(À la recherche du temps perdu, tome 7)
Eh bien voilà, j'ai fini la fameuse «Recherche» (comme on l'appelle entre initiés).
Première réflexion sur ce dernier tome: ouf! une chance que toute la série n'était pas aussi ennuyante! En effet les premiers deux tiers sont plutôt soporifiques, à part quelques beaux passages sur l'art, sur Saint-Loup. Il ne se passe rien ou presque. Il y a un bon cinquante pages interminables sur les différents changements qu'on observe et qui nous frappent chez des gens qu'on n'a pas vus depuis plusieurs années: changements physiques, intellectuels, sociaux, etc. L'idée était bonne, celle de nous faire retrouver différents personnages lors d'une matinée mondaine chez le prince de Guermantes, et cela donnera au narrateur un choc salutaire lui faisant comprendre l'urgence de se lancer enfin dans la grande œuvre dont il vient par ailleurs d'avoir l'intuition, lui qui avait plutôt abandonné l'idée de devenir écrivain, se croyant sans talent. Mais c'est long, tellement long, et il y a beaucoup de répétitions!
C'était le pot, voici les fleurs: j'ai vraiment beaucoup aimé le dernier tiers. Il y a des phrases magnifiques sur la littérature, sur la vie et la mort, et on continue à retrouver les principaux personnages de la série sans maintenant qu'il y ait de longueurs. La Première Guerre mondiale est terminée et il y a eu un grand brassage des classes sociales. Je ne veux rien divulgâcher mais disons que certains bourgeois se retrouvent «au top» alors que certains nobles ne sont plus aussi bien considérés.
Comme j'ai lu ce tome sur ma liseuse en version libre de droits (merci,
Bibliothèque électronique du Québec!) qui ne comprend pas d'image en couverture, j'ai choisi, pour illustrer ce billet, celle, parmi les différentes éditions papier, qui me semblait la plus représentative du roman. J'aime beaucoup celle ci-dessus, car il y a plusieurs scènes où le narrateur déambule dans Paris, seul ou avec M. de Charlus, et surtout il y a une scène où il trébuche sur des pavés inégaux, ce qui lui rappelle son voyage à Venise et lui donne l'intuition du «Temps retrouvé», c'est-à-dire la manière dont certaines impressions font un pont entre des événements passés et actuels, entre le passé et le présent, intuition qu'il avait éprouvée déjà quelques années plus tôt lors du célèbre épisode des madeleines trempées dans le thé. C'est en explorant ces impressions qu'il pourra enfin devenir écrivain.
Quelques rélexions sur la série complète. J'éprouve une grande fierté à l'avoir terminée car avouons-le, le style de Proust n'est pas des plus faciles. Il est connu pour ses longues phrases, mais je ne pensais pas que ce serait à ce point! J'ai dû à plusieurs reprises en reprendre du début pour en comprendre la structure. Toutefois, je me suis rendu compte que cette difficulté même fait partie du plaisir. Pourquoi tout serait-il facile? Lorsqu'on a un effort à fournir, le plaisir s'en trouve décuplé. Et ce qui me reste, une fois la dernière page tournée (virtuellement!), en plus de cette fierté, c'est l'impression d'une grande beauté, tant de la langue que des idées.
Le beau
billet de Karine, que je remercie encore une fois puisque c'est elle qui m'a donné le goût de me lancer dans l'aventure!
Le Temps retrouvé (À la recherche du temps perdu, tome 7) de Marcel Proust, 328 p. en version numérique, 1927.