Et maintenant? C'est l'inverse! Nous prenons nos vacances en juillet, les enfants et leurs professeurs ont congé de juin à août, la télévision ne diffuse que des reprises, même la construction s'arrête pendant deux semaines!
C'est le constat que fait Bernard Arcand dans cet essai drôle et intéressant. En première partie, il nous dresse la liste des inconvénients de l'hiver, réels ou imaginaires. Puis dans le deuxième chapitre, il démontre que notre mode de vie est organisé comme si l'hiver n'existait pas, comme si nous l'avions vaincu. Enfin en dernière partie il nous expose sa solution.
Cette section est la moins intéressante selon moi, car l'auteur a un peu trop poussé mémère dans les orties. Il est utopique de penser que notre société pourrait se mettre au point mort pendant deux mois, en janvier et février, au point qu'on n'aurait même pas à déblayer la plupart des routes! Sans pousser le bouchon aussi loin, on pourrait imaginer ce que la vie serait si les écoles étaient fermées l'hiver, si plus de travailleurs y prenaient alors leurs vacances... (Je le fais souvent, c'est une pure volupté que de se recroqueviller sur le divan avec un bon livre et une tasse de thé fumant lorsque la tempête fait rage!). Imaginez déjà la circulation et le déblaiement beaucoup plus facile. La conduite après une tempête serait beaucoup moins stressante s'il n'y avait que la moitié des voitures sur la route à l'heure de pointe, non? Surtout que j'ai remarqué depuis quelques années que les gens sont de plus en plus nerveux et impatients dans ces situations, je ne sais trop comment l'expliquer. En décembre, le lendemain de la première grosse tempête de la saison, il y a même un type qui a foncé sur un autre avec son véhicule à la suite d'une altercation, le blessant mortellement!
Bref, malgré une dernière partie plus faible, un essai fort intéressant et qui est l'occasion de nous questionner sur notre propre rapport à cette saison mal aimée!
Extrait:
«Pendant cinq mois il faut se méfier également des accidents. Glisser d'un toît qu'on déglace. Perdre pied sur un trottoir et se fracturer un os. Connaître l'infarctus qui suit une séance de pelletage déraisonnable; l'infarctus du citoyen moyen, grassouillet, fumeur au taux de cholestérol élevé ou diabétique inconscient, qui, devant tant de neige, pique une sainte colère, puis s'éteint et monte au ciel. Être frappé par un camion de déneigement conduit par un chauffard. Être décapité par un câble d'acier au cours d'une promenade en motoneige. Culbuter sur la piste de descente quasi olympique du mont Sainte-Anne. Être englouti sous la glace trop mince d'un lac. Se lancer dans l'escalade d'un glacier escarpé. Jouer au hockey. Se faire happer par une souffleuse. Être kidnappé par le Yéti. Recevoir sur la tête un bloc de glace qui tombe du toit. Voir son pare-brise fracassé par un autre bloc qui se détache, sur la route, du camion qui vous précède. Recevoir une boule de neige derrière la tête. Un glaçon en plein cœur. Être aveuglé par la neige. Ne plus pouvoir détacher sa langue d'un barreau de métal. Se couvrir de ridicule en essayant de construire un igloo.
L'hiver est la saison de toutes les misères.»
Le billet d'Allie.
Abolissons l'hiver! de Bernard Arcand, 1999, 110 p.