30 août 2025

Jamaica Inn (L'Auberge de la Jamaïque)

Première surprise:  ça ne se déroule pas en Jamaïque!

Et donc, au lieu de me retrouver dans l'ambiance paradisiaque d'une île des Caraïbes, me voilà téléportée dans les landes froides et brumeuses de la Cornouailles.  Après l'Indochine étouffante de Duras*, ça fait un choc!

Ensuite, une constatation: on est dans la lignée des sœurs Brontë, mais en plus facile à lire!

J'ai vraiment adoré la plume de Daphne du Maurier, que je découvrais par le fait même.  Oh! bien sûr je la connaissais de nom, son Rebecca est très célèbre (trop même, on dirait que je connais déjà l'histoire sans l'avoir lu!) et l'une de ses nouvelles a inspiré Hitchcock pour The Birds.  

J'ai été épatée par la modernité de son héroïne, qui est une jeune femme forte de caractère et indépendante.  Elle envisage de ne pas se marier, ne pas avoir d'enfants, elle n'a pas froid aux yeux malgré toutes les péripéties qui lui arrivent...  Bon il y a bien un petit passage qui m'a déçue: elle arrive pour la première fois chez un célibataire endurci, sa maison est une vraie soue à cochon, elle se met à faire le ménage, et le dîner en prime!  Mais pour un roman publié en 1940, c'est quand même bien, passons-lui ce petit moment de faiblesse. 

Bref, ce ne sera pas ma dernière lecture dans sa bibliographie.  Dans ma ligne de mire: Ma Cousine Rachel


*Les billets ne sont pas publiés dans l'ordre où j'ai lu les romans. 

 

Jamaica Inn de Daphne du Maurier, 1941, 320 p.  Titre de la traduction française: L'Auberge de la Jamaïque.

28 août 2025

Les Guerriers de l'hiver

Les amis, je passe aux aveux.  Moi qui me targue de posséder d’assez bonnes bases en Histoire, je n’avais jamais entendu parler de cet épisode incroyable que fut la tentative d’invasion de la Finlande, un pays neutre, par la Russie, au tout début de la Deuxième Guerre mondiale.

Je ne vous en dis pas plus sur les événements racontés dans le roman d’Olivier Norek.  Quand on n’en connaît pas le dénouement, cette histoire se lit comme un thriller!  Pourtant, tous les faits sont véridiques, tous les personnages ont vraiment existé.   Et justement, les personnages sont ce qui font l’originalité du roman, puisqu’ils semblent plus grands que nature, en particulier le jeune Simo Häyhä, tireur d’élite à l'habileté presque surhumaine, et le chef de sa compagnie, le lieutenant Juutilainen, un ivrogne complètement barjo mais dont les tactiques de guérilla permirent aux Finlandais de résister plus longtemps que prévu à un ennemi aux forces immensément supérieures.

Un autre aspect intéressant est qu’on assiste au déroulement des opérations non seulement du côté des Finlandais mais aussi de celui des Russes.  On a donc les deux côtés de la médaille!

J’ai lu ce livre parce qu’il est en nomination pour le Prix Livraddict dans la catégorie Historique… Laissez-moi vous dire que les autres candidats auront fort à faire pour gagner mon vote!


Les Guerriers de l'hiver d'Olivier Norek, 2024, 424 p. 

16 août 2025

V13

Oh là là!  On a frôlé l'abandon, les amis!

Pas que ce livre soit mauvais, bien au contraire.   

Il s'agit d'un recueil des chroniques hebdomadaires qu'Emmanuel Carrère a écrites pour la revue L'Obs durant le procès des terroristes ayant participé aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Pour ceux qui s'interrogent sur le titre, ce 13 novembre était un vendredi, V13 est donc devenu le «nom de code» du procès.

Or, je croyais qu'on aurait surtout les réflexions de Carrère lui-même...  Mais dans la première partie, il transcrit textuellement de longs passages des témoignages des survivants ou des familles endeuillées.  C'est très touchant, mais l'accumulation de détails scabreux ou tragiques fait que cela devient pénible à lire, on a l'impression d'étouffer! 

J'ai donc ressorti le Zweig (Souvenirs et rencontres) que j'avais délaissé, trouvant un peu ennuyant (pardon, Stefan) le passage où j'étais rendue.  Ennuyant, c'est en plein ce qu'il me fallait dans les circonstances!  J'ai pu continuer les deux livres en parallèle, c'était parfait.

Heureusement, dans les parties suivantes, l'on suit la reconstitution des faits par les experts, l'interrogatoire des accusés, les plaidoiries, etc.  C'est beaucoup plus factuel, et donc beaucoup plus facile à lire.  L'auteur décrit également la relation de camaraderie, voire même d'amitié, qu'il a pu développer avec plusieurs personnes (journalistes, victimes) qui suivaient régulièrement le procès tout comme lui. Carrère étant Carrère, il arrive même à y glisser des touches d'humour de temps en temps!  Il présente également des réflexions intéressantes sur la justice, le deuil et plusieurs autres sujets.

J'ai trouvé cette lecture absolument fascinante!  Il faut juste s'attendre à passer un sale moment au début (ou lire les chroniques dans le désordre? À vous de voir!).    


V13 d'Emmanuel Carrère, 2022, 368 p. 

03 août 2025

Un barrage contre le Pacifique

Mon premier contact avec Marguerite Duras remonte à mon adolescence.  À l'école, on avait eu l'idée, mal inspirée selon moi, de nous faire lire à l'âge de 15-16 ans son roman L'Amant.  Je n'avais pas tellement apprécié-- en fait, je n'avais probablement pas tout compris -- et je suis restée toutes ces années avec l'idée que je n'aimais pas Duras.  

J'ai eu l'idée de revisiter l'écrivaine d'un œil adulte, avec un de ses premiers romans, Un barrage contre le Pacifique.  Cela m'a permis de comprendre pourquoi j'avais rejetée cette pauvre Marguerite!  À l'adolescence, on aime s'identifier aux personnages, on veut des intrigues qui nous font vibrer, nous remplissent d'émotions!  On se fiche pas mal de l'écriture, de la beauté des descriptions, etc.

Or, si j'en juge d'après ce roman-ci, Duras c'est tout le contraire.  L'intrigue, si elle reste intéressante, présente tout de même beaucoup de longueurs.  Quant aux personnages, on ne s'y attache pas du tout, ils sont même carrément antipathiques par moment.  

Mais quelle plume!  Une plume qui arrive à être à la fois distante, presque froide, et très évocatrice.  J'ai adoré les descriptions de l'Indochine des années trente.  L'ambiance est extraordinaire, que ce soit lorsqu'on se trouve sur la plantation ou bien en ville.  L'exploitation des colons peu fortunés par les fonctionnaires corrompus nous fait rager, mais ce n'est rien par rapport à la situation des indigènes, dont les enfants tombent comme des mouches à cause de la malnutrition.  

Trop contente d'avoir renoué avec Marguerite! 

  

Un barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras, 1950, 365 p.