Quel livre frustrant! Je n'ai pas souvenir d'avoir autant pesté contre un roman, à part peut-être lors de quelques lectures obligatoires à l'école. Et encore.
Les deux premiers chapitres (donc un peu plus de la moitié du bouquin) sont un charabia incompréhensible. La première partie est narrée par un handicapé intellectuel et on n'a donc que sa vision déformée de la situation. C'est à peine si l'on arrive à saisir quelques bribes. En plus, on se promène dans le temps et il y a une foule de personnages, si bien qu'on est incapable de comprendre qui est qui par rapport à qui. Il y en a même un qui est parfois un garçon, parfois une fille! J'aime généralement les livres où le lecteur doit fournir un certain effort, mais encore faut-il que l'auteur nous en donne les moyens! Je pense à La Petite Fille qui aimait trop les allumettes de Gaétan Soucy, qui est un parfait exemple de ce procédé.
La deuxième partie est contée par le frère de l'handicapé, étudiant à Harvard. On pousse un soupir de soulagement, on pense qu'on va enfin voir la lumière au bout du tunnel... Mais non, c'est presque pire! Car Faulkner utilise la technique du «courant de conscience», où les pensées du narrateur se suivent apparemment pêle-mêle, sans organisation, en phrases souvent incomplètes. Albert Cohen, notamment, utilise ce procédé dans Belle du Seigneur, mais il le fait alterner avec une narration conventionnelle qui donne le contexte nécessaire. Ici, on saute du coq à l'âne, on tourne en rond... Après quelques pages déjà je n'en pouvais plus, et tout le chapitre est comme cela! Si ce livre n'était pas une lecture commune avec les copains du forum de la Bonne Lecture, j'aurais abandonné. Mais quand d'autres se le sont tapé jusqu'au bout, c'est gênant...
Lorsqu'on arrive enfin dans la deuxième moitié où enfin on nous donne enfin quelques clefs de décryptage (est-ce que j'ai dit enfin?), le plaisir que l'on ressent n'est pas assez grand pour contrebalancer le désagrément qu'on a eu à se rendre jusque là. Je pense qu'on est censé reprendre les deux premières parties pour les déchiffrer à l'aide de ce qu'on a appris, mais honnêtement, qui a ce courage? J'ai vraiment trop hâte de passer (enfin!) à autre chose!
The Sound and the Fury de William Faulkner, 1929, 234 p. en version numérique, incluant les appendices. Titre de la traduction française: Le Bruit et la fureur.
Aie aie aie, il m'attend dans ma PAL depuis plusieurs mois (qui a dit "année" ?) justement parce que je crains le style ! Tu ne m'encourages pas :-)
RépondreEffacerRemarque, je suis tout de même contente de l'avoir lue, ça manquait à ma culture et je suis assez fière d'être passée au travers!
EffacerQuel livre merdeux, on dirait ! Mais quelle analyse superbe tu en fais, avec ces références bien senties et fort à propos à Soucy, mais aussi à Faulkner et à Cohen, où tu compares les techniques de narration de chacun. Bravo!
RépondreEffacerJe n'irais peut-être pas aussi loin (!) mais je ne suis pas surprise que bon nombre de lecteurs abandonnent rapidement. Ce qui est dommage, c'est qu'avec juste un peu plus d'indices dans la premières moitié, je pense que j'aurais pu adorer ce roman! Merci du compliment!
EffacerLu il y a plusieurs années (en VF) et je pense que tu as tout à fait rendu mon souvenir ;)
RépondreEffacerJ'en profite pour te souhaiter une bonne année car je crois ne pas l'avoir encore fait !
Pour une fois on est du même avis! :-D
EffacerBonne année toi aussi!
Je me suis fait cette réflexion et je ne sais pas s'il faut s'inquiéter ;) En tout cas, je n'ai jamais retenté Faulkner depuis, d'autant plus que la littérature sudiste n'est finalement pas ma tasse de thé.
EffacerAh? Sans être une grande connaisseuse, j'aime plutôt, en général...
EffacerTu vois, on ne pouvait pas être du même avis trop longtemps ;)
EffacerJe ne suis pas une grande connaisseuse non plus mais mes expériences en la matière vont toutes dans le même sens : pas mon truc.
L'ordre de l'Univers est rétabli! ;-)
EffacerComme toi j'avais été déstabilisé à la lecture de ce roman il y a quelques années (http://meslectures.wordpress.com/2008/01/18/le-bruit-et-la-fureur-william-faulkner/). Je l'avais trouvé d'un abord très difficile. Mais j'ai eu pas mal de commentaires et d'échanges intéressants sur mon blog qui m'ont donné envie de continuer avec Faulkner. J'ai depuis lu Lumière d'août (plus accessible) et un recueil de nouvelles dont je vais parler prochainement.
RépondreEffacerNous avons aussi eu d'intéressants échanges sur le forum de la Bonne Lecture, où il avait été choisi lecture commune. Je n'ai donc pas regretté de l'avoir lu. Cependant j'ai bien l'impression que cela va s'arrêter là entre Faulkner et moi!
Effacer