Je n'ai jamais lu Philip K. Dick, mais j'ai apprécié quelques-uns des films tirés de ses romans ou nouvelles (
Blade Runner,
Minority Report). Le club de lecture de juillet du forum Livraddict était l'occasion parfaite de découvrir cet écrivain considéré comme un classique de la science-fiction et ce roman souvent cité en exemple quand il est question d'uchronie.
Première constatation: le style de Dick est plutôt froid. On passe d'un personnage à l'autre sans s'y attacher. L'intérêt du roman réside donc ailleurs: c'est un exercice purement intellectuel. L'auteur nous fait découvrir peu à peu un univers où les Alliés ont perdu la Seconde Guerre mondiale et où Allemands et Japonais se sont divisé le monde, et en particulier les États-Unis. À nous de découvrir tous les changements que cela a occasionné et d'identifier le point de rupture avec la vraie histoire. Certains passages, de plus, sont en mode «courant de conscience» (on suit les pensées d'un
personnage telles qu'elles se présentent) et les tournures de phrases sont déformées par l'influence de la langue japonaise, deux aspects intéressants mais qui demandent de l'attention et de la concentration.
En gros, j'ai plutôt apprécié ce roman. Notamment, il fait ressortir à quel point l'histoire est racontée par les vainqueurs. On entend donc peu parler
des camps de concentration, mais les bombardements alliés qui ont rasé
certaines villes européennes, faisant des milliers de victimes civiles,
sont mentionnés. Alors que bien sûr dans notre réalité, c'est l'inverse! (À ce sujet, lire le passionnant Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle de Geert Mak. Je n'ai jamais rien lu d'aussi frappant sur les bombardements en Europe.) À un moment donné, on se croit même dans un thriller ou un roman d'espionnage, c'est palpitant, alors que dans le reste du roman, le rythme est lent. La fin est intrigante et j'ai hâte d'en discuter avec les autres participants du club de lecture.
Ce qui m'a laissée perplexe, c'est l'aspect temporel de l'intrigue, qui se déroule une quinzaine d'années après la guerre. Autant de changements en si peu de temps? Que ce soit au point de vue technologique (colonisation de la Lune et de Mars) ou sociologique (déformation de la langue, nouvelle religion, racisme considéré comme normal), tout ça m'a semblé dur à avaler, pour être honnête.
Bref, j'ai trouvé cette lecture assez prenante mais je ne suis pas sûre que je relirai cet auteur... à moins que ce ne soit à l'occasion d'un autre club de lecture!
(La couverture de cette édition numérique m'apprend que cette histoire a fait l'objet d'une série télévisée, quelqu'un l'a vue?)
The Man in the High Castle de Philip K. Dick, 1962, 229 p. Titre de la traduction française: Le Maître du Haut Château.