25 juillet 2020

Civilizations

Quelle délicieuse uchronie!

Laurent Binet imagine ici que des Vikings ont découvert l'Amérique plusieurs siècles avant Christophe Colomb, apportant aux peuplades locales des chevaux, des anticorps et leur apprenant à utiliser le fer.  Du coup, les Espagnols ne conquirent pas le continent et ce sont plutôt les Incas qui firent le voyage inverse...

Petit avertissement, la première partie est écrite dans le genre d'une saga scandinave, donc dans un style assez froid, sans dialogue, ce qui peut rebuter le lecteur.  Heureusement cette partie est assez courte et ne sert qu'à établir les bases de l'uchronie.  Ensuite on plonge dans le journal de bord de Christophe Colomb et c'est déjà beaucoup mieux.  Mais c'est dans la troisième partie, qui raconte les aventures d'un groupe d'Incas qui devront s'exiler, que cela devient vraiment savoureux, surtout à partir de leur arrivée en Europe.  En effet, leur incompréhension des mœurs et coutumes locales donnent lieu à des observations très amusantes.  On peut noter un un certain essoufflement vers la fin de cette section mais c'est quand même très réussi.

Un petit extrait pour vous mettre dans l'ambiance:

[Les Protestants] étaient obsédés par la question de l’endroit où ils iraient après leur mort, et du meilleur moyen d’être sauvés, c’est-à-dire d’aller au ciel rejoindre leur dieu cloué (qui pourtant devait revenir sur terre à une date indéterminée, si bien que Chalco Chimac pensait qu’ils risquaient de se croiser) et non sous la terre où l’on brûlait les morts indéfiniment, sauf dans un endroit transitoire d’où l’on pouvait sortir au bout d’un certain temps, mais sûrement pas en rachetant son séjour, de son vivant, avec des florins.

En complément de programme, la quatrième partie fait un petit clin d’œil à différents écrivains et artistes de la Renaissance.

Comme c'est souvent le cas dans les uchronies, il vaut mieux avoir une certaine connaissance préalable de la période concernée, ou à tout le moins l'envie de se renseigner au fur et à mesure (bonjour, Wikipédia!).  Vraiment, une très jolie découverte, d'un auteur que je ne connaissais pas du tout!


Civilizations de Laurent Binet, 2019, 243 p.

15 juillet 2020

The Wind Through the Keyhole (La Clé des vents)

The Dark Tower (La Tour sombre), tome 4.5


Quel plaisir de retrouver les personnages et l'univers de la formidable saga Dark Tower!  En effet, plusieurs années après la parution du tome qui clôt la série, Stephen King nous offre ce petit roman à tiroirs (une histoire dans une histoire dans une histoire) dont l'intrigue se situe chronologiquement entre les tomes 4 et 5, d'où l'appellation de 4.5.  On aurait pu tout autant le désigner «hors-série» puisqu'il n'aura aucun impact sur la suite...  

Le groupe ayant été forcé de s'abriter de la tempête dans une maison abandonnée, Roland leur raconte au coin du feu une de ses aventures de jeunesse, au cours de laquelle il rencontra un petit garçon auquel il raconta une légende que sa mère lui contait quand il était enfant.

Si j'ai été déçue que finalement on délaisse assez rapidement le groupe, j'ai pris énormément de plaisir à lire ces histoires imbriquées les unes dans les autres, remplies de références à la série et même à d'autres œuvres (un lion nommé Aslan...) et qui apportent un nouvel éclairage sur le passé de Roland.  Bon, en fait, j'avoue tout, c'est surtout Oye le billy-bumbler que j'avais hâte de retrouver, il est tellement chou!  Imaginez un mélange entre un raton-laveur, un chien et un perroquet...  Or, mini-divulgâcheur, il y a six billy-bumblers tout mignons dans le conte!


The Wind Through the Keyhole (The Dark Tower, tome 4.5) de Stephen King, 2012, 254 p.  Titre de la traduction française: La Clé des vents.

10 juillet 2020

Paris

Petite déception...  Le plus récent roman d'Edward Rutherfurd n'est pas mauvais, mais il est loin d'être au même niveau que ses précédents...  Et ce, pour deux raisons.

1) Il faut d'abord savoir que les autres romans de cet auteur sont tous construits de la même façon:  on suit les descendants de différentes familles sur une très longue période, toujours dans un même lieu.  On voit donc une société se bâtir sous nos yeux, ce qui est fascinant.  Ici toutefois, on ne remonte pas très loin dans le temps, seulement à l'époque de Henri IV, et non jusqu'aux Gaulois comme je l'espérais, et on se concentre surtout sur la période 1870-1945.  Or c'est une période qui a déjà été beaucoup exploitée en littérature...

2)  Au lieu de procéder de façon chronologique comme d'habitude, Rutherfurd décide de changer sa recette et de mêler les époques.  Malheureusement, on n'a plus cette impression d'évolution que je décrivais ci-dessus, et on s'y perd même un peu parmi les générations des différentes familles.  Il y a bien un arbre généalogique au début, mais impossible de le consulter sans divulgâcher l'intrigue, puisque celle-ci repose souvent en bonne partie sur des histoires amoureuses (qui va épouser qui, etc).

Cela dit, on ne s'ennuie pas, on rencontre des personnages historiques intéressants (Hemingway, Monet, Richelieu) et il y a même un certain suspense par moments.  J'ai même versé une petite larmette à la fin!  Mais ce n'est certainement pas ce titre que je recommanderais à qui voudrait découvrir cet écrivain (essayez plutôt London, mon préféré).


Paris d'Edward Rutherfurd, 2013, 809 p.  Non traduit.