20 août 2021

Une Vie

Entre Guy et moi, ça avait mal commencé...  Je n'avais rien compris au Horla (je lisais peu de Fantastique, à l'époque) et j'avais trouvé le personnage principal de Mademoiselle Fifi vraiment trop antipathique...  

Plus de trente ans après, nouvel essai, et là ça a cliqué!  Tout d'abord, je suis épatée par cette plume à la fois élégante et très lisible.  Mais surtout, j'ai été touchée par l'histoire de Jeanne, une femme de la petite noblesse de province, que l'on suit de la fin de l'adolescence jusqu'au début de l'âge mur.  Maupassant fait la critique de l'éducation que recevaient les jeunes filles de la bonne société, qui les laissait bourrées d'illusions et complètement démunies devant les obstacles de la vie, que ce soit dans leur rôle d'épouse ou de mère.  C'est un très beau portrait de femme, tout en sensibilité mais sans pathos.  Sans oublier les magnifiques descriptions de la campagne normande et de la Corse!

Guy et moi on est réconciliés!


Une Vie de Guy de Maupassant, 1883, 278 p.

11 août 2021

Dans le livre des rêves

Il y a quelques années, j'ai lu et beaucoup aimé La Librairie des ombres de Mikkel Birkegaard, mais je ne savais pas qu'un autre de ses romans avait été traduit en français!  Oui, je suis toujours l'actualité littéraire avec autant d'assiduité...

Enfin, le voilà, la couverture est moche mais le livre est chouette.  Il y a bien quelques petites incohérences, voire même quelques erreurs factuelles (peut-être que je n'ai rien compris au système métrique pendant toutes ces années, mais selon mes calculs, un huitième de litre, ça ne donne pas 250 ml, et je ne décrirais pas un bébé naissant comme pesant «à peine» 5 kg...), mais peut-être celles-ci sont-elles dues à la traduction, allez savoir! 

Mais une fois ces petites bourdes pardonnées, j'ai vraiment apprécié cette intrigue remplie d'idées franchement bien trouvées.  Encore une fois, Birkegaard met les livres et la littérature au cœur de son histoire, et ça, on aime!  De plus, l'ambiance m'a fait penser à celle de L'Ombre du vent de Carlos Ruiz Zafon, sauf qu'on est à Copenhague au milieu du XIXe siècle, ce qui est très original.

Fait cocasse, le livre Les Métamorphoses d'Ovide, que je viens tout juste de terminer (péniblement), y est mentionné!


Dans le livre des rêves de Mikkel Birkegaarde, 2013, traduit du danois, 509 p.  Titre de la version originale: Fra drømmenes Bog, 2012.

05 août 2021

Black Out

Que voilà un bon petit thriller bien glaçant!  Glaçant, c'est le cas de le dire puisqu'il décrit une réaction en chaîne qui se produit dans les centrales électriques européennes, plongeant le continent dans le noir et le froid en plein mois de janvier...  Accident, terrorisme?

La description des événements est extrêmement réaliste, on dirait vraiment que cela pourrait se produire!  On constate à quel point l'électricité et l'informatique contrôlent toute notre vie quotidienne: alimentation, eau, systèmes de santé, etc.  L'intrigue se déroule principalement en Europe, mais il n'est pas difficile d'imaginer que la même chose pourrait se produire au Québec, car je pense que nos réseaux sont également reliés à ceux de nos voisins des autres provinces et de la Nouvelle-Angleterre.  Et nous avons de plus en plus dans nos maisons ces fameux compteurs intelligents...

Le dénouement est peut-être un peu facile, mais cela ne m'a pas empêchée d'apprécier cette histoire intelligente, touchante par moments (les pauvres petites vaches, snif!) et bien documentée.

Petite suggestion pour l'éditeur: une liste des personnages avec leur titre d'emploi ainsi qu'un index des acronymes des différents organismes n'auraient pas été de trop, on a parfois un peu de difficulté à s'y retrouver.

 

Black Out de Marc Elsberg, 2015, traduit de l'allemand, 476 p.  Titre original: Blackout.  Morgen ist es zu spät, 2012.

04 août 2021

The Man in the High Castle (Le Maître du Haut Château)

Je n'ai jamais lu Philip K. Dick, mais j'ai apprécié quelques-uns des films tirés de ses romans ou nouvelles (Blade Runner, Minority Report).  Le club de lecture de juillet du forum Livraddict était l'occasion parfaite de découvrir cet écrivain considéré comme un classique de la science-fiction et ce roman souvent cité en exemple quand il est question d'uchronie. 

Première constatation: le style de Dick est plutôt froid.  On passe d'un personnage à l'autre sans s'y attacher.  L'intérêt du roman réside donc ailleurs: c'est un exercice purement intellectuel.  L'auteur nous fait découvrir peu à peu un univers où les Alliés ont perdu la Seconde Guerre mondiale et où Allemands et Japonais se sont divisé le monde, et en particulier les États-Unis.  À nous de découvrir tous les changements que cela a occasionné et d'identifier le point de rupture avec la vraie histoire.  Certains passages, de plus, sont en mode «courant de conscience» (on suit les pensées d'un personnage telles qu'elles se présentent) et les tournures de phrases sont déformées par l'influence de la langue japonaise, deux aspects intéressants mais qui demandent de l'attention et de la concentration.

En gros, j'ai plutôt apprécié ce roman.  Notamment, il fait ressortir à quel point l'histoire est racontée par les vainqueurs.  On entend donc peu parler des camps de concentration, mais les bombardements alliés qui ont rasé certaines villes européennes, faisant des milliers de victimes civiles, sont mentionnés. Alors que bien sûr dans notre réalité, c'est l'inverse!  (À ce sujet, lire le passionnant Voyage d'un Européen à travers le XXe siècle de Geert Mak.  Je n'ai jamais rien lu d'aussi frappant sur les bombardements en Europe.)  À un moment donné, on se croit même dans un thriller ou un roman d'espionnage, c'est palpitant, alors que dans le reste du roman, le rythme est lent.  La fin est intrigante et j'ai hâte d'en discuter avec les autres participants du club de lecture.

Ce qui m'a laissée perplexe, c'est l'aspect temporel de l'intrigue, qui se déroule une quinzaine d'années après la guerre.  Autant de changements en si peu de temps?  Que ce soit au point de vue technologique (colonisation de la Lune et de Mars) ou sociologique (déformation de la langue, nouvelle religion, racisme considéré comme normal), tout ça m'a semblé dur à avaler, pour être honnête.

Bref, j'ai trouvé cette lecture assez prenante mais je ne suis pas sûre que je relirai cet auteur...  à moins que ce ne soit à l'occasion d'un autre club de lecture!  

(La couverture de cette édition numérique m'apprend que cette histoire a fait l'objet d'une série télévisée, quelqu'un l'a vue?)

 

The Man in the High Castle de Philip K. Dick, 1962, 229 p.  Titre de la traduction française: Le Maître du Haut Château.

 


30 juillet 2021

Les Métamorphoses

Aaaaah!  Quel soulagement d'avoir enfin terminé ce bouquin!  Pas qu'il soit mauvais, au contraire, mais la manie d'Ovide de ne pas nommer ses personnages, les désignant par des périphrases (le fils de Jupiter, le dieu aux pieds ailés, la déesse du temple de Machin, etc.), sans oublier que certains dieux ont plusieurs noms, fait qu'on doit constamment se référer aux notes pour s'y retrouver.  Et dans mon édition, les notes sont regroupées à la fin du volume plutôt qu'en bas de page.  Les allers-retours incessants étaient un peu pénibles.   

Que sont donc ces Métamorphoses?  Ce sont de petites histoires racontant des mythes reliés, vous l'aurez deviné, à des métamorphoses.  Ces mythes, se déroulant de la genèse du monde jusqu'au présent d'Ovide, servent bien souvent à expliquer les phénomènes naturels (la naissance d'une rivière) ou la diversité du vivant (Untel se transforme en oiseau et devient le premier corbeau, Unetelle devient le premier olivier, etc), ou encore à illustrer certains débats moraux.

J'avoue avoir eu une nette préférence pour les histoires plutôt courtes.  Dans celles qui durent plus que quelques pages, Ovide a tendance à s’éterniser en de longs monologues (par exemple, sur l'inceste: «C'est mon frère, mais je l'aime, mais c'est mon frère, mais je l'aime, etc. »  Ensuite remplacez «frère» par «père» et reprenez du début quelques chapitres plus loin!) ou en scènes de combat interminables, où il semble avoir entrepris d'énumérer les façons les plus horribles de mourir: yeux arrachés, éclaboussements de cervelle, intestins se répandant sur le sol, etc.  Bon, je confesse que la tête coupée qui continue à lancer des imprécations m'a bien fait rigoler, tout de même!  Souvent, à la suite de ces très longs passages, la métamorphose attendue est expédiée en quelques lignes, ce qui est un peu décevant.

L'histoire du roi Midas avec ses oreilles d'âne m'a rappelé quelque chose: je crois que j'ai lu un album racontant cette histoire quand j'étais enfant!  C'est pourquoi j'ai particulièrement aimé ce chapitre. 

Bon, maintenant je peux revenir à Ulysse de James Joyce (mon défi annuel), que j'avais mis en pause le temps de cette lecture commune avec des participants du forum Livraddict.  Pause qui ne devait durer que quelques semaines... et qui s'éternise depuis le mois d'avril! 


Les Métamorphoses d'Ovide, an 1 avant Jésus-Christ, 620 p. incluant les annexes. 

27 juillet 2021

Meurtriers sans visage

Depuis des années, quelques tomes de la série de l'inspecteur Wallander d'Henning Mankell, offerts par ma belle-mère, attendent sagement dans ma bibliothèque.  J'aime beaucoup la plume de cet écrivain suédois dont j'ai apprécié les thrillers et drames psychologiques que  j'ai eu l'occasion de lire, mais j'hésitais à me lancer dans sa série policière.  Premièrement, c'est une longue série (12 tomes) et j'en ai déjà commencé plusieurs que j'aimerais un jour continuer, voire même terminer (Donna Leon, Mma Ramotswe, Arnaldur Indridason, Tony Hillerman, etc).  Deuxièmement, il me manquait le premier tome de la série et je savais que, même si les intrigues policières ne sont pas liées d'un livre à l'autre, on assiste tout de même à une évolution du personnage, de ses liens avec sa famille et ses collègues.  

Finalement, je me suis décidée et j'ai emprunté ce premier tome en prêt numérique.  Grand bien m'en fit, car j'ai beaucoup aimé retrouver le style de l'auteur, très lisible sans être simpliste. L'équilibre entre l'enquête, les scènes d'action et la vie privée de Wallander est savamment dosé et, comme toujours chez Mankell, des questions importantes sont soulevées (les réfugiés, la montée de l'extrême-droite).  Les personnages sont très humains, souvent même maladroits, ce qui les rend sympathiques.  La fin est peut-être un peu facile, mais on m'a dit que les intrigues s'améliorent dans les romans suivants.  Ça promet!


Meurtriers sans visage de Henning Mankell, 1994, traduit du suédois, 246 p.  Titre de la version originale: Mördare utan ansikte, 1991.

12 juillet 2021

The Tombs of Atuan (Les Tombeaux d'Atuan)

 Earthsea (Terremer), tome 2

Comme j'aime diversifier mes lectures, il est rare que j'enfile les tomes d'une série presque à la suite les uns des autres.  Que je n'aie lu que trois romans entre les deux premiers tomes de Earthsea vous donne un gros indice sur le coup de cœur que j'ai éprouvé pour la plume d'Ursula Le Guin.  Évidemment, le fait que les romans sont très courts aide à ne pas se lasser, mais ce n'est vraiment pas le facteur principal.

Cette deuxième histoire est complètement différente de la première.  Alors que dans A Wizard of Earthsea le héros voyageait d'un bout à l'autre du monde connu, ici l'action se déroule presque entièrement dans un lieu unique et en huis-clos.  Nous sommes dans un temple où sont célébrés depuis la nuit des temps des rites sanglants.  Réincarnation de l'ancienne grande prêtresse, une jeune fille explore les lieux, particulièrement les mystérieux souterrains où la lumière ne doit jamais pénétrer et qui donnent accès à un labyrinthe légendaire. 

L'action est un peu lente à démarrer, mais à partir du milieu du roman, tout s'accélère et l'intrigue devient tout simplement palpitante.  L'ambiance, noire et angoissante à souhait, devrait plaire notamment aux amateurs de Lovecraft, même s'il n'y a aucun monstre tentaculaire! 

À quand le tome 3? 


(J'écris un billet séparé pour chaque tome, bien qu'en fait je les lis dans un recueil regroupant les quatre premiers romans, d'où cette image de couverture qui revient chaque fois...)

The Tombs of Atuan (Earthsea, tome 2) d'Ursula Le Guin, 1970, 133 p.  Titre de la traduction française: Les Tombeaux d'Atuan (Terremer, tome 2).