22 juillet 2013

La Survivance

Quel magnifique roman!  Il m'a rappelé Le Mur invisible de Marlen Haushofer:  même combat pour apprendre à survivre dans l'isolement, et je dirais même presque la même ambiance de fin du monde.  Sauf qu'ici, on n'est pas du tout dans la science-fiction; j'ai même cru un temps qu'il s'agissait d'une histoire vécue, mais quelques événements sont décrits dont je n'ai pas trouvé mention sur le Web (par exemple, le musée de Colmar en Alsace ne semble pas avoir été anéanti par un incendie, emportant avec lui le célèbre retable d'Issenheim de Mathias Grünewald).  Autres différences, c'est un couple, et non une femme seule, qui se retrouve à passer un an dans une masure en ruines, et cet isolement est volontaire.  Solitude, vieillesse, fin d'un monde sont des thèmes abordés, mais aussi tendresse, beauté de la nature.  Et surtout l'importance de la littérature, et sa possible disparition...  Vous l'avez deviné, ce n'est pas un roman gai, il faut donc bien choisir le moment de le lire.  Mais c'est un roman fort, très fort.  Je sens que ces deux personnages, Sils et Jenny, seront avec moi pour un bon moment.

Le billet de Jules (rassure-toi, Jules, je n'ai pas saisi moi non plus toutes les références littéraires, mais heureusement cela n'a pas gâché mon plaisir!) et de Midola (dont l'expérience se rapproche de celle de Jules).  L'avis de Keisha est proche du mien, tout comme celui de Cathulu.

Quelques extraits:

«Quand il parlait de «cargaison» à sauver, j'avais l'impression qu'il se prenait pour un Noé galactique.  Que nous étions dans une sorte d'arche en compagnie des restes périmés, devenus incongrus, d'une civilisation de l'écrit, tandis qu'autour de nous montait l'eau d'innombrables écrans plasma et autres inventions, annonçant un monde fabuleux, bien plus fort que l'ancien.  Encore plus destructeur.  Encore plus dangereux.»

«Dommage qu'on n'ait pas eu d'alcool, j'en boirais bien.  Du bon cognac, de l'armagnac.  Pourquoi on n'a pas d'armagnac?  Quand je lis Hemingway, je vois qu'on y boit toujours.  Il n'y a pas un chapitre où on ne boit pas de l'absinthe, du whisky ou des vins italiens que je ne connais pas. 

Moi je traînais, deux paires de chaussettes enfilées sur des caleçons longs, un pantalon par dessus, plus une vieille jupe Comme Des Garçons,  enroulée en portefeuille, et ainsi paquetée, je brossais Avanie, j'égalisais aux ciseaux sa crinière, je taillais ses sabots, les limais à la râpe, et la rebrossais encore, serrant son cou dans mes bras.  Tu t'es vue, m'a dit Sils, on dirait la Comtesse de Ségur avec son âne.  Pourquoi tu n'écris pas ses Mémoires?»

La Survivance de Claudie Hunzinger, 2012, 278 p. (160 p. en version numérique).

12 commentaires:

  1. Le livre qui m'a fait sentir inculte! :o) Une belle plume, mais un sujet un peu ennuyant pour moi... Beaucoup aimé pour la nature décrite, pas plus!

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    1. Si toi et moi pouvons être qualifiées d'incultes parce que nous ne connaissons pas Antonin Artaud, que pourrait-on dire de la moyenne de la population québécoise?
      ;-)
      Tu as lu le livre de Marlen Haushofer dont je parle ci-dessus? Je crois que ça pourrait te plaire. Ne te laisses pas décourager par le petit côté science-fiction, dans le fond ce n'est que pour expliquer le fait que l'héroïne se retrouve coupée du monde. En fait 99% du roman n'est pas du tout de la SF...

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  2. ah oui, tu me connais! Moi et la SF ça ne colle pas! :) je note, mais avec plus de 275 livres à lire chez moi, je ne sais pas si je m'y pencherai un jour...

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    1. 275! :-o Et moi qui commence à paniquer dès que ma pile dépasse la vingtaine... Bon, alors peut-être un jour quand tu seras une petite vieille rabougrie!
      ;-)

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  3. Comme toujours, tu donnes envie ! :)
    C'est une jument cette Avanie ?

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  4. J'ai en effet aimé cette lecture mais j'ai été gênée par toutes les références que je ne connaissais absolument pas. J'ai vraiment eu l'impression d'être totalement ignare !

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    1. Ton expérience rejoint vraiment celle de Jules! ;-)

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  5. Bah, les français sont tout aussi lacunaires en matière de littérature canadienne et/ou québécoise!:)Alors, faut pas s'en faire et profiter de cette magnifique écriture!:)

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  6. Je viens de le finir et je l'ai trouvé réellement intéressant surtout par rapport aux thèmes abordés qui sont vraiment d'actualité.
    C'est un livre qui fait réfléchir quoi! Même si je suis d'accord qu'au niveau des références ce n'est pas toujours ça pour moi^^.

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    1. C'est vrai, en se retirant de la société cela lui donne un regard différent sur celle-ci! Sur la culture, sur l'avenir du livre, sur l'hyperconsommation...

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