cependant, j'ai commencé à ressentir une certaine lassitude. Un peu comme lorsqu'on visite un musée et qu' après cinquante vases en porcelaine de l'époque Ming, aussi admirables soient-ils, on ne voit plus aussi bien les oeuvres, l'oeil et le cerveau devenant blasés. J'ai donc décidé d'entrecouper cette lecture par d'autres, ce qui se fait très bien puisque chaque chapitre est indépendant des autres. Cela m'a permis d'aborder chaque nouveau pays l'esprit reposé et ouvert à de nouvelles expériences.

Seul petit bémol, j'ai moins aimé les deux chapitres sur la Grèce, je n'y sentais pas la même passion. À mon avis, l'éditeur aurait pu les couper carrément.


J'ai lu ce livre dans le cadre du défi Lire autour du monde d'Enna, que je remercie mille fois car sans elle je n'aurais sans doute jamais eu l'idée d'emprunter ce récit de voyage tout à fait délicieux! Comme le but de ce défi était de nous faire voyager par la lecture, on peut dire «mission accomplie»!

Le billet de Jules, qui de façon fortuite a lu ce bouquin en même temps que moi (mais plus rapidement!).

A Year in the World de Frances Mayes, publié chez Broadway Books en 2006. 417 p. Titre de la traduction françaises: Saveurs vagabondes.

08 mars 2009

Thinks...

Intelligent, avec une petite touche intello, touchant mais surtout drôle... Mon premier contact avec cet auteur est une réussite totale!

Le premier chapitre est une transcription d'un enregistrement audio fait par l'un des personnages, un universitaire spécialiste du cerveau et de l'intelligence artificielle; dans le cadre d'une expérience sur les processus régissant la pensée, il enregistre tout ce qui lui passe par la tête, sans aucun filtre, ce qui donne un texte assez surprenant, sautant du coq à l'âne, laissant certains fils en suspens... J'ai été accrochée dès les premiers paragraphes, mais en même temps je craignais que ce stratagème ne devienne lassant. Heureusement, l'auteur fait alterner ces chapitres avec d'autres types de narrations, notamment le journal intime d'un autre personnage, une romancière et professeure de création littéraire.

Si l'intrigue elle-même est assez banale (l'éternel triangle amoureux, entremêlé de rivalités universitaires (quoique certains revirements m'ont tout de même prise par surprise!)), les conversations entre les deux protagonistes sur la conscience, l'esprit et le moi sont fascinantes. (Je sais, ça a l'air ennuyant, mais non!) Cependant c'est surtout l'humour, omniprésent, qui fait de cette lecture un de mes coup de coeur des derniers mois. Il faut dire que j'ai toujours aimé l'humour british, de Monty Python à Bridget Jones, en passant par Hitchhiker's Guide to the Galaxy. Je n'ai vraiment pas été déçue.

Les personnages principaux sont également très attachants malgré (ou à cause de) leurs défauts. J'ai été très émue par certains passages du journal intime de la romancière, notamment ceux parlant de la mort subite de son mari l'année précédente.

La difficulté sera maintenant de m'en tenir à ma résolution de faire baisser ma PAL avant d'aller à la bibliothèque rafler tous les autres romans de cet auteur!

I think this is the beginning of a beautiful friendship...

(P.S. Si comme moi vous n'aimez pas les quatrièmes de couverture trop révélateurs, ne lisez surtout pas celui-ci, qui révèle un élément de l'intrigue qui ne sera connu qu'à la page... 250!)



Cuné, dont c'était également la première rencontre avec Lodge, a une appréciation assez semblable à la mienne, de même que Nanou.


Thinks... de David Lodge, publié chez Secker et Warburg en 2001. 342 p. Titre de la traduction française: Pensées secrètes.

04 mars 2009

Vingt-quatre heures de la vie d'une femme


Euh... C'est tout?

J'avoue que je suis un peu déçue. J'ai tellement lu de critiques élogieuses de cet auteur que j'avais peut-être de trop grandes attentes. Ce roman me paraît un peu mince; raccourci de cinquante pages, cela aurait fait une jolie nouvelle. L'écriture est certes élégante, mais pas particulièrement originale. Je m'attendais à être bouleversée, seuls m'ont touchée quelques passages de la confession de cette vieille dame anglaise attachante dont la vie changea en une étrange journée.

Je suis néanmoins contente d'avoir fait connaissance avec cet auteur grâce au défi Blog-o-trésors! D'ailleurs, je lui donnerai certainement une deuxième chance, mais plutôt avec une de ses biographies, qui me tentent beaucoup.

Karine a nettement mieux aimé que moi, de même que Keisha, Amanda, Kalistina, Belle de nuit, Cécile, Jules, Kathel...


Vingt quatre heures de la vie d'une femme de Stefan Zweig, traduit de l'allemand, publié chez Stock en 1981 pour cette traduction. L'original, Vierundzwanzig Stunden aus dem Leben einer Frau, date de 1929. 179 p.

01 mars 2009

Onitsha

Le thème du Blogoclub ce mois-ci: Jean-Marie Le Clézio, prix Nobel de littérature 2008.

Il s'agissait de choisir n'importe lequel des romans de cet auteur français. Pour moi le choix était grand puisque je n'en avais lu aucun! Après avoir lu en diagonale les descriptions dans le catalogue de la bibliothèque de l'UQAM (où j'envoyai Gropitou en service commandé, merci Gropitou!), mon choix se porta sur celui où il était question d'un jeune garçon découvrant l'Afrique; cela m'a fait penser à Une Enfance africaine, dont je garde un excellent souvenir.

Normalement, j'aurais dû adorer cette histoire d'une famille d'Européens en quête d'une Afrique mythique. Le père, un Anglais, est obsédé par la légende d'une ville antique disparue, fondée il y a des siècles par la dernière descendante des Pharaons qui, chassée des rives du Nil par des envahisseurs, entraîna son peuple dans un exode à travers le continent. La mère, Italienne ayant vécu en France jusqu'au début de la Deuxième Guerre mondiale, rêve d'une Afrique de cinéma, avec des savanes emplies de bêtes sauvages fascinantes. Tous deux seront plutôt confrontés à l'Afrique coloniale et à ses fonctionnaires mesquins et racistes. Le seul qui s'adaptera à son nouvel environnement sera l'enfant, peut-être parce qu'il n'avait pas d'idée préconçues.

Même si j'ai apprécié plusieurs passages, il y en a d'autres, trop nombreux, où franchement j'avais de la difficulté à suivre: les actions incompréhensibles de certains personnages, la mythologie africaine évoquée continuellement sans être vraiment expliquée, l'épilogue inutile à mes yeux, et l'énigmatique dernière phrase du roman (si quelqu'un peut m'expliquer ce qu'est supposé nous apporter cette information, je lui en serais reconnaissante!). C'est peut-être vanité de ma part, mais j'aime les livres qui me font sentir intelligente. Ici c'était l'inverse, j'avais toujours l'impression qu'il y avait quelque chose à comprendre, mais quoi?

Je ne peux pas dire que j'ai détesté ce roman, mais j'ai vraiment l'impression d'un rendez-vous manqué, et c'est bien dommage...



Le billet de Zaph des Chats de bibliothèque(s), qui exprime bien le détachement que j'ai ressenti tout au long du roman.

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Onitsha de J.M.G. Le Clézio, publié chez Gallimard en 1991. 251 p.