15 décembre 2021

Burgundy

Dans ces récits autobiographiques, Mélanie Michaud raconte divers épisodes de son enfance et de son adolescence dans le quartier montréalais de la Petite-Bourgogne, surnommé Burgundy par ses habitants.

J'ai trouvé le début très emballant, je dirais même les trois premiers quarts du livre.  Malgré les sujets très durs (pauvreté, violence, alcoolisme...), on s'amuse beaucoup, grâce surtout aux réparties de cette petite fille qui n'a pas la langue dans sa poche!  L'auteure manie le joual avec adresse, c'est jouissif!  J'ai seulement un mini-bémol pour ce qui est du vocabulaire: comme les récits se déroulent dans les années 80 et 90 (et même si je comprends bien que la narratrice, elle, nous est contemporaine), je me serais passée d'anglicismes  plus modernes qui gâchent un peu l'ambiance, comme «passer out» (s'évanouir) ou «kicker out» (à l'époque on aurait plutôt dit kicker dehors). Mais peut-être est-ce un petit truc qui n'agacera personne d'autre que moi?

Malheureusement, le dernier quart du bouquin devient selon moi trop répétitif. J'ai commencé à ressentir une certaine lassitude et j'ai eu envie de lui dire: ça va, on a compris, ton père te battait, personne ne te comprenait, blablabla...  Je sais, c'est épouvantable de dire ça, et même juste de le penser!  Mais je ne pouvais pas m'en empêcher, je lisais trois paragraphes et je retournais jouer au Solitaire sur mon ordi...

Verdict: vaut amplement la peine d'être lu mais aurait mérité quelques coupures (allo, monsieur l'éditeur?).


Burgundy de Mélanie Michaud, 2020, 198 p.

11 décembre 2021

Le Bal des folles

Petite déception que ce roman de Victoria Mas dont j'attendais beaucoup, vu les critiques élogieuse qu'il a obtenues ici et là, sans oublier le prix Renaudot des lycéens...

Ce n'est pas une mauvaise lecture, car le décor est intéressant: l'action se déroule à Paris au XIXe siècle, principalement dans l'hôpital de La Salpêtrière, ce fameux asile psychiatrique pour femmes.  L'ennui, c'est que j'ai trouvé à ce roman quelques défauts, rien de majeur mais des petits trucs qui s'accumulent.

Tout d'abord, le côté historique aurait pu être beaucoup plus approfondi.  J'aurais aimé en apprendre davantage sur le fonctionnement de l'hôpital, sur la vision que l'on avait des différents troubles mentaux abordés et les traitements offerts (c'est quoi cette histoire de massage d'ovaires?), sur les recherches du fameux Dr Charcot, personnage qui aurait d'ailleurs mérité de faire plus qu'un ou deux petits coucous dans le récit!   

Ensuite, l'auteure introduit dans l'intrigue un aspect paranormal qui affaiblit son propos, puisqu'il détourne l'attention du sujet principal, le fait qu'une femme puisse être internée contre son gré par son père ou son mari dès que son comportement est le moindrement anormal ou dérangeant (sans que l'accusateur ait à fournir la moindre preuve, d'ailleurs!).

Enfin, je n'ai pas été épatée par la plume de Victoria Mas.  Quelques tournures de phrases inélégantes, des répétitions (on le saura, qu'il y avait des allumeurs de réverbères!), quelques pléonasmes (une jeune adolescente, par opposition à une vieille adolescente, peut-être?)...  Rien d'épouvantable, mais quand je commence à remarquer des petits défauts, après on dirait que je les cherche et ça me fait décrocher du roman!  Ça vous fait ça également?

Cependant, la fin est assez réussie et a su me surprendre, bien que la scène du fameux bal passe beaucoup trop rapidement. 

Bref, un sujet très intéressant mais mal exploité.  Dans la même veine, et avec un côté fantastique beaucoup mieux intégré à la trame, je vous recommande plutôt Affinity (Affinités) de Sarah Waters, qui se déroule dans une prison pour femmes en Angleterre. 


Le Bal des folles de Victoria Mas, 2019, 251 p.

01 décembre 2021

Where the Crawdads Sing (Là où chantent les écrevisses)

Vous cherchez du dépaysement, vous voulez vous réchauffer alors que l'hiver s'installe?  Ce roman est parfait pour vous!

En effet, on se retrouve immergés dans les marais de la Caroline du Nord.  Il fait chaud et humide, et la vie foisonne dans tous les petits racoins du lagon.  On aperçoit un héron ici, un ouaouaron là, on décrypte les signaux lumineux des lucioles, sur la plage les mouettes viennent manger des croûtons de pain à nos pieds...  Un pur ravissement!

Mais attention, tout n'est pas que calme et volupté, il y a des scènes assez violentes et dures, dont plusieurs mettent en scène des enfants, de surcroît, et je préfère en avertir les cœurs sensibles!  De plus, je classe ce livre dans les policiers, car il y a bien un cadavre et une enquête (ce n'est pas un divulgâcheur, on l'apprend dès le premier chapitre), mais les vrais amateurs de polars pourraient être déçus car ce n'est pas l'élément dominant de l'intrigue.  Le plus important, c'est l'évolution du personnage principal, Kya, «la fille du marais», qu'on suit de l'âge de cinq ans jusqu'à l'âge adulte.

Si j'ai une toute petite réserve, c'est que certaines métaphores sont un peu trop soulignées.  Par exemple, on a saisi dès la première mention que Chase utilise son yacht au moteur puissant et aux couleurs vives comme un oiseau mâle utilise son plumage pour impressionner les femelles; pas besoin de le redire quelques chapitres plus loin.  Et dans le dernier chapitre, on nous explique la personnalité du personnage principal, alors qu'on avait déjà tout compris, ou au moins tout ressenti sans nécessairement y avoir mis des mots. Mais c'est un tout petit bémol, qui n'a nullement diminué mon plaisir.


Where the Crawdads Sing de Delia Owens, 2018, 324 p.  Titre de la traduction française: Là où chantent les écrevisses.

27 novembre 2021

Timbuktu (Tombouctou)

Surprenant!  

Le personnage principal de ce roman jette un regard naïf sur l'humanité et ses travers: maladie mentale, itinérance, enfants maltraités, couples en déroute...  Pourquoi naïf, demanderez-vous?  Ce personnage est un chien, nommé Mr Bones!

Mais ce n'est pas cela le plus surprenant.  Ce livre me semble complètement différent des autres œuvres de Paul Auster, qui d'habitude fait plus appel à l'intellect du lecteur qu'à ses émotions.  Cette fois, pas de mise en abyme ou autre construction sophistiquée; il y a bien quelques flashbacks, mais l'intrigue reste assez linéaire.

Du coup, j'ai été décontenancée et je me suis demandé tout le long quel était le but d'Auster en écrivant cette histoire...  Si c'était de nous surprendre, c'est réussi!  J'ai tout de même eu du plaisir à la lire car ce Mr Bones est vraiment adorable et ses réflexions sont intéressantes (même s'il est vraiment trop intelligent, ce pitou!).

Bref, une lecture sympathique mais que je ne recommanderais pas à qui veut découvrir la plume de l'auteur.

 

Timbuktu de Paul Auster, 1999, 181 p.  Titre de la traduction française: Tombouctou.


17 novembre 2021

The Starless Sea (La Mer sans étoiles)

Ohlala les amis!  Quel roman! 

De quoi ça parle?  Euuuhhhhh...  Ça commence avec un pirate dans une prison, et ensuite y a un étudiant qui trouve un livre étrange dans la bibliothèque de son université, et dans ce livre est raconté quelque chose qui lui est arrivé quand il était petit, alors il enquête là-dessus et se retrouve dans un bal masqué à New York, et il est question d'abeilles, d'épées, de clés et de portes magiques, du Temps et du Destin qui sont amoureux, et... non, c'est impossible à résumer, il faut le lire!

Je dois toutefois vous prévenir que c'est une lecture exigeante, à réserver à un moment où notre cerveau a une bonne disponibilité.  En effet, on suit tour à tour plusieurs personnages dont les parcours s'entrecroisent et se répondent, on se promène dans le temps et l'espace, et l'histoire principale est entrecoupée de petits contes (souvent ce procédé m'énerve mais ici c'est très bien fait et toujours pertinent).  

D'ailleurs je vous avoue que j'ai failli décrocher dans la cinquième partie (il y en a sept en tout) tant la trame devient complexe et chargée de symboles et de métaphores.  Mais Morgenstern arrive à nous ressaisir juste à temps, heureusement car la suite est formidable.  En fait, tout le livre est délicieux, avec son ambiance onirique et mystérieuse, son intrigue sous forme de casse-tête dont tous les morceaux finissent par s'imbriquer, ses personnages originaux et surtout ses nombreuses références littéraires.

Et puis il y a des chats partout, que demander de plus?

 

The Starless Sea de Erin Morgenstern, 2019, 489 p. Titre de la traduction française: La Mer sans étoiles.

11 novembre 2021

Les Vraies Richesses

 En général, j'adore me lancer dans une lecture en ne sachant même pas de quoi il sera question.  C'est pourquoi je ne lis jamais les résumés, présentations de l'éditeur et autres quatrièmes de couverture. Bien sûr, cela vient avec son lot de déconvenues occasionnelles!  Et c'est ce qui s'est produit ici.  Je croyais me délecter d'un roman du terroir, je tombe sur un essai!     

Il y a tout de même de magnifiques passages dans cet essai, comme celui où les paysans d'un village se réapproprient la tradition artisanale du pain, un geste de défi envers les courtiers du marché du blé.  J'y ai retrouvé la plume magnifique de Giono, sa force évocatrice, sa poésie.  Mais je trouve que d'autres passages ont mal vieilli et sont très manichéens: la ville, c'est le mal incarné, le bonheur n'est possible qu'à la campagne!  

Résultat, j'ai encore plus hâte de renouer avec un roman de cet écrivain.  Ce sera sûrement dans les prochains mois.  J'ai notamment Que ma joie demeure dans ma ligne de mire...


Les Vraies Richesses de Jean Giono, 1936, 121 p.

02 novembre 2021

The Farthest Shore (L'Ultime Rivage)

 Earthsea (Terremer), tome 3

Quel grand plaisir de renouer avec la plume magnifique d'Ursula Le Guin!  Elle me fait beaucoup penser à Tolkien par l'élégance de ses dialogues, mais pour ce qui est des descriptions, je dirais qu'elle est à l'autre bout du spectre, préférant mettre la table en quelques mots et laisser notre imagination faire le reste.  J'adore ce procédé!

Par contre, j'ai trouvé l'intrigue de ce troisième tome légèrement inférieure à celles des deux premiers.  Ça manquait un peu d'intensité...  Le mage Sparrowhawk, accompagné du jeune noble Arren, enquête sur une étrange malédiction affectant la magie dans différentes région de Earthsea.  Le hic, c'est que pour les deux premiers tiers du roman, on vogue d'une île à l'autre dans un genre de grisaille et de brouillard, sans trop savoir à quoi ou à qui l'on a affaire, donc cela m'a semblé un peu longuet. 

Le dernier tiers par contre est vraiment formidable et a fait remonter d'un coup mon estime pour ce tome.  En plus, l'ambiance qui y règne était parfaite pour ce week-end d'Halloween!

 

The Farthest Shore (Earthsea, tome 3) de Ursula Le Guin, 1968.  Titre de la traduction française: L'Ultime Rivage (Terremer, tome 3).