30 septembre 2013

The Old Man and the Sea (Le Vieil Homme et la mer)

Un vrai tour de force!  Pendant la plus grande partie du roman, il n'y a qu'un vieil homme dans son bateau, et la mer. Et le soleil des Caraïbes, et des poissons et, brièvement, une mouette. Et pourtant on ne s'ennuie pas une seconde, on est rivé à notre fauteuil (ou chaise de balcon en résine de synthèse, dans mon cas) et on en veut plus encore!  En même temps, on est content d'être rendu à la fin, car la fin est formidable!  Je suis heureuse de ne pas avoir lu ce bouquin quand j'étais ado, car je ne l'aurais sans doute pas apprécié à sa juste valeur. Je crois qu'on l'impose aux jeunes américains en lecture scolaire, parce que prix Pulitzer, parce que prix Nobel, mais c'est une erreur, selon moi. 

Le seul moment où j'ai eu un petit malaise, c'est lorsque le vieil homme pêche un dauphin pour manger sa chair crue. Hein, mais c'est dégueulasse!  Heureusement j'ai rapidement compris qu'il ne s'agissait pas vraiment d'un dauphin mais de ce que les Américains appellent dolphin fish, c'est-à-dire tout simplement une dorade ou mahi-mahi.  Ouf!

On parle beaucoup ces temps-ci de «vieillir dans la dignité»... Ce roman devrait être une lecture obligatoire pour tous les gestionnaires de centres pour personnes âgées!

J'ai d'autres titres d'Hemingway sur ma LAL... Je crois qu'il pourrait bien devenir un de mes auteurs américains chouchous!


The Old Man and the Sea d'Ernest Hemingway, 1952, 140 p. Titre de la traduction française: Le Vieil Homme et la mer.

29 septembre 2013

Si tu passes la rivière

Ce sont les tentatrices Karine et Venise qui m'ont donné le goût de lire ce tout petit roman.  Et je les en remercie car j'ai beaucoup aimé!  La plume de Geneviève Damas est si maîtrisée qu'il est difficile de croire qu'il s'agit d'un premier roman (pas d'une première oeuvre toutefois, puisqu'elle a écrit plusieurs pièces de théâtre). 

Le principe de départ m'a rappelé celui de La Petite fille qui aimait trop les allumettes de Gaétan Soucy, bien que le style d'écriture soit différent. L'action se déroule principalement dans une ferme isolée, et on découvre peu à peu la situation et les secrets d'une famille à travers les yeux et les mots d'un adolescent naïf et inculte.  Depuis que sa soeur aînée a traversé la rivière pour ne plus revenir, cette rivière qui constitue la frontière à ne pas franchir, il vit avec ses frères et son père, trois brutes analphabètes, et n'a pour seul confident qu'un cochon. Je n'en dirai pas plus pour ne rien dévoiler car une bonne partie du plaisir est dans cette révélation progressive. Disons qu'il s'agit d'un roman d'apprentissage d'un genre inhabituel, tout à la fois touchant, intrigant, drôle, glauque, parfois même un peu épeurant!


Merci aux éditions Hamac pour l'envoi.


Si tu passes la rivière de Geneviève Damas, 2011 (réédité au Québec en 2013), 151 p.

26 septembre 2013

Une Année à la campagne

Dans ce récit autobiographique, Sue Hubbell raconte sa vie dans une ferme du Missouri.  Après son divorce, elle a décidé de reprendre seule l'entreprise d'apiculture qu'elle et son mari avaient démarrée.  Cette vie solitaire lui convient bien en général, lui permettant de se sentir intégrée à la nature magnifique qui l'environne. Les anecdotes sont regroupées par saison, d'où le titre, bien qu'en réalité elles s'étalent sur plus d'une année.  Mais elles sont si délicieuses, drôles, touchantes ou inspirantes que j'aurais bien fait une deuxième fois le tour du calendrier!

Biologiste de formation, elle truffe son histoire de détails scientifiques sur les différentes espèces d'animaux ou de plantes qu'elle observe avec émerveillement  sur sa terre,  sans que jamais ce soit lourd.  Par exemple sur les abeilles:
«Pendant la majeure partie de leur vie, les reines fuient la lumière; elles courent se cacher lorsqu'on ouvre la ruche. Mais la reine qui vient d'émerger est vierge et la lumière l'attire.  Encouragée par les ouvrières, elle sort de la ruche et s'envole haut dans les airs pour son vol nuptial.  Entourée de faux bourdons -- abeilles mâles -- elle va s'accoupler dix fois ou plus, par séries, s'assurant pour sa vie entière une provision de spermatozoïdes qu'elle utilisera pour féconder les oeufs qu'elle pondra. Pendant l'accouplement, le faux bourdon introduit son pénis dans la chambre de l'aiguillon de la reine, où il demeurera, tandis que lui-même se dégage et tombe sans vie sur le sol, sa fonction dans la colonie accomplie.»
Hé bien! On ne nous disait pas ça dans Petit Tom et son amie l'abeille, ma principale référence en matière d'apiculture jusqu'à maintenant.

On retrouve aussi beaucoup de faits amusants. Saviez-vous par exemple que le bruant à gorge blanche américain chante «Old Sam Peabody, Peabody, Peabody!»  Il ne cherche donc pas Frédéric comme son cousin québécois?  On ne fait pas que rire, par contre, puisqu'il y a aussi de nombreuses réflexions sur notre place dans la nature, sur la femme d'âge mûr, sur les gens, sur la vie en général.

La traduction française n'est pas trop mauvaise, je n'ai tiqué qu'une dizaine de fois, ce qui dans mon cas est un bon signe! Cependant, sur les dix fois, neuf ont été causées par des noms d'animaux, en particulier d'oiseaux.  Je sais qu'il n'y avait pas d'Internet dans ce temps-là, mais ç'aurait été trop compliqué d'emprunter un livre sur les oiseaux d'Amérique du Nord à la bibliothèque?  Je sais aussi que les nomenclatures ont changé récemment, mais je suis pas mal certaine que le bluebird n'a jamais répondu au nom d'«oiseau bleu», plutôt de merlebleu ou merle bleu. Quant au cowbird, qui semble avoir interloqué la traductrice, il s'agit tout simplement du vacher.

Tout au long de ma lecture, je voulais aller m'installer à la campagne et devenir apicultrice, jusqu'au chapitre où elle désensibilise son neveu aux piqûres d'abeilles, qui m'a fait quelque peu changer d'idée... Une seule piqure de guêpe m'a fait me gratter jusqu'au sang pendant trois semaines l'an dernier, alors je vais trouver autre chose. Peut-être la culture des champignons exotiques ou l'élevage des autruches, c'est très en vogue.


Une Année à la campagne de Sue Hubbell, traduit de l'américain, 1983, 249 p. Titre original: A Country Year.


21 septembre 2013

La Manière Barrow

Comment dire? Il me semble que je suis passée à côté de quelque chose.  C'était pourtant bien commencé! L'écriture est fort belle, et dès les premières pages on trouve une citation tirée de mon livre fétiche, Cyrano de Bergerac (Oui, quelquefois, je m'attendris, dans le soir bleu). La citation (comme les autres qui viendront par la suite) n'est identifiée qu'à la fin du volume, ce qui m'a plu: l'auteure fait confiance au lecteur, à sa culture.  Le sujet est original, un comédien sans emploi devient doubleur pour des publicités et des séries télévisées.  La relation avec son père malade est touchante, il y a de l'humour et un pitou!

Je n'arrive pas à mettre exactement le doigt sur le bobo, mais à partir du milieu j'ai décroché. Le personnage principal m'était antipathique, certains détails me semblaient invraisemblables...  J'ai trouvé très drôle le passage où il insère des citations de grands auteurs dans ses doublages, en un geste de rébellion, ou d'auto-sabotage.  Mais pour le reste, sans vraiment m'ennuyer je suis restée froide. Dommage!


La Manière Barrow d'Hélène Vachon, 2013, 176 p.


17 septembre 2013

La Patience des fantômes

Malgré une écriture que j'ai trouvée un peu froide, j'ai bien aimé cette saga qui raconte la vie de générations successives d'une famille en Gaspésie et dans le  Bas-du-Fleuve durant plus d'un siècle. Joachim, orphelin de père, parti de rien, qui exercera différents métiers avant de faire fortune, jusqu'au petit Joseph, né avec le XXIe siècle, pour qui tout est possible, en passant par Jérôme, que l'alcool rend si violent qu'il se demande si ce n'est pas lui-même qui a violé et assassiné cette petite amérindienne dont ses fils ont retrouvé le corps, on suit ces gens avec intérêt en se demandant, tout comme Richard l'écrivain de la troisième génération et le narrateur, si une malédiction ne les affecte pas... J'ai apprécié l'idée qu'une famille est comme une chaîne, avec ses maillons forts et ses maillons plus faibles.

Un roman sur la famille bien sûr, sur la mémoire, sur la transmission.  En même temps, un portrait du Québec rural, avec sa magnificence et sa laideur qui cohabitent souvent dans un même paysage.  Un récit qui demande un certain effort car les personnages sont nombreux et les pièces du casse-tête sont mélangées; mais cela en vaut la peine. Je ne connaissais pas Rachel Leclerc, je la relirai certainement avec plaisir!


La Patience des fantômes de Rachel Leclerc,  2011, 193 p. en version numérique.


16 septembre 2013

Le Passage obligé

Cela me fait beaucoup de peine de le dire (ou plutôt de l'écrire!), surtout durant une lecture commune autour de Michel Tremblay et dans le cadre de Québec en septembre, mais je n'ai pas trop aimé ce tome 4 de La Diaspora des Desrosiers. Pourtant j'avais adoré les trois premiers!

Entre les atermoiements et tergiversations de la mère (que j'ai trouvée presque antipathique!) et la fin de vie douloureuse de la grand-mère, tout est sombre et lugubre. Dans les tomes précédents, les passages plus mélancoliques étaient allégés par une touche d'humour, notamment dans les dialogues en joual. Je n'ai pas retrouvé ces petites étincelles ici, ou très peu.

J'ai aussi trouvé agaçante la construction du récit, qui manque d'unité. On passe constamment de la Saskatchewan à Montréal, et l'on est sans arrêt interrompu par les contes de Josaphat-le-violon (eux-mêmes plutôt tristes), lus par Nana.

Ceux qui ont lu la série, avez-vous ressenti la même chose que moi? Est-ce que le tome 5 sera meilleur? Est-ce que ce Passage obligé n'était que cela, un passage obligé?  Au moins, ce qu'on apprend dans l'épilogue m'a donné le goût de continuer!


Participants à cette lecture commune:
Karine a lu Thérèse et Pierrette à l'école des Saints-Anges
Claudialucia a lu L'Homme qui entendait siffler une bouilloire
Aifelle a lu Bonbons assortis
Cryssilda a lu C't'à ton tour, Laura Cadieux
Jainaxf a lu La grosse femme d'à côté est enceinte ainsi que Yueyin et Denis
Chimère a lu Quarante-quatre minutes, quarante-quatre secondes


Le Passage obligé (La Diaspora des Desrosiers, tome 4) de Michel Tremblay, 2010, 247 p. 


05 septembre 2013

Legends of the Fall (Légendes d'automne)

Pas tout-à-fait des romans, mais plus que des nouvelles, par quel terme pourrait-on désigner ce que les anglophones nomment «novelettes»?  Peu importe, ces trois courtes histoires d'environ quatre-vingt-dix pages chacune sont tout à fait magnifiques.

J'ai particulièrement aimé la voix très masculine de Jim Harrison.  Ses personnages mâles sont très forts, même lorsqu'ils cherchent leur place dans le monde et prennent leur vie entière à la trouver.  Et à travers toute cette testostérone, ces bagarres, ces vengeances, ces grands espaces, surgit soudainement un petit détail, une attention presque féminine à la poésie du quotidien: un chat errant caché sous un buisson en ressort avec quelques pétales accrochés au pelage...

J'ai vu peu après sa sortie le film qui a été tiré de la nouvelle éponyme; je ne sais pas si c'est ma mémoire qui fait défaut (pas de ricanements, s'il-vous-plaît!),  mais j'aurais pu ne pas faire le rapprochement tellement l'histoire m'a semblé différente (évidemment avec la face de Brad Pitt en gros plan sur la couverture, c'est dur à manquer). Dans le film, il me semble que tout tournait autour du triangle amoureux Tristan-Susannah-Alfred, alors qu'ici ce n'est qu'un des aspects de l'intrigue, même pas le plus important.

Dire que j'ai longtemps repoussé cette lecture sous le prétexte idiot que je n'aime pas trop les nouvelles!  C'est une lecture commune du Forum du Guide de la bonne lecture qui m'a donné le coup de pied au derrière nécessaire. Je n'attendrai pas trop avant de retrouver cet écrivain; quelqu'un a d'autres titres à me suggérer?


Legends of the Fall de Jim Harrison, 1978, 276 p.  Titre de la traduction française: Légendes d'automne.

03 septembre 2013

Livres québécois remarquables du XXe siècle

Ayant reçu ce livre grâce à l'Opération Masse critique de Babelio à la mi-mai, théoriquement j'aurais dû publier ce billet dans les 30 jours suivants...  Mais il est arrivé à un moment où franchement je ne l'attendais plus et où j'avais pris d'autres engagements livresques: Blogoclub, lectures communes, etc. Tant qu'à être en retard, je me suis dit qu'il valait mieux attendre le début de l'édition 2013 de Québec en septembre pour vous le présenter.  Le délai sera donc compensé par une visibilité accrue, et tout le monde y trouvera son compte, enfin je l'espère.

Trêve de palabres, passons à l'objet lui-même.  Première surprise, il est plus gros que ce à quoi je m'attendais. Il s'agit d'un album magnifiquement illustré présentant vingt livres qui ont marqué l'histoire de l'édition québécoise, dans certains cas par leur contenu, plus souvent par leur aspect visuel, par les techniques et matériaux utilisés ou encore parce qu'il s'agissait d'un genre inusité par ici. J'ai beaucoup apprécié cette lecture. Certains chapitres, chacun rédigé par un spécialiste différent,  m'ont rappelé des souvenirs (la Flore laurentienne du Frère Marie-Victorin que j'avais feuilleté enfant sans en comprendre l'importance, l'engouement que j'avais éprouvé à l'adolescence pour la poésie de Nelligan et de Saint-Denys Garneau), d'autres m'ont remis en mémoire des faits historiques dont on n'entend plus si souvent parler (l'Affaire Coffin) ou m'ont appris des trucs amusants (les rues Henri-Julien dans Villeray  et L-O David dans Saint-Michel, près desquelles j'ai déjà habité, sont nommées respectivement en l'honneur d'un illustrateur et d'un journaliste et historien).

N'est-ce pas un choix tout à fait approprié pour inaugurer ce mois aux couleurs du fleurdelysé?


Merci à Babelio et aux Presses de l'Université du Québec pour l'envoi. 


Livres québécois remarquables du XXe siècle, sous la direction de Claude Corbo, 2012, 324 p.