31 décembre 2023

Bye-Bye 2023!

Lecturesquement parlant, 2023 s'est avérée une année faite de hauts et de bas: de belles surprises, des valeurs sûres qui m'ont déçue (MM. Pennac et Irving, c'est de vous que je parle!)...  À plusieurs reprises, ces montagnes russes se sont même fait ressentir dans un même roman: mauvais début/fin excellente, ou l'inverse!  En quantité, petite augmentation par rapport à l'an passé (+7).

Tous les livres lus:

  1. Collapse de Jared Diamond
  2.  The White Company d'Arthur Conan Doyle
  3. 117 Nord de Virginie Blanchette-Doucet
  4. Monsieur Malaussène de Daniel Pennac
  5. Tales from Earthsea (Earthsea, tome 5) d'Ursula Le Guin
  6. Les Cavaliers de Joseph Kessel
  7. Glaise de Frank Bouysse
  8. Le Premier Quartier de la lune (Les Chroniques du Plateau Mont-Royal, tome 5) de Michel Tremblay
  9. Un Chien à ma table de Claudie Hunzinger
  10. Vita Nostra (Les Métamorphoses, tome 1) de Marina et Sergueï Diatchenko    
  11. Bel-Ami de Guy de Maupassant
  12. Three Men in a Boat (to Say Nothing of the Dog) de Jerome K. Jerome
  13. À l'hôtel des Pays d'en haut de Maryse Rouy
  14. Les Rivières suivi de Les montagnes de François Blais
  15. The Devil in the White City d'Erik Larson
  16. Thérèse Desqueyroux de François Mauriac
  17. Good Omens de Terry Pratchett et Neil Gaiman
  18. Quand viendra l'aube de Dominique Fortier
  19. The Pearl de John Steinbeck
  20. Mes contes de Perrault de Tahar Ben Jelloun
  21. Le Royaume immobile (Le Paris des Merveilles, tome 3) de Pierre Pevel
  22. The Invention of Solitude de Paul Auster
  23. A Mercy de Toni Morrison
  24. Robinson Crusoe de Daniel Defoe
  25. Clara lit Proust de Stéphane Carlier
  26. Le rouge vif de la rhubarbe d'Audur Ava Olafsdottir
  27. Encabanée de Gabrielle Filteau-Chiba
  28. The Brethren de John Grisham
  29. The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë
  30. The Last Chairlift de John Irving 
  31. Le Lac de nulle part de Peter Fromm
  32. La Cousine Bette de Honoré de Balzac
  33. Cloud Cuckoo Land d'Anthony Doerr
  34. The Adventures of Sherlock Holmes de Arthur Conan Doyle 
  35. Notes from a Small Island de Bill Bryson
  36. A Psalm for the Wild-Built (Monk and Robot, tome 1) de Becky Chambers
  37. Le Joueur d'échecs de Stefan Zweig
  38. Hongrie-Hollywood express d'Éric Plamondon
  39. La Chienne de Naha de Caroline Lamarche
  40. The Midnight Library de Matt Haig
  41. Le Cimetière de Prague de Umberto Eco
  42. The Lady and the Unicorn de Tracy Chevalier
  43. Les Chiens de Riga de Henning Mankell
  44. Gideon the Ninth (The Locked Tomb, tome 1) de Tamsyn Muir
  45. The Other Wind (Earthsea, tome 6) d'Ursula Le Guin
  46. Passez au Salon, anecdotes recueillies par Isabelle Massé et Hugo Fontaine
  47. Hors-sol de Philippe Yong
  48. La Guerre de Troie n'aura pas lieu de Jean Giraudoux
  49. Midnight's Children de Salman Rushdie (en cours, lu aux trois quarts)                                 

Top 3:

  • Cloud Cuckoo Land d'Anthony Doerr, pour le thème de la transmission, pour ses personnages si attachants, pour le mélange réussi d'historique et de SF.
  •  Les Cavaliers de Joseph Kessel, pour la force de la plume, pour le dépaysement complet, pour l'étalon Jehol.
  • The Pearl de John Steinbeck, lui aussi pour la plume, pour l'intensité, pour les thèmes encore si actuels.

Prix Citron:

Pour la troisième année consécutive, après Dickens et Sand, c'est un classique qui reçoit ce titre peu enviable: The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë.  Les premiers chapitres sont assez sympathiques, mais dès qu'on plonge dans le journal intime du personnage principal, une bigote insupportable, cela devient d'un ennui profond et, malheureusement, cet ennui perdure jusqu'à la fin.  Heureusement qu'il y a eu Maupassant et son Bel-Ami (excellent) pour redorer le blason des auteurs du XIXe siècle (sachant que Balzac m'a déçu lui aussi)!   

Prix «Vive les livres!»:

Vous l'aurez peut-être remarqué, j'adore les livres qui célèbrent les livres et la littérature!  Et j'ai adoré celui-ci: Clara lit Proust de Stéphane Carlier.  S'il ne s'est pas retrouvé dans mon Top 3, c'est parce que j'ai trouvé l'histoire elle-même un peu banale.  Mais tous les petits clins d’œil à la littérature en général et à La Recherche du temps perdu en particulier sont tout à fait délicieux. 

Prix Découverte:

Une jolie surprise que ce premier roman de Virginie Blanchette-Doucet, 117 Nord.  On y voyage de Val-d'Or à Montréal en une série de petits chapitres désordonnés qui finissent par former une belle histoire dans un cadre original.

Quelques statistiques: 

  • sur la liseuse: 36 (toujours en augmentation, d'année en année!)
  • lus en VO anglaise: 22
  • littérature québécoise: 9
  • littérature ukrainienne: 1
  • littérature marocaine: 1
  • littérature scandinave: 2 (j'y inclus l'Islande, même si ce n'est pas correct au sens strict)
  • littérature autrichienne: 1 
  • littérature italienne: 1

Défi livresque 2024:

Hum... *petite toux*  En 2023, je me suis finalement décidée à me lancer dans Mémoires d'Outretombe de Chateaubriand, mais je m'y suis prise si tardivement et j'avance si lentement que je n'ai même pas fini le tome 1... sur six!   C'est très intéressant (en ce moment, François-René joue au coureur des bois en Amérique!), mais j'oublie tout simplement d'interrompre mes autres lectures pour m'y plonger!  Du coup, le défi est reporté à l'année 2024 (en espérant ne pas l'étirer jusqu'en 2025!)

Et vous, comment a été votre année de lecture?  Des résolutions pour 2024? 

 

Je profite de l'occasion pour vous remercier de me suivre dans mes divagations et de me stimuler de vos commentaires enrichissants! Je vous souhaite, chers lecteurs et lectrices, une merveilleuse année, la paix, la santé, le bonheur et bien sûr de magnifiques lectures en 2024! 

22 décembre 2023

La guerre de Troie n'aura pas lieu

Dans cette pièce créée en 1935, Jean Giraudoux revisite le mythe de la guerre de Troie en mode tragi-comique.  Hector, prince troyen, revient d'une guerre contre un autre peuple et apprend que les Grecs arrivent, menaçant d'assiéger la ville si on ne leur rend pas la belle Hélène, enlevée par Pâris. 

J'ai bien apprécié les petites touches d'humour, comme ici:

              PÂRIS

Hélène est une très gentille personne. N’est-ce pas, Cassandre ?

              CASSANDRE

 Assez gentille.

              PÂRIS

Pourquoi ces réserves, aujourd’hui ? Hier encore tu disais que tu la trouvais très jolie.

            CASSANDRE

Elle est très jolie, mais assez gentille.

            PÂRIS

Elle n’a pas l’air d’une gentille petite gazelle ?

            CASSANDRE

Non.

            PÂRIS

C’est toi-même qui m’as dit qu’elle avait l’air d’une gazelle !

            CASSANDRE

Je m’étais trompée. J’ai revu une gazelle depuis.

 

Mais d'autres passages m'ont semblé tomber à plat tant l'humour paraît forcé.  Dans d'autres cas, il me manquait peut-être quelques références pour tout saisir, après tout cette pièce date de près d'un siècle!

C'est surtout lorsqu'on la replace dans le contexte de l'entre-guerre que l’œuvre prend toute sa signification et sa force.  Les militaires ayant participé à la Première Guerre mondiale ne se sont pas encore remis de ce traumatisme effroyable que déjà des va-t-en-guerre (qui bien sûr resteront à l'abri loin des tranchées) jouent du clairon de chaque côté de la frontière. La pression monte, monte...  Dans la pièce, Hector se fait la voie des pacifistes, réussira-t-il à calmer le jeu? 

                HECTOR

C’est ce que nous allons voir. Cours demander à Priam s’il peut m’entendre à l’instant, et rassure-toi. Tous ceux des Troyens qui ont fait et peuvent faire la guerre ne veulent pas la guerre.

            ANDROMAQUE

Il reste tous les autres.


Cela m'a rappelé un roman paru à la même époque, Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, presque insoutenable de noirceur mais dont certains passages sont magnifiques, notamment ceux contre les fauteurs de guerre. 

Petit bémol, j'espérais que Cassandre, cette prophétesse dont la malédiction est de ne jamais être crue, serait plus présente, car c'est un de mes personnages préférés de la mythologie grecque.  Elle participe à quelques scènes clés, et d'ailleurs la réplique finale lui revient, mais j'en aurais pris encore plus!

Je vous laisse découvrir si la guerre de Troie aura bien lieu ou non...


La guerre de Troie n'aura pas lieu de Jean Giraudoux, 1935, 304 p. incluant les annexes.

09 décembre 2023

Hors-sol

Premier roman pour Philippe Yong, professeur de lettres né en France de parents coréens, enseignant au collège Stanislas à Montréal (du coup, je le classe en littérature québécoise, na!).  

Premier roman, disais-je, on lui pardonnera donc quelques maladresses: un style parfois un peu prétentieux, une fin qui s'étire un peu trop, quelques incohérences dans les réactions des personnages...

Ces petits défauts, heureusement, ne m'ont pas empêchée d'apprécier cette histoire assez sympathique qui parle d'exil et de déracinement.  En effet, le personnage principal, un agronome portugais travaillant dans une serre du Mile-End, n'arrive à prendre racine nulle part, à l'instar des laitues hydroponiques qu'il cultive et des mousses et lichens accrochés tant bien que mal aux pierrailles de l'Islande, où l'action se transporte en deuxième partie du roman.

Quand l'intrigue se déroule dans un quartier de Montréal que je connais, c'est déjà un gros plus.  Mais même en terrain inconnu, j'ai trouvé que l'auteur se débrouillait fort bien pour décrire les diverses ambiances, que ce soit celle du terrain désaffecté où est installée la serre ou celle, glaciale et lunaire, de l'Islande.

Bref, un roman imparfait mais tout de même bien intéressant.

P.S.: Ne lisez pas la quatrième de couverture, elle divulgâche énormément!


Hors-sol de Philippe Yong, 2022, 217 p.

07 décembre 2023

Passez au Salon

Un court billet sur ce court recueil d'anecdotes...  On y retrouve les souvenirs d'une cinquantaine d'auteurs, certains très connus, d'autres moins, concernant leurs passages dans des Salons du livre du monde entier.

L'ensemble est sympathique, les petits récits étant tour à tour touchants, surprenants ou amusants.  J'ai été particulièrement émue par celui de Marie-Claude Savard (la journaliste sportive) qui, après la parution de son livre sur le deuil de ses parents, a eu la surprise de trouver à son kiosque au Salon de Québec un groupe d'oncles, tantes et cousins qu'elle n'avait jamais rencontrés!

Rendue au milieu du recueil, j'ai toutefois trouvé qu'il y avait un petit côté répétitif et j'ai craint de me lasser...  Je l'ai donc continué plus lentement en lisant autre chose en parallèle.  Je vous conseille d'adopter cette stratégie qui a bien fonctionné pour moi.
 

 

Passez au Salon, anecdotes recueillies par Isabelle Massé et Hugo Fontaine, 2014, 272 p.

06 décembre 2023

The Other Wind (Le Vent d'ailleurs)

Earthsea (Terremer), tome 6

Ooouuuiiinnn!!! J'ai terminé cette magnifique série, snif snif!  Bon, il me reste bien quelques nouvelles qui se déroulent dans le même univers, je tenterai de mettre la main sur elles.  J'ai vu notamment que The Daughter of Odren est disponible en prêt numérique.  En général, la nouvelle n'est pas un genre littéraire qui m'attire, mais pour me plonger à nouveau dans le monde de Earthsea, je suis prête à tout!

Pour ce qui est de ce tome 6, quel immense plaisir de retrouver la plume de Le Guin!  Je suis fascinée par son pouvoir d'évocation.  Son style est épuré, presque minimaliste et pourtant en quelques phrases nous voilà transportés dans un autre monde.  On revoit aussi avec bonheur les personnages des tomes précédents et on en découvre quelques nouveaux.

Je n'ai qu'un petit bémol, j'ai trouvé la fin un peu trop simple et rapide.  Sans m'attendre à quelque chose de grandiose à la Tolkien, j'aurais souhaité qu'un certain passage soit plus étoffé, qu'il y ait une plus grande tension.  Mais la résolution de l'histoire en elle-même est satisfaisante et conclut bien la série.  Elle a un petit côté doux-amer qui convient parfaitement à l'atmosphère générale.

Maintenant, j'ai déjà hâte de retrouver cette plume magique dans un autre registre, la science-fiction!  Je pense lire La Main gauche de la nuit en 2024...


The Other Wind (Earthsea, tome 6) d'Ursula Le Guin, 2001, 328 p. Titre de la traduction française: Le Vent d'ailleurs (Terremer, tome 6) (Il faut noter que les tomes en français sont divisés différemment dans certaines éditions.)

25 novembre 2023

Gideon the Ninth (Gideon la Neuvième)

 The Locked Tomb (Le Tombeau scellé), tome 1

Étrange expérience que cette lecture...  

Tout en aimant l'ambiance à la fois noire et drôle (les dialogues sont très sarcastiques), j'ai eu un gros passage à vide durant le premier tiers de ce roman de Tamsyn Muir car je ne m'attachais pas du tout aux deux personnages principaux.  De plus, la plume de l'auteure (en VO) n'est pas des plus fluides; au-delà du vocabulaire assez recherché, et sans que j'aie pu identifier vraiment ce qui cloche, j'ai trouvé son style un peu lourd.  J'avais l'impression de ne pas avancer.  On a frôlé l'abandon!

Toutefois, une fois résignée au fait que décidément cette Gideon n'est pas des plus sympathiques, j'ai pu apprécier les qualités certaines du roman.  Je me suis prise au jeu de cette intrigue intelligente, pleine de rebondissements inattendus et où le lecteur doit fournir un petit effort, ce qui n'est pas pour me déplaire.  J'ai aussi beaucoup aimé le mélange des genres: mi-SF (on passe d'une planète à une autre en vaisseau spatial), mi-Fantasy (il y a de la magie, les serviteurs sont des squelettes animés), le tout assaisonné d'un huis-clos que n'aurait pas renié Agatha Christie elle-même.    

Est-ce que je lirai la suite?  Pas décidée encore.  La fin de ce tome est satisfaisante, l'histoire pourrait s'arrêter là... mais il y a bien quelques petits détails laissés en suspens et qui piquent ma curiosité!


Gideon the Ninth (The Locked Tomb, tome 1) de Tamsyn Muir, 2019, 448 p.  Titre de la traduction française: Gideon la Neuvième (Le Tombeau scellé, tome 1).

11 novembre 2023

Les Chiens de Riga

Une deuxième incursion dans la série de polars mettant en vedette le commissaire Wallander, et c'est confirmé: j'adore!

Dans ce tome-ci, Wallander se rend en Lettonie, pays balte encore occupé par l'URSS puisque l'action se déroule en 1990.  L'ambiance est glauque à souhait, les murs ont des oreilles, notre héros ne sait à qui il peut se fier.  Je crois que c'est le premier roman que je lis se déroulant dans ce pays, c'est vraiment très original!

Comme toujours avec Mankell, la plume est subtile, sans effets de manche. Les états d'âme du personnage principal sont décrits avec justesse, sans trop appuyer, et le suspense est maintenu du début à la fin.

J'ai le tome suivant, La Lionne blanche, dans ma PAL, je pense bien le lire en 2024!


Les Chiens de Riga de Henning Mankell, traduit du suédois, 2003, 320 p.  Titre de la version originale: Hundarna i Riga (1992).

09 novembre 2023

The Lady and the Unicorn (La Dame à la Licorne)

Après une lecture un peu ardue (coucou M. Eco!), j'avais envie de quelque chose de léger…  Ayant gardé un excellent souvenir de Girl with a Pearl Earring (La Jeune Fille à la perle) de Tracy Chevalier, je me suis donc tournée vers une autre de ses œuvres, qui avait rejoint ma PAL lors du dernier Solde de livres de la Bibliothèque de Montréal.

Dans The Lady and the Unicorn, Chevalier bâtit une intrigue autour de la fabrication de la célèbre tapisserie La Dame à la Licorne, une suite de six grands panneaux qui se trouvent maintenant au musée de Cluny à Paris (allez voir cela sur Wiki, c’est magnifique!).  On se balade entre Saint-Germain-des-Prés, où résident la famille de petite noblesse qui a commandé la tapisserie ainsi que le peintre qui a conçu le modèle, et Bruxelles, où la tapisserie sera fabriquée par différents artisans.

La construction de ce roman choral est intéressante et les personnages sont pour la plupart attachants – sauf le peintre, qui est une vraie tête-à-claques!  Mais ce sont les scènes décrivant le fonctionnement de l’atelier que j’ai trouvées particulièrement fascinantes.  On sent d’ailleurs que l’auteur s’appuie sur une solide documentation.

Sans être inoubliable, une lecture fort agréable!

 

The Lady and the Unicorn de Tracy Chevalier, 2003, 248 p.  Titre de la traduction française: La Dame à la Licorne.

31 octobre 2023

Le Cimetière de Prague

Oh là là! Quelle intrigue tarabiscotée!  Vous le savez, j'aime qu'un auteur fasse confiance à son lecteur, mais dans ce cas-ci, Umberto m'a peut-être surestimée...

Francs-maçons, jésuites, communistes, anarchistes, satanistes, juifs, antisémites, républicains, monarchistes, militaires, services secrets, dreyfusards, antidreyfusards, à peu près tous les groupes à l’œuvre dans la société européenne de cette fin du XIXe siècle sont représentés.  Une chatte y perdrait ses chatons!

Heureusement, le début du roman est vraiment intrigant.  Le personnage (fort antipathique) souffre-t-il oui ou non d'un dédoublement de la personnalité?  La curiosité a soutenu mon intérêt jusqu'à la résolution du mystère.  Et la fin, qui annonce les terribles événements qui surviendront dans la première moitié du XXe siècle, est à la fois troublante (surtout lorsqu'on sait que cette histoire est basée en grande partie sur des faits réels) et satisfaisante.


Le Cimetière de Prague de Umberto Eco, traduit de l'italien, 2011, 555 p.  Titre de la version originale: Il cimitero di Praga (2010).

28 octobre 2023

The Midnight Library (La Bibliothèque de minuit)

Le thème du club de lecture Livraddict d'octobre est le monde du livre, et on a choisi ce roman de Matt Haig.  Ce n'était pas mon premier choix (j'ai voté pour Les Vies de papier de Rabbih Alameddine et La plus secrète mémoire des hommes de Mohamed Mbougar Sarr) mais je n'ai pas été surprise car on le voit partout sur les blogues et les forums depuis sa parution en version française l'an dernier.  J'ai donc décidé de lui donner sa chance -- j'ai déjà eu de bonnes surprises grâce à ce club de lecture!

Malheureusement, mon avis est mitigé.  C'est un roman qui se lit bien et l'idée de base est intéressante même si elle n'est pas d'une grande originalité: une femme a l'occasion de visiter les différentes vies qu'elle aurait vécues si elle avait pris des décisions différentes à différents moments de son parcours.  Elle est plutôt sympathique mais l'on aurait souvent envie de la secouer un peu!

Là où le bât blesse, c'est que tout est expliqué en long et en large.  J'aurais aimé qu'on nous laisse découvrir peu à peu le fonctionnement de la mystérieuse bibliothèque, mais non, tout est dévoilé dès que l'héroïne y pénètre.  De plus, les motivations et les sentiments de cette dernière sont soulignés à gros traits et entourés d'un néon clignotant.  Or, vous me connaissez, je préfère quand l'auteur nous fait confiance et nous laisse faire notre petit bout de chemin...

J'ai aussi remarqué quelques incohérences dans l'intrigue.  Je n'en parlerai pas trop pour ne rien divulgâcher, mais disons notamment que, parmi les options de vie que l'héroïne choisit de visiter, il y en avait une qui semblait évidente et à laquelle elle ne pense que très tardivement.  De plus, la fin est extrêmement prévisible et l'on devine dès le début ce que sera la morale de l'histoire.

Bref, un peu déçue, mais j'espère à tout le moins que les discussions avec les participants du club seront animées!


The Midnight Library de Matt Haig, 2020, 288 p.  Titre de la traduction française: La Bibliothèque de minuit.

22 octobre 2023

La Chienne de Naha

Où donc ai-je remarqué ce livre?  Je n'en suis pas sûre, mais je crois que c'était sur la plate-forme du prêt numérique de la BAnQ, dans une liste de suggestions ayant pour thème la littérature belge.  Je n'avais jamais entendu parler de cette auteure.  Ce qui a attiré mon attention, et ça je m'en souviens parfaitement, c'est le titre.  Une histoire avec un pitou, ça ne peut pas être mauvais, me suis-je dit.

Fausse représentation!  Dès la première page, je constate que la chienne en question est le personnage d'un conte traditionnel mexicain mis en exergue du roman et Naha n'est pas la maîtresse de la chienne mais plutôt le nom du village fictif où se déroule le conte!  

Heureusement, malgré cette petite déconvenue initiale, j'ai tout de même bien aimé ce bouquin qui raconte le voyage au Mexique d'une Européenne fraîchement séparée de son conjoint violent.  L'histoire est intéressante, mais ce que j'ai apprécié surtout c'est la plume poétique de Caroline Lamarche.  Elle sait à merveille décrire les petites choses du quotidien: un paysage, une grenouille, un ciel étoilé...

Vous connaissiez déjà cette écrivaine, vous?


La Chienne de Naha de Caroline Lamarche, 2012, 208 p.

17 octobre 2023

Hongrie-Hollywood express

 Quel drôle de machin!

J'ai aimé ou j'ai pas aimé?

Aucune idée!

(J'ai presque envie d'arrêter cette chronique ici!)

(Hihihi!)

Hum, bon.  Disons que plusieurs passages m'ont fait rigoler, mais que d'autres me sont passés dix pieds par-dessus la tête.  En fait, je n'avais même pas compris qui était le narrateur (je croyais que c'était l'auteur lui-même); je ne l'ai su qu'en lisant la quatrième de couverture, ce que je ne fais jamais avant d'avoir fini le livre pour éviter tout divulgâcheur!

Ce roman, qui raconte (entre autres sujets) la vie de Johnny Weissmuller (l'acteur des films de Tarzan), fait partie d'une trilogie...  Est-ce que je lirai le roman suivant (sur l'écrivain américain Richard Brautigan) intitulé Mayonnaise?  J'hésite, mais ça peut valoir la peine, ne serait-ce que pour connaître le lien entre l'auteur culte et le condiment.  D'ailleurs, ce roman-ci finit sur un cliffhanger (divulgâcheur: si vous ne voulez pas connaître les dernières lignes du livre, arrêtez ici, même si ça ne dévoile rien d'important...)

Post-scriptum
en hommage à Richard Brautigan

Je n'ai jamais réussi à faire une mayonnaise.

Intrigant, non?

 

Hongrie-Hollywood express d'Éric Plamondon, 2011, 176 p.

13 octobre 2023

Le Joueur d'échecs

Parmi les livres de Stefan Zweig que j’ai lus jusqu’à maintenant, j’ai surtout apprécié ses œuvres de non-fiction (biographies, mémoires).  La seule œuvre fictionnelle que j’ai lue m’a déçue, pour ne rien vous cacher!  C’était Vingt-quatre heures de la vie d’une femme, c’était mon premier contact avec cet auteur et mes attentes étaient nettement trop élevées.  Dans les années 2008-2009, il y a eu sur la blogosphère littéraire une redécouverte de Zweig qui a provoqué un véritable raz-de-marée d’éloges dithyrambiques.  Je m’attendais donc à quelque chose d’exceptionnel!  Or, si j’ai trouvé la plume élégante, l’histoire elle-même n’a pas soulevé mon enthousiasme.

Cette fois, cela s’est beaucoup mieux déroulé!  Avec une maîtrise magistrale, Zweig s’attarde ici à décrire la psychologie d’intéressants personnages, dont l’un a appris à jouer aux échecs alors qu’il était prisonnier des nazis et maintenu en isolement complet.  Lors de la partie d'échecs finale entre ce personnage à l’équilibre psychique incertain et un champion mondial antipathique au possible, la tension est presque insoutenable!

Mentionnons qu'il est sans doute préférable de connaître les rudiments du jeu pour apprécier toutes les subtilités de ce récit d'obsession et de folie. 

Vraiment, une excellente lecture! 

 

Le Joueur d'échecs de Stefan Zweig, traduit de l'allemand, 2013 pour cette traduction de Jean Torrent, 149 p.  Titre de la version originale: Schachnovelle (1942)

12 octobre 2023

A Psalm for the Wild-Built (Un Psaume pour les recyclés sauvages)

Monk and Robot (Histoires de moine et de robot), tome 1

Je ne savais pas trop à quoi m’attendre en commençant ce court roman.  Ma première rencontre avec Becky Chambers s’était fort bien déroulée – c’était avec le tome 1 de sa série Wayfarers -- mais notre relation s’est gâchée lors de ma lecture du tome 2, qui m’a bien déçue.  Je la retrouve maintenant pour le tome 1 d’une nouvelle série mettant en vedette un moine et un robot habitant sur une lune lointaine.

Sans que j'aie été complètement emballée, cette lecture s’est plutôt bien passée.  Les deux personnages sont très attachants, l’amitié qui se développe peu à peu entre eux est touchante et plusieurs passages sont très drôles.  Ils ont d’intéressantes conversations (qui auraient même pu être plus approfondies) sur le sens de la vie, la place de l’humain (et du robot!) dans la nature, etc.

Ce roman a également été l’occasion d’expérimenter l’écriture inclusive et ce, en anglais!  Je connaissais déjà l’utilisation du pronom they comme pronom neutre au singulier mais seulement de façon très ponctuelle, par exemple dans un polar lorsque le sexe d’un suspect n’est pas connu. C’était pour moi une première dans le cas d'un personnage principal de genre non binaire.  Ce pronom étant 99.9% du temps utilisé au pluriel dans la langue anglaise, cela m’a demandé une petite gymnastique de cerveau! L'expérience ne m'a pas déplu, mais j'aurais peut-être éprouvé plus (trop?) de difficultés avec la version française...  Passe encore pour le pronom «iel», mais tous les accords d'adjectifs, de pronoms et de participes passés qui s'ensuivent, aouch!  En anglais, c'est quand même beaucoup plus simple. 

(En parlant de la traduction, est-ce que je suis la seule à trouver bizarre le titre français de la série?  Puisque moine et robot sont au singulier, est-ce que cela ne devrait pas plutôt être Histoires d'un moine et d'un robot, ou encore du moine et du robot? Mais bon, je chipote un peu, là!)

Mon principal bémol, c’est que finalement il ne se passe pas grand-chose dans cette histoire.  Sans nécessairement vouloir des explosions et des giclées de sang, j’aurais pris une certaine tension, un peu d’action, de danger ou de mystère.  C’était bien tranquille, tout ça, et cela m’a laissée sur ma faim.

Peut-être que ce tome sert d’introduction et que la suite sera plus corsée?  L’avenir nous le dira, mais si ce n’est pas le cas, cette série pourrait bien s’arrêter là pour moi (à moins qu’il me prenne l’envie d’une lecture doudou, mais c’est rarement ce que je recherche).  À suivre.

 

A Psalm for the Wild-Built (Monk and Robot, tome 1) de Becky Chambers, 2021, 160 p.  Titre de la traduction française: Un Psaume pour les recyclés sauvages (Histoires de moine et de robot, tome 1)

04 octobre 2023

Notes from a Small Island (Des Cornflakes dans le porridge)

Comment voyager à peu de frais tout en rigolant un bon coup?  Lire un récit de voyage de Bill Bryson, voilà comment!  Et si le bouquin a été trouvé dans une boîte à livres, c'est encore plus sympa!

L'écrivain et journaliste américain Bill Bryson, après une vingtaine d'années au Royaume-Uni, décide de retourner vivre aux États-Unis avec sa famille.  Il entreprend donc une dernière tournée de l'île britannique, de Dover au sud jusqu'au nord de l'Écosse et, avec son humour habituel, nous fait le récit de ce périple en train, en voiture, en traversier et à pied.  On sent qu'il aime sincèrement cette nation et ses habitants, mais en même temps, il ne se gêne pas pour leur dire leurs quatre vérités lorsque, par exemple, ils laissent leurs dirigeants gâcher des paysages naturels ou urbains d'une grande beauté par des constructions d'une laideur épouvantable.  Et la leçon passe bien, parce qu'il sait également faire preuve d'autodérision, n'hésitant pas à tourner en ridicule ses propres petites manies.

Le seul petit défaut de ce livre, c'est que les références à des personnalités (politiques ou artistiques) sont parfois un peu désuètes.  C'est un assez normal puisqu'il a été publié en 1995, mais je n'ai pas eu cette impression lorsque j'ai lu A Walk in the Wood, qui date de seulement trois ans plus tard. 


Notes from a Small Island de Bill Bryson, 1995, 352 p. Titre de la traduction française: Des Cornflakes dans le porridge.

20 septembre 2023

The Adventures of Sherlock Holmes (Les Aventures de Sherlock Holmes)

(Première partie de l'intégrale The Original Illustrated Sherlock Holmes)

Après les romans The Hound of the Baskervilles et A Study in Red, j'ai décidé d'essayer les douze nouvelles regroupées sous le titre The Adventures of Sherlock Holmes.  Un mot sur cette édition, d'abord.  J'aime beaucoup la présentation de type feuilleton, sur deux colonnes par page, et présentant les gravures originales de Sydney Paget.  On est tout de suite dans l'ambiance!

Pour ce qui est des nouvelles elles-mêmes, je les ai trouvées un peu inégales.  Enfin, toutes sont intéressantes mais dans certains cas, la fin tombe un peu à plat...  Par exemple, dans l'une d'elles, Sherlock découvre l'identité du meurtrier après que celui-ci se fut enfui à bord d'un navire... qui fait naufrage avant d'arriver à bon port, donc tout est bien qui finit bien (sauf pour les autres passagers et les membres de l'équipage!)

Néanmoins, je me suis bien amusée et j'ai surtout apprécié tous les petits détails qu'on apprend sur Holmes au fil des pages, toutes ses petites manies, ses déguisements, la haute estime qu'il a de lui-même mais aussi son amitié sincère avec Watson, le narrateur. 


The Adventures of Sherlock Holmes (tiré de l'intégrale The Original Illustrated Sherlock Holmes) de Arthur Conan Doyle, 1891-1892, 181 p.  Titre de la traduction française: Les Aventures de Sherlock Holmes.

15 septembre 2023

Cloud Cuckoo Land (La Cité des nuages et des oiseaux)

Dans mon dernier billet, je vous disais que depuis un certain temps j'ai de la difficulté à apprécier mes lectures dans leur entièreté.  Soit j'aime le début mais la fin me déçoit, ou l'inverse.  

Eh bien! ça y est, le mauvais sort est rompu!  Cloud Cuckoo Land est un coup de cœur du début à la fin!  (Et mes lecteurs de longue date savent que je n'attribue pas ce qualificatif à tout venant.)

C'est par un autre roman que j'ai entendu parler d'Anthony Doerr pour la première fois, quand  Barack Obama a mis All the Light We Cannot See (Toute la lumière que nous ne pouvons voir, prix Pulitzer 2015, rien de moins) dans sa liste de lecture d'été.  Le mois dernier, Cloud Cuckoo Land (ou plutôt sa traduction au titre poétique La Cité des nuages et des oiseaux) a été mis en nomination pour le prix Livraddict 2023 section Science-Fiction; j'ai donc décidé que ce serait par celui-là que je découvrirais l'auteur.  Et comme vous l'aurez deviné, je ne le regrette pas! 

Les amateurs de SF pure et dure pourraient toutefois être déçus par ce roman (j'ai vu ce commentaire ici et là).  Il s'agit avant tout d'un roman historique, dont environ un quart seulement se passe dans le futur, avec une intrigue qui fait des allers-retours entre différentes époques.  Vous voilà prévenus!  Par contre si vous aimez les personnages (humains et animaux!) attachants et bien développés, les mélanges de genres littéraires et les constructions intelligentes, vous allez être servis!

On parle de ce roman comme d'une ode à la littérature... J'irais encore plus loin, c'est une ode à la transmission des histoires, qu'il s'agisse d'un manuscrit traversant les siècles, d'une pièce de théâtre montée par des enfants et leur vieux professeur, d'un père racontant un conte à sa fille...  Il y a déjà quelques jours que j'ai fini de le lire et j'y pense encore, dans mon cas cela est significatif!  

Je n'en dis pas plus, lisez-le!


Cloud Cuckoo Land d'Anthony Doerr, 2021, 640 p.  Titre de la traduction française: La Cité des nuages et des oiseaux

30 août 2023

La Cousine Bette

Ces temps-ci, j'ai l'impression que tous mes avis se ressemblent: soit j'aime beaucoup le début d'un livre pour ensuite être déçue, ou vice versa.  On dirait que j'ai de la difficulté à aimer un roman dans son entièreté!

Et tenez-vous bien: c'est encore le cas ici!

En effet, ce roman de Balzac commence de belle façon.  L'intrigue est bien menée, les personnages bien décrits.  Il y a quelques digressions mais elles sont assez courtes.  Et même si l'on peut remarquer quelques longueurs dans le récit, l'intérêt reste soutenu jusqu'au deux-tiers du livre, environ.

Malheureusement, c'est là que tout tourne en eau de boudin.  L'histoire part dans toutes les directions.  Tant de sommes d'argent sont échangées qu'on perd le fil des différentes machinations.  Bette, le personnage le plus intéressant, qu'on voyait déjà peu mais qu'on sentait tirant les ficelles en coulisses, s'efface complètement dans le dernier tiers, où par ailleurs sont introduits de nouveaux personnages qui arrivent comme des cheveux sur la soupe.

Mais le pire, c'est qu'à mesure qu'on avance, les digressions de M. Balzac deviennent de plus en plus insupportables  Misogynes, racistes, réactionnaires...  Par exemple, la gentrification des quartiers de Paris est une bonne chose puisque cela permet d'éloigner les quêteux et les criminels (cela dans un roman dont les personnages bourgeois et aristocrates se salissent les mains dans toutes sortes de machinations et de spéculations, bonjour l'hypocrisie!).  Disons qu'au moment où nous vivons à Montréal une crise du logement pour les familles à revenus modestes, cela m'a particulièrement fait grincer des dents. Si Honoré avait été devant moi, je lui aurais donné une bonne claque en arrière de la tête!  

Mémo à moi-même: les notes de cette édition Garnier Flammarion sont très instructives et aident souvent à suivre l'intrigue et à faire le lien avec d'autres œuvres de La Comédie humaine, mais faire constamment l'aller-retour sur la liseuse est un peu pénible, rendant la lecture laborieuse.  La prochaine fois, privilégier une édition papier!


La Cousine Bette de Honoré de Balzac, 1835, 642 p.

26 août 2023

Le Lac de nulle part

Durant toute la première moitié de ce roman de Pete Fromm, choisi pour le club de lecture de Livraddict du mois d’août, j'ai eu vraiment beaucoup de difficulté à embarquer – c'est le cas de le dire puisqu'il est question d'un voyage en canot!  Parfois, on ne sait pas trop pourquoi on n'accroche pas à un bouquin; cette fois je connais parfaitement les deux raisons.

Premièrement, je me suis fait divulgâcher un élément important de l'intrigue quelques jours avant de commencer la lecture.  J'étais tellement fâchée que cela a bien failli m'enlever le goût de lire ce livre et de participer au club!

Deuxièmement, ce livre n'était pas disponible en version originale à la bibliothèque municipale.  Certains de ceux qui me suivent ici depuis un moment le savent, je suis très capricieuse concernant les traductions, surtout lorsque l'intrigue se passe en Amérique du Nord.  J'ai beau partir avec de la bonne volonté, dès que je remarque un truc qui cloche, je me mets à en chercher d'autres, ce qui m'empêche de bien entrer dans l'histoire.  Et c'est ce qui s'est passé ici:  le jeu enfantin rock-paper-scissors se traduit par roche-papier-ciseaux et non pierre-feuille-ciseaux, il n'y a pas de myrtilles au Canada mais bien des bleuets, la femelle de l'élan est appelée cow en anglais, mais on ne dit pas vache en français, simplement élan femelle, etc.

Je ne suis pas fan non plus des notes de la traductrice.  Soit elle nous précise des choses que l'auteur avait cru bon de nous laisser deviner (par exemple pourquoi les jumeaux s'appellent Al et Trig, alors que le jeu de mots fonctionne tout aussi bien en français), soit elle tombe à côté de la plaque dans ses explications.  Ainsi, l'interjection eh? n'est pas un tic de langage des Canadiens-français mais plutôt des Canadiens-anglais, et Dudley Do-Right, avant d'être le personnage d'un film des années 90 qui fut un gros flop et dont personne ne se souvient, fut surtout un personnage du dessin animé mythique des années 60, Rocky and Bullwinckle.

Heureusement, une fois dépassée la moitié du roman et le passage où l'on apprend ce qu'on m'avait divulgâché, j'ai ressenti un tel soulagement que j'ai pu enfin me concentrer sur l'histoire et m'intéresser au sort des personnages.  Et même si j'avais un peu deviné la clé de l'énigme, j'ai vraiment beaucoup aimé l'ambiance automnale et sauvage de cette deuxième moitié, et la tension qui s'établit et qui monte.

Comme vous voyez, c'est une lecture qui ne s'est pas déroulée dans les meilleures conditions.  J'espère que cela s'est mieux passé pour les autres participantes du club de lecture!


Le Lac de nulle part de Peter Fromm, traduit de l'américain, 2022, 300 p.  Titre de la version originale: Lake Nowhere.

19 août 2023

The Last Chairlift

Quelle joie d'apprendre que John Irving, un de mes écrivains chouchous, avait publié un nouveau roman!  Le jour même, je me suis empressée d'aller l'emprunter à la bibliothèque municipale et je l'ai commencé peu de temps après.

J'ai d'abord ressenti un grand bonheur à retrouver l'univers d'Irving, son humour, ses personnages déjantés et attachants.  Il est beaucoup question d'homosexualité et d'identité de genre, mais dans son cas, il ne s'agit pas d'un effet de mode -- il abordait ces thématiques dès ses premières œuvres, avec notamment un personnage transgenre dans Le Monde selon Garp (1978).  

Il y a une scène tout à fait délicieuse où la grand-mère du personnage principal (alors âgé d'une dizaine d'années) lui fait la lecture de Moby Dick, commentaires à l'appui: «Remarque bien ce cannibale, Adam!»  Ayant lu ce classique récemment, cela m'a rappelé de bons souvenirs!

Malheureusement, après environ deux cents pages, j'ai commencé à trouver qu'on tournait en rond, qu'il y avait énormément de longueurs et de répétitions.  Et jusqu'à la fin, on aura cette impression, avec de temps en temps, heureusement, des passages poignants ou passionnants (notamment sur l'épidémie de SIDA dans les années quatre-vingts et sur l'indifférence criminelle de Reagan dans ce dossier) et une ambiance «réalisme magique» assez originale.

C'est comme si l'éditeur de ce monstre sacré de la littérature américaine n'avait pas osé lui dire: «Dude, il y a trois cents pages de trop dans ton roman, faut couper, faut couper!»  Dommage...


The Last Chairlift de John Irving, 2022, 891 p.  Pas encore traduit.

22 juillet 2023

The Tenant of Wildfell Hall

Je connaissais déjà les sœurs Charlotte (Jane Eyre, un coup de cœur!) et Emily (Wuthering Heights, qu'à vingt ou trente ans j'avais trouvé un peu trop sombre mais que j'apprécierais sans doute plus maintenant que mes goûts se sont diversifiés), il me restait à découvrir Anne.  La sélection de juillet du club de lecture du forum Livraddict m'en a donné l'occasion.

Malheureusement cela ne s'est pas bien passé...  C'est en partie ma faute: voulant éviter tout divulgâcheur, je n'avais pas lu la quatrième de couverture et je m'attendais à une ambiance gothique: la lande balayée par le vent, des légendes voulant que le manoir soit hanté, que sais-je?  Avouez que la couverture de cette édition pouvait d'ailleurs donner cette impression, non?  Or, ce n'est pas ça du tout.  On est plutôt dans un roman social sur la place de la femme dans la société anglaise, le mariage, la religion, etc.  Sujets en soi intéressants, mais que j'ai trouvés traités d'une plume qui manquait par trop de subtilité.

L'histoire commence plutôt bien: les personnages sont intéressants, les dialogues amusants, les paysages charmants. Dans le voisinage, les commérages vont bon train concernant la mystérieuse locataire du manoir de Wildfell Hall.  Après un certain temps, j'ai toutefois commencé à trouver que l'action prenait du temps à démarrer...  On change alors de narrateur, puisqu'on se retrouve dans le journal de la fameuse locataire et qu'on découvre donc sa véritable identité.  Et là, c'est la catastrophe!  Cette femme, à la fois trop parfaite et d'une bigoterie insupportable (mais présentée comme admirable!), est mariée à un complet salaud égocentrique.  Vraiment, j'en aurais pris un pour frapper l'autre.  D'ailleurs, tous les hommes de leur entourage sont des canailles à différents degrés.  Et le journal en question constitue les deux-tiers du roman!

Quand enfin l'on revient aux personnages du début, ce n'est pas mieux puisqu'on tombe dans le prêchi-prêcha religieux.  J'ai donc finalement passé les trois-quarts du roman à soupirer et à lever les yeux au ciel.

Seul point positif, cela m'a donné envie de retourner à la sœur d'Anne, Charlotte, et j'ai fait des fouilles archéologiques pour retrouver mon vieil exemplaire de Villette...


The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë, 1848, 528 p. Il y a au moins cinq ou six titres différents pour les traductions françaises!

11 juillet 2023

The Brethren (L'Engrenage)

Je me sers beaucoup de ma liseuse ces temps-ci, mais il faut bien de temps en temps retourner à ma PAL-papier avant que les livres ne commencent à sentir le moisi...  Et pourquoi pas un petit Grisham?  Je ne lis pas beaucoup de thrillers, mais de temps en temps cela fait changement.

Celui-ci est tout à fait dans la gamme grishamesque classique: les personnages principaux sont trois ex-juges emprisonnés pour diverses fraudes qui, du fond de leur prison floridienne, ont mis sur pied une entreprise de chantage par la poste avec la complicité de leur avocat véreux.  En parallèle, on suit la campagne d'un candidat aux primaires républicaines pistonné par la CIA.  Dans la première moitié du roman, on se demande bien comment ces deux trames vont se rejoindre!

Les personnages sont amusants mais peu sympathiques, donc le suspense ne tient pas au fait qu'on craigne pour leur vie.  On ne peut pas dire qu'on se tienne au bord de notre siège en se rongeant les ongles...  L'intérêt réside plutôt dans l'attente de voir comment vont s'imbriquer les engrenages de la machine élaborée par nos trois filous.  À part quelques petits détails un peu tirés par les cheveux, l'intrigue est assez bien ficelée et originale, et si ce n'est pas le meilleur roman de cet auteur, j'ai tout de même passé un excellent moment. 


The Brethren de John Grisham, 2000, 440 p.  Titre de la traduction française: L'Engrenage.

08 juillet 2023

Encabanée

Je ne sait quoi penser de ce court roman...  J'ai aimé la plume épurée de Gabrielle Filteau-Chiba, sa description des aléas du quotidien d'une femme vivant en solitaire dans une cabane mal chauffée en pleine forêt.  Tout ça est assez réaliste et, si j'ai bien compris, en bonne partie autobiographique.  C'est lorsque l'auteure plonge dans la fiction pure que j'ai décroché: cette rencontre avec un écoterroriste et la romance qui s'ensuit, provoquant chez l'héroïne une prise de conscience écologiste, m'a semblé non seulement peu plausible mais surtout complètement en contradiction avec les idées féministes prônées jusque-là.  Je ne lirai donc pas la suite de la trilogie car j'ai l'impression, d'après les quatrièmes de couverture des deux autres tomes, que cela continue dans la même veine.  


Encabanée de Gabrielle Filteau-Chiba, 2018, 89 p.

07 juillet 2023

Le rouge vif de la rhubarbe

 Mes raisons d'avoir choisi ce roman:
1) J'ai beaucoup aimé Rosa Candida de la même auteure;
2) J'adore la compote de rhubarbe.

J'ai grandement apprécié la première partie du roman.  Le décor, un petit village de pêcheurs en Islande, est bien planté. Les personnages sont sympathiques: l'adolescente handicapée, la vieille dame qui lui sert de grand-mère, l'homme à tout faire du village, etc.  L'intrigue s'annonce intéressante.

Malheureusement, tout se gâte en deuxième partie.  La trame devient décousue, on peine à en suivre le fil, à démêler l'imaginaire du réel.  Et surtout, l'ambiance devient glauque, avec ces apparitions répétitives d'animaux morts, en particulier des oiseaux marins.  J'imagine que cela se veut symbolique, mais je n'ai pas compris l'intention de l'auteure.

Conclusion: 
1) Lisez plutôt Rosa Candida;
2) J'ai envie de compote de rhubarbe.


Le rouge vif de la rhubarbe d'Audur Ava Olafsdottir, traduit de l'islandais, 2016, 157 p.  Titre original: Upphækkuð jörð (1998).

29 juin 2023

Clara lit Proust

J'ai bien failli ne pas accrocher du tout à ce roman!  Dans les premiers chapitres, j'ai retrouvé la même ambiance que dans La Liste de mes envies de Grégoire Delacourt, sauf qu'on se trouve dans un salon de coiffure au lieu d'une mercerie.  Or, je n'ai jamais compris tout le houpla qu'on a fait autour de ce livre-là, que j'ai trouvé franchement moyen.

C'est lorsqu'un client oublie son exemplaire de Du côté de chez Swann au salon de coiffure et qu'enfin «Clara lit Proust», qu'un déclic s'est produit et que mon intérêt a été décuplé. L'intrigue en elle-même reste assez classique: Clara mène une vie peu satisfaisante auprès d'un copain qu'elle ne désire plus et d'un chat qui l'ignore, et son travail est peu stimulant; sa vie sera changée par l'expérience de la lecture, par les nouvelles rencontres que celle-ci provoquera.  Le thème du pouvoir de la littérature de nous ouvrir l'esprit et le cœur, de nous faire comprendre qu'une autre vie est possible, est fort bien exploité ici, mais remplacez Proust par n'importe quelle autre forme d'art et vous pourrez constater que ce n'est quand même pas d'une grande originalité.

Non, ce que j'ai adoré, ici, ce sont les références à l’œuvre elle-même, les citations, les clins d’œil, les discussions entre passionnés de La Recherche.  On sent que l'auteur est fan de Proust, appréciant autant ses qualités que ses défauts et ses petites manies, et il sait parfaitement partager son amour.  Au point qu'il m'a donné envie de relire cette œuvre gigantesque (moi qui relit rarement), ou à tout le moins de me la procurer en version papier pour pouvoir la feuilleter, relire des passages au hasard (le feuilletage sur liseuse, c'est moins ça!).  

Je ne crois pas que je recommanderais ce roman à qui n'a pas lu au moins le tome 1 de La Recherche.  Parce que non seulement vous allez vous le faire divulgâcher mais en plus toutes les références vont vous passer dix pieds par-dessus la tête.  Mais qui sait?  Peut-être vous donnerait-t-il le petit coup de pied au derrière nécessaire pour vous lancer enfin?  À vous de voir.

Je vous laisse avec deux petites citations:

«Elle a lu quoi, douze pages, et elle sait déjà comment ça va marcher entre eux. À elle de s’accrocher, de continuer à avancer, souvent dans le brouillard, parfois dans le noir, de ne pas se formaliser de ses phrases à tiroir et de ses imparfaits du subjonctif, de se munir de patience et,s’il le faut, d’un dictionnaire.  À lui, en retour, à intervalles réguliers, chaque fois qu’elle s’y attend le moins, de l’éblouir. 

Plus elle le lit, mieux elle le comprend.  Il n’emploie pas de mots compliqués, c’est juste que ses phrases, souvent, vont
voir ailleurs. Une fois qu’elle le sait, qu’elle a compris qu’il ne l’abandonne pas mais reviendra la chercher, ça va tout seul.»

«Proust, ce n’est pas difficile, c’est différent.
Mais bon, il pourrait quand même aller à la ligne plus souvent.»


Clara lit Proust de Stéphane Carlier, 2022, 192 p.

26 juin 2023

Robinson Crusoe (Robinson Crusoé)

J'en ai déjà parlé ici, j'aime beaucoup les histoires de naufrages et d'îles désertes.  Elles font souvent ressortir le meilleur et le pire des humains (un peu comme les romans post-apocalyptiques, d'ailleurs!).  Sans oublier le dépaysement qu'elles occasionnent et qu'on savoure bien installé dans son fauteuil et ses pantoufles...

Ce n'était donc qu'une question de temps avant que je me décide à plonger dans le classique des classiques du naufrage, le mythe fondateur du genre: Robinson Crusoé de Daniel Defoe.  Je craignais un peu cette lecture, car on dit souvent que ce roman comporte beaucoup de longueur et un vocabulaire désuet, ayant été écrit au XVIIIe siècle.

En fait de vocabulaire, ce sont surtout les termes spécialisés de la marine qui m'ont donné du fil à retordre, surtout que je lisais la version originale!  Disons que le dictionnaire intégré à la liseuse m'a été fort utile.  Et s'il y a bien quelques longueurs et des passages un peu répétitifs, j'ai beaucoup apprécié les questionnements philosophiques et religieux du personnage, que j'ai trouvés assez modernes sous certains points de vue.  Il y a aussi des petites pointes humoristiques savoureuses.

J'ai par contre été très surprise que le personnage de Vendredi n'apparaisse que très tard dans l'histoire.   Cela m'a un peu déçue!  Je pense que j'avais certains a priori dus à Vendredi ou les limbes du Pacifique de Michel Tournier, lu il y a très longtemps et où, de mémoire, la relation Robinson/Vendredi était le sujet principal!  Autre surprise concernant Vendredi, ce n'est pas un noir comme je le croyais mais un autochtone des Caraïbes.

La fin du roman, qui s'éternise, m'a également désappointée.  Toutefois, malgré ces petits bémols, l'expérience reste très positive et j'en garderai un excellent souvenir!


Robinson Crusoe de Daniel Defoe, 1719, 288 p.  Titre de la traduction française: Robinson Crusoé.

09 juin 2023

A Mercy (Un don)

Oh là là!  Les premières pages de ce roman ont provoqué chez moi un flash-back post-traumatique! Je croyais être plongée de nouveau dans The Sound and the Fury (Le Bruit et la fureur) de William Faulkner, dans la partie où le narrateur est un déficient intellectuel... Expérience pénible s'il en fut!

Ouf!  Cela n'a duré que quelques pages, le reste est beaucoup plus intelligible, et l'on comprend que ce début est narré par une esclave africaine qui baragouine péniblement l'anglais, d'où le vocabulaire approximatif et les tournures de phrases bizarres.

Il reste néanmoins que le style de Toni Morrison demande un certain effort de la part du lecteur.  Cela n'est pas pour me déplaire.  Et le cadre du roman est original: on est en Nouvelle-Angleterre en 1690, il est question d'esclavage d'africains et d'autochtones, mais aussi de servage d'hommes et femmes blancs, d'épidémies, de puritanisme, de superstitions...  

Dommage que j'aie eu un peu de difficulté avec la structure du roman.  On change constamment de point de vue, d'un personnage à un autre.  Ce n'est pas inintéressant, mais cela m'a empêchée de m'attacher aux personnages autant que j'aurais voulu.  De plus après l'expérience incroyable vécue avec Beloved (le roman le plus connu de l'auteure), je m'attendais à plus d'intensité.  Je me dirigeais donc vers une déception, jusqu'au tout dernier chapitre... Et là, surprise!  J'ai absolument adoré cette fin, et j'ai poussé un grand soupir de contentement en tournant (virtuellement) la dernière page!


A Mercy de Toni Morrison, 2008, 176 p.  Titre de la traduction française: Un don.

07 juin 2023

The Invention of Solitude (L'Invention de la solitude)

Ce recueil comprends deux textes: Portrait of an Invisible Man, dans lequel Auster fait le portrait de son père peu de temps après sa mort, et The Book of Memory, où des récits autobiographiques s'entremêlent à des réflexions et des citations sur le thème de la mémoire.

La première partie est passionnante.  Auster a eu une relation difficile avec son père, et l'on comprend pourquoi.  Notamment, ce père était lui-même orphelin de père, ce dernier étant décédé de façon violente (je vous laisse découvrir cet épisode ahurissant!).  C'est très émouvant, entre autre parce qu'à travers tous les défauts de cet homme, Auster tente d'ajouter des points positifs, des qualités à ce portrait plutôt négatif.  

J'ai beaucoup moins apprécié la deuxième partie.  Certains passages sont très intéressants, surtout ceux sur les dernières semaines de son grand-père maternel ou encore les souvenirs de voyages à Paris et à Amsterdam.  Malheureusement, de nombreux passages très abstraits viennent alourdir la lecture et rendent l'ensemble très désordonné.

Coïncidence amusante, j'ai commencé à lire en parallèle Mémoires d'Outre-tombe de Chateaubriand (mon défi de lecture pour 2023) et plusieurs passages portent également sur le thème de la mémoire.  J'adore quand deux œuvres se répondent ainsi!


The Invention of Solitude de Paul Auster, 1982, 173 p.  Titre de la traduction française: L'Invention de la solitude.

29 mai 2023

Le Royaume immobile

Le Paris des Merveilles, tome 3

Quel délice de retrouver ce Paris enchanté imaginé par Pierre Pevel!  Et quel bonheur de retrouver ce beau couple que forment Griffont le mage et Isabel l'enchanteresse (surtout que cette dernière est beaucoup plus à l'avant-plan dans ce tome, jouant les héroïnes de film d'action!)

J'ai toutefois trouvé ce tome légèrement inférieur aux deux premiers.  Il y a beaucoup moins de petits clins d’œil à des personnages historiques, littéraires ou cinématographiques (Arsène Lupin, Méliès, Valentin des Brigades du Tigre, etc).  De plus, il me semble que quelques fils de l'intrigue restent en suspens (par exemple, les rencontres des clans de chats ailés, l'absence de Lord Dunsany au rendez-vous avec la Baronne).  

Par contre, il y a beaucoup d'action et on ne s'ennuie pas une seconde!  J'aurais pris quelques tomes de plus dans cette série (il y a bien quelques recueils de nouvelles, mais ils ne m'attirent pas, sachant que ce sont principalement des nouvelles écrites par d'autres auteurs...).


Le Royaume immobile (Le Paris des Merveilles, tome 3) de Pierre Pevel, 2015, 377 p.

27 mai 2023

Mes contes de Perrault

Ma première rencontre avec Tahar Ben Jelloun ne s'était pas bien déroulée.  J'ai tenté de lire La Nuit de l'erreur il y a quelques années et cela s'est soldé par un abandon, car ce n'était tout simplement pas le genre d'histoire que j'avais envie de lire à ce moment-là.  Toutefois, j'avais plutôt aimé sa plume et m'étais dit que je lui donnerais une deuxième chance un jour.  L'occasion s'est présentée lorsque ce recueil a été choisi pour le club de lecture du forum Livraddict (thème: réécriture de contes).

Comme l'auteur l'explique en avant-propos, il a voulu rendre un hommage aux contes de Perrault qu'il a lus à l'école en leur donnant une saveur arabe, genre «Mille et une nuits».

Je m'attendais à une transposition plus complète... Il y a bien quelques clins d’œil amusants (La petite à la burqa rouge!), mais dans la plupart des cas, seuls les noms des personnages ont une consonance arabe, pour le reste on ne sent pas tellement l'ambiance «Mille et une nuits». Il aurait fallu plus de descriptions d'éléments typiques (nourriture, architecture, habillement, etc).

Dans certains des contes, Ben Jelloun ajoute un message d'inclusion et d'égalité (par exemple, le Petit Poucet a les traits physiques d'un trisomique), mais dans d'autres, la misogynie traditionnelle n'est même pas dénoncée.  J'ai donc trouvé la démarche de l'auteur incohérente de ce point de vue là également.

Pour ne rien vous cacher, j'ai lu les deux derniers contes en diagonale, car il y avait sur ma liseuse un petit Steinbeck qui me faisait de l’œil...

Bref, c'est un deuxième rendez-vous raté, et ça risque d'en rester là! 


Mes contes de Perrault de Tahar Ben Jelloun, 2014, 291 p.

17 mai 2023

The Pearl (La Perle)

Quelle intensité dans ce très court roman!  Le genre où il faut se souvenir de respirer de temps en temps...  Surtout vers la fin, quel suspense! 

Un pêcheur de perles mexicain trouve une perle énorme et parfaite qui viendra bouleverser la vie de sa famille... Steinbeck dénonce la cupidité des hommes, l'hypocrisie des prêtres se rangeant du côté des puissants, l'exploitation de l'ignorance des petites gens.  Cela m'a beaucoup rappelé des pans de l'histoire du Québec, j'en rageais!

Et toujours, cette plume absolument magnifique!  La perle est transformée sous nos yeux en un objet maléfique qui m'a rappelé l'Anneau unique du Seigneur des anneaux (sachant que le roman de Tolkien est l'un de mes préférés à vie), c'est vous dire!


The Pearl de John Steinbeck, 1947, 96 p.  Titre de la traduction française: La Perle.

14 mai 2023

Quand viendra l'aube

Dans la même veine que Pour Mémoire, Dominique Fortier a rassemblé ici des petites vignettes, des images, des impressions de l'été passé au bord de la mer puis du début d'automne à Montréal, dans les mois qui ont suivi la mort de son père.

Il y a des passages magnifiques sur le deuil, l'écriture, et je ne me lasserai jamais de sa plume tout en délicatesse, mais il m'a tout de même manqué un fil rouge reliant tous ces fragments décousus.

Ce recueil est donc à lire comme on lit de la poésie, selon moi, sans nécessairement chercher à voir ce que représente le casse-tête une fois les morceaux assemblés.


Quand viendra l'aube de Dominique Fortier, 2022, 104 p.

12 mai 2023

Good Omens (De bons présages)

Un roman humoristique racontant l'alliance d'un ange et d'un démon tentant d'empêcher l'apocalypse, écrit par deux auteurs anglais que j'aime beaucoup?  Ça ne pouvait que me plaire, mais le danger de mettre la barre trop haute était bien réel...  Et c'est ce qui s'est produit, dans une certaines mesure...

En effet, si j'ai beaucoup apprécié l'humour et les nombreuses références, j'ai trouvé qu'il y avait quelques longueurs dans la première partie.  La grande quantité de personnages donne une intrigue un peu décousue, voire même confuse.  Il m'a semblé que certains auraient pu être éliminés ou combinés.  Quant aux notes comiques en bas de pages, un stratagème que j'apprécie en général, cela fonctionne mieux en version papier que sur la liseuse, où l'on doit constamment interrompre la lecture pour faire l'aller-retour (surtout que cette fonction n'est pas tout à fait au point sur ma Kobo). 

Cela dit, j'ai quand même bien aimé ce roman, en particulier certaines répliques vraiment hilarantes.  On reconnaît la touche de chacun des deux écrivains (les personnages de Death et des sorcières, clairement pratchettiens; les deux vilains démons qui annoncent les méchants Mr Croup et Mr Vandemar dans Neverwhere de Gaiman) et pourtant le ton de l'ensemble reste bien uniforme.  

À lire, donc, pour se bidonner, mais sans s'attendre à un chef-d’œuvre...


Good Omens de Terry Pratchett et Neil Gaiman, 1990, 404 p.  Titre de la traduction française: De bons présages.

30 avril 2023

Thérèse Desqueyroux

Quelle belle découverte que cet écrivain!  Je ne le connaissais que de nom, nous avons maintenant fait connaissance et nous nous reverrons bientôt (je possède un autre de ses romans, Le Nœud de vipères, trouvé en boîte à livres).

Embourbée dans un mariage arrangé depuis son enfance pour réunir deux propriétés adjacentes, Thérèse souffre d'un manque total de stimulation sentimentale, sexuelle mais surtout intellectuelle.  Sa grossesse et la naissance de sa fille ne lui apportent aucun bonheur.  Sombrant dans la dépression, elle commet l'irréparable, presque nonchalamment...  

J'ai été particulièrement épatée par l'ambiance que Mauriac arrive à établir tout au long de l’œuvre.  On étouffe dans cette relation malsaine entre Thérèse et son mari qu'elle a tenté d'empoisonner (je ne divulgâche rien, c'est dit dès le début).  On étouffe dans cette vieille maison de campagne sombre et humide alors que pourtant dehors le vent souffle dans la pinède en transportant des odeurs de champignons et de résine.  On étouffe dans cette famille, dans cette société où l'honneur et la tradition passent avant le bonheur individuel.

J'ai trouvé les thèmes abordés par Mauriac assez modernes, et la fin en particulier a su me surprendre!  Si la plume dans son ensemble m'a beaucoup plu, notamment son côté concret, faisant appel à tous nos sens, je déplore quelques termes un peu datés et qui m'ont fait tiquer -- j'ai noté par exemple l'expression «posséder une femme» (au sens sexuel) qui ne passe plus très bien de nos jours!  Mais c'était le vocabulaire en usage à l'époque, il faut faire avec! 

 

Thérèse Desqueyroux de François Mauriac, 1927, 184 p