Bob August m'a devancée; comme moi il a lu l'article du journal
La Presse du samedi 30 janvier intitulé
Lectures scolaires: Kafka ou Twilight? Ma première réaction: n'y a-t-il pas un juste milieu entre ces deux extrêmes? Alexandre Dumas, Réjean Ducharme? Michel Tremblay ne devrait-il pas être un incontournable dans nos écoles? Reste que la question soulevée par ce dossier (lisez aussi les autres articles, les liens sont fournis au bas du premier) est fort intéressante. Devrait-on imposer aux élèves des lectures plus faciles (par exemple la série des
Harry Potter,
Amos Daragon, ou même des bandes dessinées!) pour les encourager à lire, ou au contraire leur faire découvrir des auteurs vers lesquels ils n'iraient pas spontanément? Je pencherais vers un mélange des deux options, soit des oeuvres plus faciles pour les 12-13 ans, et plus exigeantes par la suite. Le ministère de l'Éducation ne veut pas imposer de titres, laissant carte blanche aux enseignants; c'est compréhensible, mais il me semble que certains écrivains devraient être obligatoires, question de se donner une base culturelle commune.
«Dans mon temps» (dit avec une voix chevrotante de vieille matante), il me semble qu'on se consacrait surtout à la littérature québécoise. Au secondaire, je me souviens notamment du
Torrent d'Anne Hébert, d'
Agaguk de Thériault et de
Poussière sur la ville de Langevin, que j'avais trouvé déprimant mais qui avait donné lieu à un débat animé en classe sous la forme d'un procès avec juge, avocats, témoins, etc. Une bonne idée de notre professeur pour rendre la littérature plus vivante, plus incarnée. Comme j'avais choisi l'option français-théâtre en secondaire 5, je garde un souvenir ému de
Salut Galarneau! de Jacques Godbout, que nous avions aussi vu joué au Théâtre Denise-Pelletier avec un Serge Thériault inoubliable dans le rôle principal (au fait, les écoliers vont-ils encore au théâtre?). Au CÉGEP, on continuait dans la même veine avec
Le Survenant de Guèvremont,
Maria Chapdelaine d'Hémon,
Bonheur d'occasion de Gabrielle Roy...
Pour ce qui est de la littérature française et étrangère, il me semble que c'est là que le bât blessait. Je ne me souviens pas d'avoir lu un seul auteur classique français à l'école secondaire, du moins pas un livre complet (je parle ici des lectures obligatoires, car en lectrice assidue je connaissais déjà Dumas, Molière, etc). On effleurait plutôt plusieurs oeuvres grâce à ces recueils d'extraits que je trouvais extrêmement frustrants (encore maintenant je ne peux approcher de George Sand sans me boucher le nez). J'ai souvenir d'une discussion presque hargneuse avec mon professeur de français de secondaire 3 au sujet de
Cyrano de Bergerac... La célèbre tirade du nez s'interprète différemment si on la prend hors contexte, et encore aujourd'hui je suis convaincue que le prof en question n'avait jamais lu la pièce entière, ce qui m'avait mise hors de moi! Au CÉGEP il me semble bien avoir lu quelques classiques mais les titres m'échappent, à part
L'Écume des jours de Vian et la poésie de Prévert que j'avais déjà découverts avec bonheur par mes propres moyens.
Ma plus belle expérience de lecture scolaire, ce fut en sixième année du primaire, lorsqu'un matin notre professeur nous lut à voix haute les premiers chapitres de
Bilbo le Hobbit. Pour plusieurs enfants cela avait été la révélation que la lecture pouvait être autre chose qu'une corvée. Il nous avait ensuite invités à continuer par nous-mêmes le roman, sans aucune obligation. Durant la récréation du midi, les trois-quarts des élèves s'étaient rendus les uns après les autres à la librairie du quartier pour essayer d'en faire l'acquisition. J'avais découvert ce jour-là un de mes écrivains chouchous, mais surtout j'avais eu l'impression de participer à une sorte de communion presque mystique: moi dont le principal passe-temps était la lecture (ce qui dans le temps comme maintenant ne faisait pas de vous l'écolière la plus
cool de la classe), j'avais pu partager ce plaisir avec tout un groupe.
Et vous, quelles ont été vos lectures scolaires les plus marquantes (en bien ou en mal), et quelles furent les grandes lacunes de votre éducation?