07 janvier 2024

Alfie

Après une lecture un peu ardue (coucou M. Rushdie!), quel plaisir de se relaxer les neurones avec une petite SF drôlatique!  Surtout que grâce à une mise en page très aérée, j'ai eu l'impression que ça se lisait tout seul...  J'ai dévoré plus de quatre cents pages en vingt-quatre heures (moi qui suis une lectrice-escargot), ça vous donne une idée?

De quoi ça cause?  On est dans un avenir proche, et une famille de la classe moyenne installe dans sa maison le tout nouveau système de domotique contrôlé par une intelligence artificielle répondant au nom d'Alfie.  Au départ, celui-ci (car cette IA semble être de genre masculin) ne connaît rien des humains et doit donc apprendre à les comprendre pour mieux les servir... ou les espionner?  Cela donne lieu à des réflexions amusantes, surtout en ce qui concerne le comportement du chat Simba!  Je dois dire que j'ai pouffé de rire à plusieurs reprises, sous les yeux interloqués de ma propre minette.  Je vous laisse découvrir la suite, et d'ailleurs ne lisez pas la quatrième de couverture, qui divulgâche un peu trop à mon goût!

Parlant de divulgâcheurs, le seul défaut que j'ai trouvé à ce roman c'est qu'il révèle le coupable du Meurtre de Roger Ackroyd d'Agatha Christie, faute impardonnable à mes yeux!!!  Étrange coïncidence, c'est ce même polar que je me suis fait divulgâcher quand j'étais ado par ce crétin de Petit Robert des noms propres, un incident qui est probablement la cause de la «divulgâchophobie» dont je suis affligée depuis...

Sans que cette lecture soit une expérience inoubliable, j'ai vraiment beaucoup apprécié le mélange des genres SF/policier/comédie de ce roman qui, sous des allures légères, soulève quand même quelques réflexions intéressantes sur la place grandissante que la technologie en général et l'hyperconnectivité en particulier prennent dans nos vies.


Alfie de Christopher Bouix, 2022, 440 p.

05 janvier 2024

Midnight's Children (Les Enfants de minuit)

Dans mon bilan annuel, il y a quelques jours, je vous disais que j'avais eu plusieurs lectures «en dents de scie», avec de très beaux moments et d'autres où je m'emm... royalement...  Ce livre-ci fait partie de ce club!  J'ai même failli l'abandonner à quelques reprises!

C'est très touffu, j'ai dû plusieurs fois retourner en arrière pour me remémorer tel ou tel détail... Sauf que parfois, je n'arrivais pas à retrouver le passage en question, parce qu'en fait, il s'agissait de quelque chose qui nous serait expliqué cinquante pages plus loin! C'était vraiment mélangeant!  De plus, à cause de cette densité, l'auteur se sent régulièrement obligé de faire des rappels et des récapitulations, ce qui donne une impression de répétition (même si c'est utile!).

En outre, j'ai trouvé la prose de Rushdie un peu ardue à lire.  Beaucoup de termes indiens (heureusement que le dictionnaire anglais de ma liseuse en donnait la plupart du temps la définition!), mais ce n'est pas que ça.  J'avais presque l'impression de faire du surplace tellement le style était dense.  Je ne me souviens pas d'avoir eu de telles difficultés avec The Enchanteress of Florence, qui avait été un gros coup de cœur!

Il y a néanmoins de très beaux passages (un qui se déroule dans la jungle, mémorable), et j'aime beaucoup l'humour assez pince-sans-rire de Salman.  L'idée centrale du roman, celle de faire de la vie du narrateur le miroir de la société indienne depuis l'indépendance du pays, est originale et assez bien exploitée, malgré quelques longueurs dans les parties historiques.  Et la fin est excellente, donc je reste sur une note positive, mais je suis quand même bien contente de l'avoir terminé et je ne suis pas sûre que je tenterai d'autres livres de cet écrivain!


Midnight's Children de Salman Rushdie, 1981, 580 p.  Titre de la traduction française: Les Enfants de minuit.

31 décembre 2023

Bye-Bye 2023!

Lecturesquement parlant, 2023 s'est avérée une année faite de hauts et de bas: de belles surprises, des valeurs sûres qui m'ont déçue (MM. Pennac et Irving, c'est de vous que je parle!)...  À plusieurs reprises, ces montagnes russes se sont même fait ressentir dans un même roman: mauvais début/fin excellente, ou l'inverse!  En quantité, petite augmentation par rapport à l'an passé (+7).

Tous les livres lus:

  1. Collapse de Jared Diamond
  2.  The White Company d'Arthur Conan Doyle
  3. 117 Nord de Virginie Blanchette-Doucet
  4. Monsieur Malaussène de Daniel Pennac
  5. Tales from Earthsea (Earthsea, tome 5) d'Ursula Le Guin
  6. Les Cavaliers de Joseph Kessel
  7. Glaise de Frank Bouysse
  8. Le Premier Quartier de la lune (Les Chroniques du Plateau Mont-Royal, tome 5) de Michel Tremblay
  9. Un Chien à ma table de Claudie Hunzinger
  10. Vita Nostra (Les Métamorphoses, tome 1) de Marina et Sergueï Diatchenko    
  11. Bel-Ami de Guy de Maupassant
  12. Three Men in a Boat (to Say Nothing of the Dog) de Jerome K. Jerome
  13. À l'hôtel des Pays d'en haut de Maryse Rouy
  14. Les Rivières suivi de Les montagnes de François Blais
  15. The Devil in the White City d'Erik Larson
  16. Thérèse Desqueyroux de François Mauriac
  17. Good Omens de Terry Pratchett et Neil Gaiman
  18. Quand viendra l'aube de Dominique Fortier
  19. The Pearl de John Steinbeck
  20. Mes contes de Perrault de Tahar Ben Jelloun
  21. Le Royaume immobile (Le Paris des Merveilles, tome 3) de Pierre Pevel
  22. The Invention of Solitude de Paul Auster
  23. A Mercy de Toni Morrison
  24. Robinson Crusoe de Daniel Defoe
  25. Clara lit Proust de Stéphane Carlier
  26. Le rouge vif de la rhubarbe d'Audur Ava Olafsdottir
  27. Encabanée de Gabrielle Filteau-Chiba
  28. The Brethren de John Grisham
  29. The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë
  30. The Last Chairlift de John Irving 
  31. Le Lac de nulle part de Peter Fromm
  32. La Cousine Bette de Honoré de Balzac
  33. Cloud Cuckoo Land d'Anthony Doerr
  34. The Adventures of Sherlock Holmes de Arthur Conan Doyle 
  35. Notes from a Small Island de Bill Bryson
  36. A Psalm for the Wild-Built (Monk and Robot, tome 1) de Becky Chambers
  37. Le Joueur d'échecs de Stefan Zweig
  38. Hongrie-Hollywood express d'Éric Plamondon
  39. La Chienne de Naha de Caroline Lamarche
  40. The Midnight Library de Matt Haig
  41. Le Cimetière de Prague de Umberto Eco
  42. The Lady and the Unicorn de Tracy Chevalier
  43. Les Chiens de Riga de Henning Mankell
  44. Gideon the Ninth (The Locked Tomb, tome 1) de Tamsyn Muir
  45. The Other Wind (Earthsea, tome 6) d'Ursula Le Guin
  46. Passez au Salon, anecdotes recueillies par Isabelle Massé et Hugo Fontaine
  47. Hors-sol de Philippe Yong
  48. La Guerre de Troie n'aura pas lieu de Jean Giraudoux
  49. Midnight's Children de Salman Rushdie (en cours, lu aux trois quarts)                                 

Top 3:

  • Cloud Cuckoo Land d'Anthony Doerr, pour le thème de la transmission, pour ses personnages si attachants, pour le mélange réussi d'historique et de SF.
  •  Les Cavaliers de Joseph Kessel, pour la force de la plume, pour le dépaysement complet, pour l'étalon Jehol.
  • The Pearl de John Steinbeck, lui aussi pour la plume, pour l'intensité, pour les thèmes encore si actuels.

Prix Citron:

Pour la troisième année consécutive, après Dickens et Sand, c'est un classique qui reçoit ce titre peu enviable: The Tenant of Wildfell Hall d'Anne Brontë.  Les premiers chapitres sont assez sympathiques, mais dès qu'on plonge dans le journal intime du personnage principal, une bigote insupportable, cela devient d'un ennui profond et, malheureusement, cet ennui perdure jusqu'à la fin.  Heureusement qu'il y a eu Maupassant et son Bel-Ami (excellent) pour redorer le blason des auteurs du XIXe siècle (sachant que Balzac m'a déçu lui aussi)!   

Prix «Vive les livres!»:

Vous l'aurez peut-être remarqué, j'adore les livres qui célèbrent les livres et la littérature!  Et j'ai adoré celui-ci: Clara lit Proust de Stéphane Carlier.  S'il ne s'est pas retrouvé dans mon Top 3, c'est parce que j'ai trouvé l'histoire elle-même un peu banale.  Mais tous les petits clins d’œil à la littérature en général et à La Recherche du temps perdu en particulier sont tout à fait délicieux. 

Prix Découverte:

Une jolie surprise que ce premier roman de Virginie Blanchette-Doucet, 117 Nord.  On y voyage de Val-d'Or à Montréal en une série de petits chapitres désordonnés qui finissent par former une belle histoire dans un cadre original.

Quelques statistiques: 

  • sur la liseuse: 36 (toujours en augmentation, d'année en année!)
  • lus en VO anglaise: 22
  • littérature québécoise: 9
  • littérature ukrainienne: 1
  • littérature marocaine: 1
  • littérature scandinave: 2 (j'y inclus l'Islande, même si ce n'est pas correct au sens strict)
  • littérature autrichienne: 1 
  • littérature italienne: 1

Défi livresque 2024:

Hum... *petite toux*  En 2023, je me suis finalement décidée à me lancer dans Mémoires d'Outretombe de Chateaubriand, mais je m'y suis prise si tardivement et j'avance si lentement que je n'ai même pas fini le tome 1... sur six!   C'est très intéressant (en ce moment, François-René joue au coureur des bois en Amérique!), mais j'oublie tout simplement d'interrompre mes autres lectures pour m'y plonger!  Du coup, le défi est reporté à l'année 2024 (en espérant ne pas l'étirer jusqu'en 2025!)

Et vous, comment a été votre année de lecture?  Des résolutions pour 2024? 

 

Je profite de l'occasion pour vous remercier de me suivre dans mes divagations et de me stimuler de vos commentaires enrichissants! Je vous souhaite, chers lecteurs et lectrices, une merveilleuse année, la paix, la santé, le bonheur et bien sûr de magnifiques lectures en 2024! 

22 décembre 2023

La guerre de Troie n'aura pas lieu

Dans cette pièce créée en 1935, Jean Giraudoux revisite le mythe de la guerre de Troie en mode tragi-comique.  Hector, prince troyen, revient d'une guerre contre un autre peuple et apprend que les Grecs arrivent, menaçant d'assiéger la ville si on ne leur rend pas la belle Hélène, enlevée par Pâris. 

J'ai bien apprécié les petites touches d'humour, comme ici:

              PÂRIS

Hélène est une très gentille personne. N’est-ce pas, Cassandre ?

              CASSANDRE

 Assez gentille.

              PÂRIS

Pourquoi ces réserves, aujourd’hui ? Hier encore tu disais que tu la trouvais très jolie.

            CASSANDRE

Elle est très jolie, mais assez gentille.

            PÂRIS

Elle n’a pas l’air d’une gentille petite gazelle ?

            CASSANDRE

Non.

            PÂRIS

C’est toi-même qui m’as dit qu’elle avait l’air d’une gazelle !

            CASSANDRE

Je m’étais trompée. J’ai revu une gazelle depuis.

 

Mais d'autres passages m'ont semblé tomber à plat tant l'humour paraît forcé.  Dans d'autres cas, il me manquait peut-être quelques références pour tout saisir, après tout cette pièce date de près d'un siècle!

C'est surtout lorsqu'on la replace dans le contexte de l'entre-guerre que l’œuvre prend toute sa signification et sa force.  Les militaires ayant participé à la Première Guerre mondiale ne se sont pas encore remis de ce traumatisme effroyable que déjà des va-t-en-guerre (qui bien sûr resteront à l'abri loin des tranchées) jouent du clairon de chaque côté de la frontière. La pression monte, monte...  Dans la pièce, Hector se fait la voie des pacifistes, réussira-t-il à calmer le jeu? 

                HECTOR

C’est ce que nous allons voir. Cours demander à Priam s’il peut m’entendre à l’instant, et rassure-toi. Tous ceux des Troyens qui ont fait et peuvent faire la guerre ne veulent pas la guerre.

            ANDROMAQUE

Il reste tous les autres.


Cela m'a rappelé un roman paru à la même époque, Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline, presque insoutenable de noirceur mais dont certains passages sont magnifiques, notamment ceux contre les fauteurs de guerre. 

Petit bémol, j'espérais que Cassandre, cette prophétesse dont la malédiction est de ne jamais être crue, serait plus présente, car c'est un de mes personnages préférés de la mythologie grecque.  Elle participe à quelques scènes clés, et d'ailleurs la réplique finale lui revient, mais j'en aurais pris encore plus!

Je vous laisse découvrir si la guerre de Troie aura bien lieu ou non...


La guerre de Troie n'aura pas lieu de Jean Giraudoux, 1935, 304 p. incluant les annexes.

09 décembre 2023

Hors-sol

Premier roman pour Philippe Yong, professeur de lettres né en France de parents coréens, enseignant au collège Stanislas à Montréal (du coup, je le classe en littérature québécoise, na!).  

Premier roman, disais-je, on lui pardonnera donc quelques maladresses: un style parfois un peu prétentieux, une fin qui s'étire un peu trop, quelques incohérences dans les réactions des personnages...

Ces petits défauts, heureusement, ne m'ont pas empêchée d'apprécier cette histoire assez sympathique qui parle d'exil et de déracinement.  En effet, le personnage principal, un agronome portugais travaillant dans une serre du Mile-End, n'arrive à prendre racine nulle part, à l'instar des laitues hydroponiques qu'il cultive et des mousses et lichens accrochés tant bien que mal aux pierrailles de l'Islande, où l'action se transporte en deuxième partie du roman.

Quand l'intrigue se déroule dans un quartier de Montréal que je connais, c'est déjà un gros plus.  Mais même en terrain inconnu, j'ai trouvé que l'auteur se débrouillait fort bien pour décrire les diverses ambiances, que ce soit celle du terrain désaffecté où est installée la serre ou celle, glaciale et lunaire, de l'Islande.

Bref, un roman imparfait mais tout de même bien intéressant.

P.S.: Ne lisez pas la quatrième de couverture, elle divulgâche énormément!


Hors-sol de Philippe Yong, 2022, 217 p.

07 décembre 2023

Passez au Salon

Un court billet sur ce court recueil d'anecdotes...  On y retrouve les souvenirs d'une cinquantaine d'auteurs, certains très connus, d'autres moins, concernant leurs passages dans des Salons du livre du monde entier.

L'ensemble est sympathique, les petits récits étant tour à tour touchants, surprenants ou amusants.  J'ai été particulièrement émue par celui de Marie-Claude Savard (la journaliste sportive) qui, après la parution de son livre sur le deuil de ses parents, a eu la surprise de trouver à son kiosque au Salon de Québec un groupe d'oncles, tantes et cousins qu'elle n'avait jamais rencontrés!

Rendue au milieu du recueil, j'ai toutefois trouvé qu'il y avait un petit côté répétitif et j'ai craint de me lasser...  Je l'ai donc continué plus lentement en lisant autre chose en parallèle.  Je vous conseille d'adopter cette stratégie qui a bien fonctionné pour moi.
 

 

Passez au Salon, anecdotes recueillies par Isabelle Massé et Hugo Fontaine, 2014, 272 p.

06 décembre 2023

The Other Wind (Le Vent d'ailleurs)

Earthsea (Terremer), tome 6

Ooouuuiiinnn!!! J'ai terminé cette magnifique série, snif snif!  Bon, il me reste bien quelques nouvelles qui se déroulent dans le même univers, je tenterai de mettre la main sur elles.  J'ai vu notamment que The Daughter of Odren est disponible en prêt numérique.  En général, la nouvelle n'est pas un genre littéraire qui m'attire, mais pour me plonger à nouveau dans le monde de Earthsea, je suis prête à tout!

Pour ce qui est de ce tome 6, quel immense plaisir de retrouver la plume de Le Guin!  Je suis fascinée par son pouvoir d'évocation.  Son style est épuré, presque minimaliste et pourtant en quelques phrases nous voilà transportés dans un autre monde.  On revoit aussi avec bonheur les personnages des tomes précédents et on en découvre quelques nouveaux.

Je n'ai qu'un petit bémol, j'ai trouvé la fin un peu trop simple et rapide.  Sans m'attendre à quelque chose de grandiose à la Tolkien, j'aurais souhaité qu'un certain passage soit plus étoffé, qu'il y ait une plus grande tension.  Mais la résolution de l'histoire en elle-même est satisfaisante et conclut bien la série.  Elle a un petit côté doux-amer qui convient parfaitement à l'atmosphère générale.

Maintenant, j'ai déjà hâte de retrouver cette plume magique dans un autre registre, la science-fiction!  Je pense lire La Main gauche de la nuit en 2024...


The Other Wind (Earthsea, tome 6) d'Ursula Le Guin, 2001, 328 p. Titre de la traduction française: Le Vent d'ailleurs (Terremer, tome 6) (Il faut noter que les tomes en français sont divisés différemment dans certaines éditions.)